En 2024, le port du Havre casse les prix de ses redevances pour attirer les méga porte-conteneurs

Pour attirer les méga porte-conteneurs sur ses terminaux, le port du Havre rabote ses tarifs. Les armateurs se voient consentir un gros rabais sur les taxes dues à chaque escale.
Haropa assure se placer au même niveau de taxes que son rival belge d'Anvers.
Haropa assure se placer au même niveau de taxes que son rival belge d'Anvers. (Crédits : DR)

Casser les prix pour ferrer des clients, la méthode est vieille comme le monde. Elle vaut aussi dans le domaine portuaire. Et à ce jeu, Haropa, maison-mère des trois grands ports de la Seine, a décidé de manier le rabot. Depuis le 1er janvier, le port du Havre renonce à 20% du montant des redevances (appelées droits de port) que lui doivent les porte-conteneurs en escale au titre de l'entretien des infrastructures : les réseaux fluviaux, routiers et ferroviaires notamment. La ristourne en question ne s'applique qu'aux méga-navires capables d'embarquer plus de 20.000 conteneurs dans leurs flancs mais elle n'est pas anecdotique.

Qu'on en juge. En 2023, leurs propriétaires devaient honorer, pour chaque escale au Havre, une facture comprise entre 50.000 et 70.000 euros au prorata du nombre de « boîtes » transportées. Des tarifs notoirement plus élevés que ceux pratiqués par Anvers, grand rival du port normand. Désormais, les tarifs des deux ports sont alignés, assure Kris Danaradjou, numéro 2 d'Haropa. « Grâce à cette baisse, nous nous plaçons au même niveau de taxes que nos voisins belges ». Ce faisant, l'établissement public envoie un « signal prix », sinon spectaculaire, au moins positif aux grandes compagnies maritimes. Objectif : les convaincre de router vers l'estuaire de la Seine davantage de ces immenses navires « mères » que se dispute la poignée de ports européens taillés pour les accueillir.

Les armateurs apprécient

Difficile de dire aujourd'hui si ce geste commercial influera sur les arbitrages des armateurs (et de leurs clients), tant le trafic conteneur est soumis à une multitude d'aléas comme le montrent les tensions en mer rouge. Pour autant, la décision est accueillie favorablement par les professionnels. « J'y vois la marque d'un intérêt bien compris entre acteurs publics et acteurs privés », salue David El-Bez, directeur des investissements de Til-MSC, filiale de manutention de la première compagnie mondiale du transport de conteneurs. Laquelle, rappelons-le, injecte pas loin d'un milliard d'euros dans ses terminaux du port du Havre. Précisément pour pouvoir recevoir les géants des mers dans des conditions optimales.

La réaction est plus tempérée au sein Groupement Havrais des Armateurs et Agents Maritimes pour qui ce rabais a manifestement un goût de trop peu. « C'est une excellente chose pour les compagnies même si on peut trouver dommage qu'elle n'arrive que maintenant et qu'elle ne vaille que pour une certaine catégorie de bateaux », commente son président, Bruno Gellerat.

Quand l'union fait la force

Il n'en reste pas moins que cette nouvelle politique tarifaire marque un virage important. Pour Stéphane Raison, patron d'Haropa, elle illustre le  « changement de modèle économique » qui a commandé le rapprochement des trois ports de la Seine. Jamais en effet par le passé, le port du Havre n'aurait pu consentir isolément un tel effort tant sa santé financière dépendait des redevances portuaires. La fusion a changé la donne. Globalisées à l'échelle de l'ensemble portuaire normando-francilien, les escales des navires ne constituent plus le gros des recettes.

« Le ratio s'est inversé. Les redevances domaniales, plus stables et moins soumises aux aléas que les droits de port, représentent 60% des ressources aujourd'hui », rappelle Christophe Berthelin, grand argentier d'Haropa. Possiblement appelées à croître sous le double effet de la réindustrialisation et de la chasse au CO2, ces recettes foncières confèrent davantage de marges de manœuvre à l'établissement public. Lequel se démène pour faire fructifier cette nouvelle rente sur le modèle des ports d'Europe du Nord. D'où son empressement à aménager des terrains clés en main pour l'accueil de nouvelles entreprises. CQFD.

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Commentaires 8
à écrit le 27/01/2024 à 18:47
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Bonjour, n'importe comment pour faire venir de nouveau client , ils faut avoir des arguments : Taxe relativement faibles... Service efficace et rapide... Avantages d'accès et de transférer... Maintenant, le rôle de la direction et de voir organis...

à écrit le 26/01/2024 à 14:22
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Tu m'étonnes que la dette explose ! pour faire des cadeaux aux amis, rien de vaut ce type de fonctionnement qui en dit long sur la macronnie et son maire, de ce que finalement nous finançons indirectement, les baisses d'imposition qu'ils font sans au...

le 26/01/2024 à 14:53
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A Gonzague: Pas si simple. En baissant les taxes, on augmente mécaniquement le trafic. Donc une compensation partielle, et plus d'emploi aussi, donc plus de cotisations qui financent notre système sociale. Bien vu.

à écrit le 26/01/2024 à 13:53
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Qui veut être pris en otage par la cgt?

à écrit le 26/01/2024 à 10:09
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Il reste encore trois choses à faire pour que Le Havre soit un compétiteur sérieux face à Anvers, Rotterdam, et Hambourg : a) se relier à l'hinterland du Nord de l'Europe avec le canal Seine-Nord, b) avoir des dockers un peu moins cabochards, c) abol...

le 27/01/2024 à 18:49
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Vous oubliez: lutter contre le crime organisé en virant les dockers de mêche avec les trafiquants de drogue, et en condamnant ces derniers à de très lourdes peines de prison.

à écrit le 26/01/2024 à 8:22
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Ah quand on veut baisser les taxes, on peut !

à écrit le 26/01/2024 à 7:59
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C'est idiot puisque c'est l'inverse qu'il faut faire générer un transport régional par bateaux à voiles pour ensuite le diffuser dans le monde entier. Nos dirigeants sont nuls. Puis surtout copain avec les propriétaires des portes containers ! LOL ! ...

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