Un vaccin antigrippal au cœur d'une polémique entre Sanofi et le ministère de la Santé

Mardi, les autorités sanitaires françaises ont annoncé l'arrêt de la commercialisation d'un vaccin antigrippal de Sanofi. Son prix, plus élevé que les vaccins classiques, n'était pas justifié d'après le ministère de la Santé. Faux, selon le géant pharmaceutique qui vantait une efficacité plus forte de son médicament.
En février dernier, Sanofi a annoncé bénéfice net de 5,436 milliards d'euros sur l'exercice 2023, en recul de plus d'un tiers par rapport à 2022.
En février dernier, Sanofi a annoncé bénéfice net de 5,436 milliards d'euros sur l'exercice 2023, en recul de plus d'un tiers par rapport à 2022. (Crédits : GONZALO FUENTES)

Polémique entre le ministère de la Santé et le géant français de la pharmacie Sanofi. Mardi, les autorités sanitaires françaises ont annoncé l'arrêt de la commercialisation d'un de ses vaccins antigrippaux. Une décision intervenue après que Sanofi ait dénoncé la commercialisation par les autorités sanitaires de son médicament à un prix trop bas.

« Nous souhaitons vous informer du retrait du marché du vaccin Efluelda commercialisé par le laboratoire Sanofi dans les prochaines semaines », a ainsi annoncé la Direction générale de la Santé, qui dépend du ministère, dans un message aux pharmaciens.

Baptisé « Eflueleda », ce vaccin est réservé aux plus de 65 ans et a été spécifiquement élaboré pour protéger les personnes les plus à risque de complications. Le médicament est quatre fois plus dosé que son homologue « VaxigripTetra », un autre vaccin antigrippal de Sanofi, plus classique.

Sanofi en désaccord

Constatant un prix trop bas, le groupe pharmaceutique a donc justifié son choix d'arrêter la commercialisation d'Efluelda, en renvoyant la responsabilité aux autorités sanitaires. « Les autorités ont décidé d'établir son nouveau prix à un niveau inférieur aux coûts de production et de distribution de ce vaccin », a justifié Sanofi dans un communiqué.

Le groupe, qui met aussi en avant le fait d'avoir investi 50 millions d'euros pour maintenir en France une partie de la production du vaccin, « regrette cette décision qui rend impossible la mise à disposition de ce vaccin ».

Doute sur l'efficacité supérieure du vaccin

Cet affrontement s'inscrit dans un contexte de débats sur les bénéfices réels d'« Efluelda » sur la santé des patients, par rapport aux vaccins antigrippaux classiques. Si une série d'études ont établi la plus grande efficacité de ce vaccin chez les personnes à risque, ce serait dans une ampleur relativement limitée.

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« Nous avons plus de 10 ans d'études dont de nombreuses études cliniques démontrant la supériorité d'Efluelda vs (ndlr : par rapport à) [des] vaccins à dose standard contre la grippe, les hospitalisations attribuables à la grippe, et ses complications cardiorespiratoires », s'est justifié Sanofi auprès de l'AFP.

N'étant pas convaincues, les autorités sanitaires françaises refusent donc, contrairement à des pays comme les États-Unis, de recommander ce vaccin plus qu'un autre pour les plus de 65 ans. Ce qui justifie, à leur sens, de ne pas le payer plus cher.

Le sujet des prix « trop bas » des médicaments sur la table

Ce débat s'inscrit aussi dans un contexte plus large où l'industrie pharmaceutique estime régulièrement que la France fixe des prix trop bas aux médicaments. Sur ce plan, Sanofi a obtenu mardi l'appui d'un important syndicat de pharmaciens, la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF).

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« Face caméra, le gouvernement assure tout mettre en œuvre pour garantir l'accès aux produits de santé ; dans les faits, il s'entête dans une politique tarifaire toujours plus restrictive et dans un paradigme de santé à bas coûts », a accusé le syndicat dans un communiqué. Sollicité par l'AFP, le ministère de la Santé n'a pas réagi.

Cette décision ne devrait, en tout état de cause, pas affecter la quantité de vaccins antigrippaux disponibles, puisque Sanofi promet de proposer son vaccin classique en remplacement aux pharmacies qui avaient précommandé le « Efluelda ».

Mauvaise passe pour Sanofi

Le géant français du médicament est actuellement dans une séquence économique délicate, avec une rentabilité en baisse. En février dernier, Sanofi a annoncé un bénéfice net de 5,436 milliards d'euros sur l'exercice 2023, en recul de plus d'un tiers par rapport à 2022. Son chiffre d'affaires a stagné à 43,07 milliards d'euros (+0,2% en données publiées). Quant à son bénéfice net des activités, indicateur privilégié par le groupe qui exclut les effets exceptionnels, celui-ci a fléchi en 2023 de 1,8% à 10,15 milliards d'euros.

Ces résultats en baisse ont obligé Sanofi à revoir sa stratégie. La société va désormais concentrer ses efforts de recherche dans l'immunologie, qui traite des maladies du système immunitaire, plutôt que sur l'oncologie, où les succès sont jugés insuffisants.

Une décision qui aura pour conséquence la suppression de 1.200 postes dans son secteur R&D, dont 330 en France, principalement sur le site de Vitry-sur-Seine (Val-de-Marne) où 298 suppressions sont envisagées, et plus marginalement à Montpellier et Gentilly (Val-de-Marne).

(Avec AFP)

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Commentaires 4
à écrit le 24/04/2024 à 10:44
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Médecins, pharmaciens, labos ont tendance à oublier que le payeur c'est la Sécurité sociale et le Mutuelles. Donc nous et que notre porte monnaie n'est pas extensible à l'infini.

à écrit le 24/04/2024 à 9:45
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on va dire que les autorites punissent sanofi de fermer certains sites de recherche en oncologie; et qu'au passage c'est un signal pour expliquer que la politique de baisse des prix du medicament se porsuit ( je ne connais pas l'efficacite de ce vacc...

le 24/04/2024 à 12:51
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" y a pas encore de médicament pour la soigner" hélas, personne n'en cherche, aucun risque de trouver. :-) S'il y a 4 doses à la fois il ne peut qu'être plus cher. Il peut être très bon mais considéré qu'anti-grippal c'est du courant classique trad...

à écrit le 24/04/2024 à 8:58
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"Le groupe, qui met aussi en avant le fait d'avoir investi 50 millions d'euros pour maintenir en France une partie de la production du vaccin" Et qui oublie le nombre de fois où l'argent public lui a sauvé les fesses...

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