
Il fallait un un personnage singulier pour concevoir cet étrange esquif qui semble tout droit sorti d'un épisode de James Bond. Philippe Raynaud, fondateur de la startup caennaise Millikan Boats (du nom du physicien américain nobélisé en 1923), l'a trouvé en la personne de Vincent Lebailly.
Architecte naval installé à Bernières-sur-Mer dans le Calvados, l'homme s'est fait connaître en dessinant de petites unités amphibies ou des îles flottantes. Cette fois, c'est à un catamaran électro-solaire qu'il s'est attaqué. « Le cahier des charges était très exigeant, raconte l'intéressé. Dans le nautisme, le solaire est généralement disgracieux et nuit à l'ergonomie des bateaux. Ici, il n'est pas subi mais pensé comme une partie intégrante de l'ensemble ».
« Des sensations proches de la voile »
Long de 9,50 mètres et large de 3,50 mètres pour six couchages, le navire en question a pour particularité d'être entièrement autonome pour peu qu'il soit utilisé dans les règles de l'art. Autrement dit, nul besoin d'une recharge au ponton. Pour parvenir à ce résultat, l'architecte normand l'a pourvu non seulement d'un toit solaire mais aussi d'une paire « d'ailes » mobiles recouvertes de panneaux photovoltaïques à doubles faces qui viennent alimenter deux batteries reliées à un moteur électrique. Objectif : gagner en performance.
« Les panneaux latéraux sont conçus pour se déplier horizontalement dès la sortie du port de façon à profiter du rayonnement venu d'en haut mais aussi de celui venu d'en bas grâce au réfléchissement du soleil sur l'eau. Repliés, ils assurent une intimité dans le cockpit », détaille-t-il.
Millikan Boats, qui met en avant le caractère écologique de l'embarcation, revendique une autonomie d'une journée à une vitesse maximale de 6 nœuds ou de 2 ou 3 heures à 12 nœuds. « C'est un weekender (ndlr, bateau de plaisance) conçu pour le camping côtier en famille ou entre amis qui offre des sensations proches de la voile », précise Adrien Samoy, chef de projet et seul salarié de la société à ce stade.
Cap sur les loueurs de bateaux
En cours d'assemblage au chantier naval La Passerelle de Saint-Malo, un premier démonstrateur doit être mis à l'eau en octobre sous le nom de M9. La commercialisation proprement dite sera lancée lors des salons nautiques en début de l'année prochaine au prix de 250.000 euros. « Un tarif comparable à celui des navires thermiques de même gabarit », nous assure-t-on.
Dans la ligne de mire de la startup, les loueurs de bateaux - de préférence dans les régions ensoleillées de la Méditerranée ou des Caraïbes - à qui sont promis des marges confortables. « Contrairement à un modèle thermique, un bateau électro-solaire ne nécessite quasiment aucun entretien », argumente Adrien Samoy à leur intention.
Pour son concepteur, l'embarcation pourrait aussi séduire les adeptes de la voile, allergiques à la motorisation diesel. « Il aurait été possible de l'équiper de vérins électriques pour manœuvrer les panneaux latéraux mais je leur ai préféré une manipulation manuelle avec des cordages et des taquets comme sur un voilier », indique Vincent Lebailly à toutes fins utiles. Rendez-vous dans quelques mois pour vérifier si l'argument fait mouche.
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