
L'opération est inhabituelle pour la Caisse des dépôts. Par l'intermédiaire de la Banque des territoires, le groupe vient d'entrer à hauteur de 34% au capital du développeur caennais d'énergies renouvelables JP Energie Environnement, détenu depuis sa création en 2004 par la famille Nass.
La transaction a été conclue au terme d'une petite année de discussion. « C'est un deal amical, aucune autre banque n'a été sollicitée ce qui a facilité les négociations », précise Xavier Nass, directeur général, et fils du fondateur de l'entreprise. Cette prise de participation d'un montant de 100 millions d'euros s'est « imposée comme une évidence », ajoute l'intéressé. Elle couronne, en réalité, une coopération de longue date entre les deux entités.
Vers un changement d'échelle
Depuis 2013, le groupe financier public contribue systématiquement au financement de tous les projets du Normand au nom de « valeurs communes ». Il est co-actionnaire (à hauteur de 49%) d'une trentaine de parcs éoliens et centrales solaires exploités par ses soins. Avec ce nouvel acte de foi, il lui donne les moyens « de changer d'échelle », pour reprendre la formule de Cédric Desmedt, directeur adjoint de la transition écologique et énergétique de la Banque des territoires. A première vue, l'établissement ne fait pas le plus mauvais des choix.
JP Energie Environnement (140 salariés), qui avec 70 millions d'euros de chiffre d'affaires peut prétendre au statut d'ETI, connaît en effet une croissance impressionnante de 25% par an depuis quelques années. Sa botte secrète ? Un modèle très intégré - de la recherche des sites jusqu'à l'exploitation et à la maintenance -, qui lui permet de se montrer agile et de rassurer les acteurs publics et privés qu'elle prospecte.
Aujourd'hui à la tête d'un parc de 14 parcs éoliens et de 60 centrales solaires de grande dimension, elle désire multiplier par plus de 4,5 sa capacité de production dans les sept prochaines années « pour atteindre 2 GW de puissance installée en 2030 et fournir 1,6 million d'habitants contre 300.000 aujourd'hui ».
Agrivoltaïsme et autoconsommation
Pour autant, l'entreprise sait qu'il lui faudra composer dans l'avenir avec la pénurie de grands espaces à l'écart des habitations à l'image des vastes plaines de la Beauce où ses premières éoliennes sont sorties de terre. « Ces zones sont saturées, on va vers des secteurs plus contraints », diagnostique Xavier Nass. Pour contourner l'obstacle, il table sur une montée en puissance des projets en financement participatif territorial, moins sujets à contentieux. Il mise aussi sur le développement futur de l'agrivoltaïsme, en particulier dans l'élevage « sur des terrains de faible qualité agronomique ». « Nous restons dans l'attente d'un décret de cadrage, car toutes les préfectures n'ont pas la même approche », rappelle-t-il.
Toujours dans le domaine du solaire, la société a créé une filiale pour la construction de centrales en autoconsommation, dérogeant pour la première fois à son positionnement historique de producteur d'énergies. Objectif de cette nouvelle entité, évangéliser les industriels qui disposent de surfaces importantes en toiture (à partir de 500 m3), au sol (à partir de 1000 m2) ou en ombrières de parkings (30 places). Deux premières installations sont en construction : l'une sur le toit d'une brasserie, l'autre au sol chez un industriel du textile.
Quant aux promesses de la loi d'orientation sur les renouvelables, le dirigeant normand les regarde avec une certaine circonspection. « C'est un signal extrêmement important, mais elle a été l'objet de beaucoup de compromis et il ne faut pas s'attendre à une révolution, souligne-t-il. Les projets ne sortiront jamais de terre en deux ou trois ans. Peut-être gagnera-t-on quelques mois d'instruction ». Pour rappel, en France, il faut, en moyenne, 7 ans pour raccorder au réseau une centrale solaire ou un parc éolien terrestre.
Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !