De l'empereur Constantin à nos jours, une histoire de l’hôpital

Accueillir, isoler, soigner, guérir… Pilier du modèle social français, l’hôpital a connu une histoire longue, parsemée de lentes évolutions et de brusques révolutions. Des hospices religieux à la Révolution, de Saint Louis à Napoléon, s’est bâti en son sein une perception évolutive du malade et du soignant sur fond d’emprise de l’Église et de progrès de la médecine. (Cet article est issu de T La revue n°14 - Santé : un équilibre en jeu, actuellement en kiosque).
(Crédits : Istock)

9 juillet 1849. Le regard perçant et la voix assurée, Victor Hugo, depuis peu élu député à l'Assemblée législative, s'apprête à prononcer un discours demeuré dans les mémoires. Profondément marqué par les événements de 1848, il entend ouvrir les yeux de ses collègues élus sur la misère qui frappe le peuple. Hugo a alors un objectif : préserver l'hôpital, service public par excellence et symbole de la grandeur de la France.

« Je ne suis pas, Messieurs, de ceux qui croient qu'on peut supprimer la maladie en ce monde ; la maladie est une loi de la nature ; mais je suis de ceux qui craignent que l'on puisse fort bien détruire l'hôpital public. Remarquez-le bien, Messieurs, je ne dis pas transformer, détériorer, saboter, torpiller, je dis détruire. L'hôpital public, c'est la société qui dit à l'homme : "Toute vie par elle-même vaut d'être préservée". L'hôpital public, c'est le tout qui dit à la partie : "Tu peux compter sur moi". Quelle grandeur ! que l'on entend de moins en moins, dans ces mots simples : service public. Et d'abord, quelle grandeur dans ce mot de "service" ! Grandeur encore que la société puisse dire à chacun de ses membres : "Je suis à ton service". Tous les droits des individus se payent d'un devoir. Ceux de l'État également. L'hôpital est peut-être le plus beau, et sans doute le plus nécessaire, de ces services que la communauté se doit de rendre - oui, Messieurs, je dis bien : rendre ! - aux citoyens qui la composent. À la porte d'un service public doivent disparaître les privilèges de l'argent. L'hôpital public, et l'école, ce sont des sanctuaires consacrés ; et les inégalités sociales n'y doivent pas pénétrer, pas plus que, disent les légendes, les vampires ne peuvent mettre un seul pied dans les lieux de cultes sans tomber en poussière. »

À l'origine : l'idéal d'hospitalité

Lyrique et passionnée, la vision de l'hôpital telle que défendue par Victor Hugo demeure aujourd'hui encore celle à laquelle les Français sont attachés. Or, celle-ci procède d'une lente construction que des siècles, sinon des millénaires, auront permis de bâtir. On a coutume de faire remonter les premières traces avérées de lieux dédiés à la santé à la fin du IIIe millénaire, en Mésopotamie. C'est à cette époque que, pour la première fois dans l'histoire de l'humanité, s'établissent des traités de médecine, dont le Traité de diagnostics et pronostics, long texte rédigé sur plus de quarante tablettes et près de trois mille entrées. S'y trouvent, à destination des soignants, une liste de pronostics et de remèdes à administrer aux malades, selon la typologie du mal et sa fréquence.

Relativement moderne dans sa forme, en ce qu'il se fie largement à l'observation du mal et à la rationalité du traitement, le traité entend aider, mais surtout lisser la pratique de la médecine sur le territoire babylonien. Nombre d'historiens pensent aujourd'hui que ce texte prenant la forme d'un guide servait en collectivité autant que pour le soin à domicile, permettant ainsi la naissance d'une forme embryonnaire d'hôpital tel qu'on le conçoit aujourd'hui. Il faudra attendre la diffusion du christianisme en Orient comme en Occident pour que la domus hospitalis, « maison où l'on reçoit les hôtes », transmette largement son idéal charitable d'hospitalité. Pour l'heure cependant, plutôt que de soigner les malades, l'hôpital constitue cet endroit où l'on aide son prochain, en lui offrant le gite et le couvert en lieu sûr.

À en croire la littérature de la Société française d'histoire des hôpitaux (SFHH)[1], c'est à Constantinople que ce se joue véritablement l'invention d'un lieu dévolu au soin : « Les principaux hôpitaux dont les textes nous livrent la trace sont postérieurs à 330. Ces établissements sont des fondations stables et structurées. Avant la mort de Constantin en 337, nous savons que trois établissements hospitaliers, peut-être quatre, furent créés dans la nouvelle capitale et qu'un de ces établissements était une léproserie. Constantinople a donc, sur ce point, précédé Rome d'un demi-siècle. »

S'installe alors une particularisation intéressante, distinguant le pandocheion (maison accueillant tout le monde) du xenodocheion (ancêtre de l'hôtel) auxquels il faut ajouter l'hospice pour personnes âgées (gerontocomeion), les crèches (brephotropheion), l'orphelinat (orphanotropheion), l'accueil des invalides, lépreux ou mutilés (lobotropheion) et la soupe populaire (ptochotropheion). Autrement dit : une manière moderne et encore d'actualité de distinguer les publics pour mieux les servir qui n'était pas celle en vigueur en Occident où « tout le monde était reçu sans distinction d'affections ou de catégories : pauvres, estropiés, vieillards, enfants, pèlerins. »

Au Moyen Âge, l'hôtel-Dieu siège de la charité chrétienne

Le tournant a lieu lorsque l'Église, soucieuse à la fois de charité et d'influence, étend sa mainmise sur le soin entendu dans son sens le plus large. En tant que lieu et fonction, l'hôpital va alors devenir l'expression de la charité chrétienne. « Dans les temps farouches du début du VIe siècle, écrit Jean-Noël Fabiani[2], directeur de l'enseignement de l'histoire de la médecine à la Faculté René Descartes, apparaît la figure de Benoît de Nursie (saint Benoît) qui va personnaliser dans sa vie et dans sa règle monastique la charité chrétienne, jusqu'alors inconnue du monde romain qui considère plutôt la compassion comme une faiblesse. Il affirme d'emblée les principes d'une conduite originale envers ceux qui souffrent ou qui sont malades : "Il faut que tout cède au soin qu'on est obligé de prendre des malades, et on doit croire que c'est véritablement Jésus-Christ que l'on sert dans leur personne ; puisqu'il a dit, J'ai été malade, et vous m'avez visité (Matth. 29)." Ainsi les choses sont dites. Benoît exprime clairement le devoir des moines et leur rôle dans les soins à apporter aux malades. Cette attitude va clairement positionner les bénédictins comme dispenseurs de soins au cours des siècles suivants dans toute l'Europe, grâce à leur croissant réseau de monastères permettant d'assurer la santé dans les campagnes. »

En 549, le concile d'Orléans officialise la naissance de l'hospice sous le nom de domus dei. Vagabonds, malades, pèlerins, étrangers s'y mêlent dans ce qui constitue, par essence, un lieu de passage mais aussi de vie. Parfois même, en échange du gite et du couvert, cette population participe à la construction des églises et des cathédrales naissantes. C'est peu ou prou une communauté qui se forme, de fait, dans ce qui ne ressemble pas encore à l'hôpital moderne d'autant plus que, comme le souligne Jean-Noël Fabiani, le malade du début du Moyen Âge diffère largement de ce que nous connaissons aujourd'hui.

« Qu'est-ce qu'un malade au VIe siècle ? Certainement pas un patient atteint d'un cancer un d'une angine de poitrine, il est beaucoup trop jeune pour avoir eu le temps de développer ces pathologies. Il s'agit de jeunes patients dont le problème majeur est surtout lié à la dénutrition, les conséquences d'une vie rude exposée au froid et aux intempéries, aux conséquences d'une infestation parasitaire chronique ou d'une traumatologie non soignée. Les couches populaires (qui sont les clients de ces hôpitaux, les bourgeois et les aristocrates se faisant soigner à domicile) sont les clients privilégiés de ces premiers hôtels-Dieu. Il s'agit de miséreux qui ont plus besoin de soupe que de potions à défaut de soins véritables, ce dont on est bien incapable de leur donner en l'absence de médecine véritablement efficace. » Au cours du haut Moyen Âge et jusque tard dans notre histoire, le soin sera essentiellement accordé par des religieux avec les moyens du bord, grâce aux fruits des jardins des monastères et quelques techniques chirurgicales de base transmises de génération en génération au sein de la confrérie des médecins-clercs. Docteure en Histoire, Judith Aziza a consacré sa thèse à l'histoire de l'Hôtel-Dieu de Marseille.

Elle nous explique : « La pratique religieuse catholique était parfaitement observée dans tous les hôpitaux. La messe y est par exemple célébrée quotidiennement, parfois même directement dans les salles des malades comme c'est le cas à l'Hôtel-Dieu de Marseille où un autel est placé dans chaque salle commune et où des tableaux de personnages saints ornent les murs. » Aziza poursuit : « Dans certaines villes, les religieux gèrent tout : de l'administration jusqu'aux soins. À Marseille, si la religion est parfaitement observée dans les salles des malades, le personnel soignant et administratif est par contre strictement laïque, à l'image de ce qui se passe dans certains pays protestants comme en Suisse. » Si l'esprit est partout le même, chaque ville a sa particularité, son organisation propre.

De Saint Louis à Louis XIV, les assauts du pouvoir royal

Au sortir du Moyen Âge, l'hôpital va se transformer. Plusieurs facteurs l'expliquent : d'une part, l'explosion démographique voyant le triplement de la population française entre l'an mil et l'an 1300 et les grandes famines qui sont liées à l'impossibilité de nourrir tant de nouvelles bouches. D'autre part, les grandes épidémies comme la peste noire de 1348 qui obligent les institutions à se protéger des contagions. Face à ces maux, le remède choisi sera radical : on opère une sélection drastique des hôtes au sein des hospices. Progressivement, les malades sont préférés aux pèlerins et aux mendiants. Le modèle se renverse. L'hospitalité faiblit. On se méfie désormais du nécessiteux en errance et de l'étranger, tous deux susceptibles d'importer virus et pandémies...

Soucieux d'éloigner et de circonscrire la misère, le Roi entend régir la charge hospitalière, une manière habile d'étendre un peu plus son pouvoir... Cela commence tôt, dès Saint Louis, le premier qui, en 1260, crée les Quinze-Vingts, hospice parisien dont la fonction est de recueillir les « pauvres aveugles ». Tout au long de son règne, le très pieux roi capétien dota la France d'autres « aveugleries », comme celle de Caen. Ce n'est pas tout selon la Fédération Hospitalière de France[3] : « Nombre d'édifices furent construits ou réhabilités sur son ordre, comme les maisons-Dieu de Pontoise, Compiègne, Vernon dont les statuts sont parmi les plus anciens rédigés en français que nous connaissons. À Vernon, le roi assura toutes les dépenses sur ses deniers. » On découvre même que le Roi en personne lança les travaux sur le chantier en 1256 et vint « dédicacer l'établissement le 6 septembre 1259 en présence de la cour ». Un tournant s'opère : l'hôpital se politise. C'est dans cette brèche que les souverains suivants vont s'engouffrer.

À Paris, en souvenir de Saint Louis justement, Henri IV construit l'hôpital Saint-Louis en 1605. Une installation géographique au-delà de la porte du Temple, au milieu des champs et marais et donc « hors les murs » qui ne doit rien au hasard. L'objectif est alors de regrouper les patients contagieux et de les tenir en dehors des limites de la capitale pour faciliter la mise en quarantaine. À cette époque déjà, le mécanisme épidémique inquiétait[4]... En mettant le nez dans les affaires de santé, le pouvoir royal va peu à peu défaire l'œuvre charitable au profit d'une vision plus gestionnaire. « C'est toute la question de l'image du pauvre et du malade qui a évolué au cours du temps, résume l'historienne Judith Aziza. Jusqu'à l'époque moderne, le pauvre malade était celui dont on devait prendre soin. Par la suite, son image change. Le pauvre est perçu comme une menace pour la société. Il n'y a qu'à voir les mesures prises sous le "Grand Renfermement" ».

Le Grand Renfermement, justement... Puisque la situation de l'hôpital ne saurait passer sous le feu de son pouvoir solaire et absolu, Louis XIV va entreprendre un vaste plan de refondation du système de santé. Dès 1662, il demande à chaque cité de grande ou de moyenne taille de disposer d'un hôtel-Dieu ou d'un hospice pour accueillir les pauvres, les vieillards, les vagabonds et les orphelins. Pour compléter cet arsenal, le Roi Soleil se fait bâtisseur : en 1656, il ouvre à Paris deux grands hôpitaux généraux : la Salpêtrière pour les femmes et Bicêtre pour les hommes, ainsi qu'un troisième lieu, lui aussi encore connu de nos contemporains, les Invalides, pour les estropiés ayant perdu un membre lors des campagnes militaires. Jean-Noël Fabiani perçoit là comme un changement de paradigme : « En réalité, le pauvre devient un enjeu de sécurité publique bien supérieur à l'enjeu médical que représentent les malades, même contagieux.

Depuis 1612, les pauvres et les invalides ont déjà l'obligation de se rassembler dans les hôpitaux. À l'origine, il devait s'agir d'une démarche volontaire, mais très vite, comme l'hôpital évoque plutôt la prison, ils y sont conduits par une police spéciale, les "Archers des Pauvres" et, en moins de vingt ans, l'hôpital se change en lieu d'incarcération. La charité ne se manifeste donc plus par l'accueil, mais plutôt par l'enfermement, censé résoudre le problème de la pauvreté. L'hôpital général se trouve donc investi d'une mission sociale, celle de redresser la déviance par rapport au "normal" et d'assurer le grand "renfermement" des pauvres. »

Déboires et conquêtes de l'hôpital révolutionnaire

Subissant de plein fouet la lutte d'influence entre pouvoirs politique et religieux, le citoyen étouffe et ne tardera pas à se rebeller. Pourtant, avant 1789, la médecine telle qu'elle s'exerce au sein des maisons de soins a bel et bien fait un bond en avant depuis le Moyen Âge.

« On sait désormais avec certitude que l'hôpital était un lieu de savoir médical bien avant la Révolution ! Des tests de médicaments étaient faits dans certains hôpitaux comme à l'Hôtel-Dieu de Paris. À Marseille, point de pratique de ce genre mais, en revanche, une pharmacie très bien achalandée et des traitements efficaces. En outre, on formait déjà des chirurgiens et des pharmaciens sous l'Ancien Régime » relate Judith Aziza. Pour autant, la situation demeure partout critique, comme le détaille l'historienne Isabelle Bernier : « À la veille de la Révolution, le chirurgien français Tenon publie un mémoire dans lequel il décrit la situation catastrophique de l'Hôtel-Dieu de Paris : 4 000 malades se partagent 1 200 lits dans des salles équipées de latrines défectueuses. Les malades sont quatre à six par lit, tête-bêche, dans des lits prévus pour deux ! La mortalité est évaluée au quart des malades entrés [...]. » Lorsque survient la Révolution, le peuple et ses représentants s'empressent de plaquer leurs idéaux et leurs nouveaux desseins sur un hôpital qui ne prend pas en compte l'intérêt général. On consacre alors la nationalisation des hôpitaux qui se concrétise sous la Convention par un décret du 23 messidor de l'an II (11 juillet 1794). Mais plutôt que de nationalisation, c'est bien de suppression pure et simple dont il s'agit en premier lieu. Car les révolutionnaires en sont persuadés : la fin de l'arbitraire royal fera disparaître purement et simplement la pauvreté et même la maladie. On rêve de cocagne, on se dit que le citoyen libre ne pourra être qu'heureux et sain. Or, très vite, on déchante. Car en dépit des grands principes prônés par les Constitutions de 1791 et de 1793, le nombre de pauvres ne cesse de croître et puisque le nouveau pouvoir a bouté hors de l'hôpital les religieux qui y exerçaient depuis des siècles, on ne soigne plus ou trop peu. Parfois même, on a vendu les murs mêmes des hospices et des hôtels-Dieu à des prix dérisoires pensant qu'en effaçant les traces de la maladie et de la misère, ces maux disparaîtraient aussitôt... Face au marasme, puisque l'État se révèle rapidement inapte à accueillir, soigner et guérir, les pouvoirs publics vont transférer leurs prérogatives aux municipalités. Doucement mais sûrement, la situation se normalise, puis s'améliore même. Désormais libérés du carcan religieux, les hôpitaux et les médecins qui y officient progressent. Clélia-Elsa Froguel, spécialiste des questions de santé et directrice d'Evoke Incisive Health, nous explique : « À la Révolution, on réinvente les hôpitaux, qui deviennent soudain un lieu d'apprentissage et de formation médicale. On instaure la tournée médicale pendant laquelle un médecin chef accompagné d'étudiants vient au chevet des malades. Aujourd'hui encore, les médecins se réunissent pour discuter des cas intéressants et des situations de décès. » Les progrès ne s'arrêtent pas en si bon chemin. Froguel poursuit : « Dans la pratique au jour le jour, on adopte l'examen systématique du patient, la technique de l'auscultation et du stéthoscope pour aider les médecins à détecter les signes de maladie des systèmes circulatoire et respiratoire. L'hôpital devient aussi le lieu de l'autopsie - avec des médecins comme Bichat qui préconisent de chercher des signes de maladie après la mort, et la création de services de pathologie. »

L'esprit de l'hôpital moderne

Par la suite, le travail acharné de réorganisation de Napoléon Bonaparte qui redonne des moyens à l'hôpital et crée l'internat et l'externat, de même que les découvertes successives de l'hygiène (1847), de l'asepsie (1860) par Louis Pasteur et de l'antisepsie (1863) changent la donne et modernisent la vision globale de la santé telle qu'elle doit être dispensée. « Si les hôpitaux étaient des endroits où les pauvres étaient envoyés en dernier recours, reprend Froguel, avec l'essor des nouvelles technologies, rayons X et chirurgie de pointe, les hôpitaux deviennent les lieux où tous peuvent trouver une médecine de précision. » Grâce à ces évolutions dans la technique et dans la qualité du personnel soignant, c'est surtout la perception de la mission de l'hôpital qui change. À compter de la IIIe République, une nouvelle doctrine s'impose, celle d'un hôpital moderne et ouvert à tous sans distinction. Vichy, qui distinguera les patients accueillis selon leurs revenus dans des chambres de 1re, 2e et 3e classe et interdira aux Juifs d'exercer, constituera une sombre parenthèse. Mais dès la fin de la guerre cependant, Robert Debré pose les bases du système actuel. « Nous voulions proclamer et réaliser notre idéal : établir l'égalité entre tous les Français devant la maladie et la souffrance. » Ce dernier réforme donc l'hôpital pour le faire progresser et lui permettre d'atteindre les standards contemporains. L'assurance maladie est créée et ouvre la voie aux droits, pour tous les citoyens français, d'accéder au soin. Dans les années 1960 et 1970, sous l'impulsion de Charles de Gaulle, puis de Georges Pompidou, les Centres Hospitaliers Universitaires (CHU) sont créés grâce au dynamisme de la France des Trente Glorieuses. « À l'intérieur de ces nouveaux hôpitaux, les aides-soignantes et les infirmières naviguent désormais d'une chambre à l'autre, relate Fabiani. Il n'est plus question de sordides salles communes pour les patients. Des pièces à un ou deux lits, avec le téléphone et bientôt la télévision, les remplacent. Des cabinets de toilettes isolés succèdent au lavabo pour cinq, dix ou vingt personnes. » C'est ainsi tardivement que l'hôpital fera sa révolution.

Les chiffres en attestent d'ailleurs. De 150 000 agents hospitaliers en 1954, on passe à 300 000 au cours des années 1970. Mieux, 180 000 lits sont créés entre 1960 et 1975. Pour faire fonctionner de telles structures, il faut bien sûr embaucher massivement du personnel. Puisque la Sécurité Sociale est alors largement excédentaire, on n'hésite pas à dépenser, à moderniser et à créer un mastodonte aux proportions encore jamais vues au cours de l'histoire de France. Le miracle hospitalier français fonctionnera longtemps et continue d'ailleurs de remporter d'étonnantes victoires. Mais au tournant des années 1980, la crise produit ses effets et les budgets fondent. De crises en contestations sociales, l'hôpital entre alors dans une époque de remise en cause profonde. Aussi souhaitable soit-il, son modèle est-il toujours supportable pour la collectivité ? L'avenir le dira.

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[1] https://www.techniques-hospitalieres.fr/blog/la-grande-histoire-de-l-hopital-episode-1-n2377

[2] Une histoire de l'hôpital en France : charité, enfermement et soins.

https://academiesciencesmoralesetpolitiques.fr/wp-content/uploads/2021/01/Com-Fabiani.pdf

[3] https://www.techniques-hospitalieres.fr/blog/la-grande-histoire-de-l-hopital-episode-2-n2391

[4] Voir, à ce titre Jean Vitaux, Histoire de la peste, PUF, 2010.


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