Recapitalisées, French Bee et Air Caraïbes visent l'équilibre en 2022

En prenant deux A350-1000 d'un coup, certes après un report de quelques mois, Air Caraïbes et French Bee continuent de croire à la reprise en 2022. Les deux compagnies du groupe Dubreuil Aéro ont pourtant essuyé de puissants vents contraires en 2021 et dû compter sur le soutien financier de leur actionnaire pour finir l'année dans une situation plus confortable.
Léo Barnier
Les deux A350-1000 d'Air Caraïbes et French Bee côte-à-côte.
Les deux A350-1000 d'Air Caraïbes et French Bee côte-à-côte. (Crédits : Airbus)

« Nous sommes très heureux malgré des circonstances délicates ». Par ces mots, Marc Rochet résume son état d'esprit actuel : le directeur général d'Air Caraïbes et président de French Bee se réjouit de la livraison par Airbus de deux A350 neufs, un par compagnie, mais déplore une année 2021 décevante. Marquée par les « stop and go », celle-ci sera encore déficitaire quasiment à hauteur de 2020, où la perte d'exploitation avait dépassé les 85 millions d'euros. Pour surmonter ce nouvel écueil, les deux compagnies ont pu compter sur leur actionnaire, le groupe Dubreuil Aéro, avec une recapitalisation à hauteur de 15 millions d'euros chacune.

En l'espace de trois jours, les deux compagnies ont donc reçu leur 10e et 11e A350, deux A350-1000 qui plus est. La flotte d'Air Caraïbes en compte désormais trois A350-900 et autant de -1000, en attendant un nouvel exemplaire en avril prochain. Elle dispose aussi de cinq A330. Pour French Bee, c'est le premier A350-1000. Il vient rejoindre les quatre A350-900 déjà en flotte.

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Préparer le redémarrage en 2022

En dépit d'un report de quelques mois - les deux avions étant initialement prévus cet été - Air Caraïbes et French Bee maintiennent donc leur plan de développement de flotte. Pour Marc Rochet, il s'agit d'être prêt pour la reprise du trafic avec une flotte en ordre de bataille : « Nous sommes des gens optimistes et combatifs pour 2022, après avoir perdu beaucoup d'argent en 2020 et 2021. Nous sommes assez confiants sur le redémarrage de l'activité. Dès que les conditions de voyage s'assouplissent, nos clientèles reviennent. »

Il estime d'ailleurs être bien positionné pour cette reprise avec une offre centrée sur les classes économie et premium économie.

Le dirigeant annonce même qu'il vise un retour à l'équilibre pour le groupe Dubreuil Aéro dès l'an prochain : « Nous voulons ramener le groupe aérien dans le vert, même si ce ne sera pas une année exceptionnelle. Janvier et février seront mous et le coût du pétrole est élevé, mais nous sommes confiants. » Marc Rochet explique d'ailleurs que les accords de performance collective (APC), qui ont abouti à une baisse des rémunérations de 10%, ne seront pas reconduits après leur terme en 2022 (fin juin pour French et Air Caraïbes Atlantique, décembre pour Air Caraïbes aux Antilles). Il souhaite ainsi recueillir l'adhésion de tous les personnels pour préparer au mieux la reprise.

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2020 le choc, 2021 la déception

French Bee et Air Caraïbes ont pourtant été durement touchées depuis deux ans. Après être entrées dans la crise dans une situation financière confortable, elles sont désormais affaiblies. Elles ont subi l'arrêt des vols avec les confinements successifs et les restrictions de voyages. Mais plus que l'effondrement de 2020, « l'année du choc » avec des mesures d'adaptation pour faire face à l'urgence, ce sont les « stop and go » de 2021 qui ont été les plus durs à gérer comme l'explique Marc Rochet :

« Nous avons attaqué 2021 confiants en nous disant que cela ne pouvait plus recommencer, mais nous avons vécu un troisième confinement, puis la crise sanitaire de façon extrêmement violente dans les Antilles cet été, le maintien du travel ban aux Etats-Unis jusqu'au 8 novembre... »

Plus récemment, la 5e vague et le variant Omicron ont généré un fort ralentissement des réservations. Les ventes nouvelles se sont tassées à hauteur de 50% par rapport à la dynamique connue cet automne. Les annulations ont en revanche été assez limitées grâce aux mesures de flexibilité des billets, maintenues jusque mi-2022.

A la crise sanitaire est aussi venue se superposer la crise sociale dans les Antilles. Depuis le début de la crise en octobre, Air Caraïbes a subi 10% d'annulation de billets sur la fin de l'année, qui ont entraîné une réduction du programme. Malgré un apaisement notable depuis plusieurs jours, ce devrait être encore le cas sur les deux premiers mois de l'année. Surtout, il faut désormais que les réservations reprennent après avoir été largement impactées dès les premiers jours de la crise en Guadeloupe.

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L'actionnaire à la rescousse

Les deux augmentations de capital réalisées il y a une semaine par le groupe Dubreuil Aéro offrent donc un véritable bol d'air à Air Caraïbes et French Bee, d'autant qu'il s'agit d'argent frais comme le précise Marc Rochet. Les deux compagnies ont reçu 15 millions d'euros chacune de la part de leur actionnaire, ce qui leur permet de conserver des fonds propres positifs au moment de la clôture des comptes annuels.

En raison de cette proximité avec la fin de l'année, ces augmentations de capital n'ont pas été ouvertes aux salariés actionnaires. Ce sera le cas en 2022, mais dans des montants plus modestes, précise Marc Rochet.

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Une approche ratée vers Air Austral

Le directeur général d'Air Caraïbes et président de French Bee est également revenu sur un éventuel rapprochement avec Air Austral pour la desserte de La Réunion. Il s'est dit partisan d'une approche rationnelle, rappelant que la compagnie réunionnaise était en grande difficulté financière. Il a tout de même admis que Jean-Paul Dubreuil, président de Dubreuil Aéro, avait mené une approche à Bercy pour étudier les possibilités de coopérations commerciales entre French Bee et Air Austral.

Une approche infructueuse puisque ni l'administration, ni la direction d'Air Austral n'ont souhaité entamer des discussions. Une situation que le dirigeant regrette :

« French Bee et Air Austral sont complémentaires. Nous sommes dans le fort volume tandis qu'Air Austral est positionné un peu plus haut. Ça aurait eu du sens. » Sans doute plus qu'avec Corsair, selon lui.

C'est pourtant bien cette dernière qui négocie actuellement la création d'une joint-venture, voire un rapprochement capitalistique avec Air Austral. Quoi qu'il en soit, Marc Rochet ne ferme pas encore la porte à une coopération avec la compagnie réunionnaise, à condition de s'assoir autour de la table pour une véritable discussion.

Léo Barnier

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