La Covid-19 accélère la marche vers les nouveaux services de mobilités

PRISE DIRECTE. Face aux nouveaux usages de la mobilité induits par l'épidémie, le « Mobility as a Service », un concept de bouquet de solutions qui agrège en une seule application l'ensemble des moyens de transport pour aller du point A au point B, prend toute sa pertinence. C'est ce qui ressort du débat auquel ont participé, lors du Forum Zéro Carbone organisé par La Tribune, Eric Alix, PDG de RATP Smart Systems, Pierre Aubouin, directeur de département infrastructures et mobilité au sein de la Banque des Territoires, Maureen Le Baud, directrice de l'investissement de Via ID, et Bruno Marzloff, président de la Fabrique des Mobilités.

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Les cartes ont été rebattues en 2020 en ce qui concerne les besoins de mobilité. Crise sanitaire et généralisation du télétravail riment désormais avec plus de proximité et moins de mobilité. Une rupture dans les usages qui n'est pas sans impacter le MaaS (acronyme pour Mobility as a Service), ces offres numériques qui permettent aux passagers de se déplacer d'un point A à un point B en jonglant avec l'ensemble des modes transport - métro, bus, tramway, vélo, taxi, VTC, covoiturage, autopartage, sans oublier les trottinettes - tout en intégrant le paiement. Elles commencent à émerger, en France comme dans le monde, et intéressent de plus en plus les acteurs de la mobilité.

« Les déplacements sont désormais moins pendulaires (domicile-travail) et moins programmés ou répétitifs que par le passé. Plus 'tactiques' au quotidien, ils vont nécessiter des choix modaux plus versatiles et évolutifs de la part des usagers », analyse Pierre Aubouin, directeur de département infrastructures et mobilité au sein de la Banque des Territoires. « Les usagers vont avoir besoin d'un bouquet de solutions, le plus agile et informatif possible en temps réel sur les moyens de mobilité durables à leur disposition. La crise sanitaire rend ce besoin d'émergence de solutions de type MaaS encore plus fort qu'avant ».

« Le MaaS a de beaux jours devant lui », estime également Maureen Le Baud, directrice de l'investissement de Via ID, un accélérateur de startups dévolues aux nouvelles mobilités. Plus de vélo et de marche, plus d'achat de véhicules électriques, moins de recours aux transports en commun... « Cette année renforce le besoin d'aboutir à un MaaS intelligent et adapté à nos territoires, étant donné le changement radical dans les usages », a-t-elle souligné. Difficile, toutefois, de prédire à quel horizon... « Il faudra sans doute encore 24 mois pour que cela se fasse à grande échelle, même s'il y a déjà des initiatives très intéressantes en France et en Europe », souligne-t-elle.

La RATP à l'avant-garde avec Mappy


Parmi les acteurs de la mobilité, la RATP entend bien surfer sur la tendance et devenir leader du MaaS en France. « Notre ambition est de proposer un 'compagnon' des usagers dans leur mobilité », a indiqué Eric Alix, PDG de RATP Smart Systems, filiale de la RATP pour l'information des voyageurs et la billettique qui a récemment fait l'acquisition du spécialiste du calcul d'itinéraire Mappy. Elle ambitionne de proposer des applications MaaS clé en main aux collectivités et aux régions en marque blanche. Elle a en outre mené cette année, avec Ile-de-France Mobilités, une expérimentation du MaaS sous forme d'une application baptisée MaaX (Mobility as an Experience) auprès de 2000 utilisateurs, après avoir déjà expérimenté le MaaS, à Annemasse, par exemple.

Autre élément qui change la donne pour le MaaS, la loi d'orientation des mobilités. « Trois briques de la loi LOM viennent renforcer le MaaS à venir », détaille Maureen Le Baud : le forfait mobilité durable, qui permet aux entreprises de financer tout un mix de mobilités propres, l'open data transports - toutes les offres de mobilité vont en effet devoir ouvrir leurs données - ainsi que l'obligation pour les régions de fournir une application d'itinéraires multimodaux en temps réel à fin 2021.

Danger d'un « Gafam » de la mobilité


Reste le danger de se faire doubler par un « Gafam » de la mobilité... Google, Apple, mais aussi Tesla ou Uber sont en embuscade. « La LOM permet l'irruption d'acteurs d'initiative privée » dans ce type de solutions, rappelle ainsi Pierre Aubouin. Le risque est de laisser des acteurs venus d'autres continents s'imposer avec la puissance algorithmique de leurs plateformes numériques ainsi que leurs propres règles. « C'est la raison pour laquelle nous accompagnons les collectivités dans la réflexion autour de modèles hybrides public-privé qui permettent de trouver des solutions MaaS de façon plus adaptée et soucieuse de l'intérêt général », explique-t-il.

« Nous nous dirigeons de toute façon vers une mobilité servicielle dont le socle sera la circulation de la data. L'enjeu, c'est qui va le faire », relève pour sa part Bruno Marzloff, président de l'accélérateur la Fabrique des Mobilités. « A la Fabrique des Mobilités, nous avons pris un certain nombre d'initiatives en la matière dont un 'compte mobilité' qui vise à standardiser au plan national voire international l'ensemble des éléments et échapper à l'emprise des grands acteurs du numérique sur un modèle open source et commun », explique-t-il. Autrement dit, proposer une alternative, en s'inscrivant dans l'innovation collaborative. La révolution du MaaS est en marche, ouvrant tout un champ des possibles... Reste à le construire et le concrétiser.

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