Campagne de Brousse : et l'impensable s'est produit en Ukraine

CHRONIQUE. Ingénieur, éditeur, observateur attentif des sociétés, du monde et des gens, Jean Brousse, corrézien, bretteur de mots, a publié "Deux mois ferme", collection de ses chroniques quotidiennes du confinement. En cette année présidentielle, il tient dans La Tribune une revue de la crise politique et sanitaire, intitulée comme il se doit Campagne de... Brousse.
(Crédits : Jean Brousse LT)

« L'Ukraine sous les bombes », « La guerre en Europe », les titres de la presse unanime signent sidération, effroi et colère en ce vendredi triste et noir.  « Et l'impensable s'est produit », pour l'Est Eclair. Impensable ? Pas si sûr. Dans ses messages télévisés à la Russie, programmés les 22 et 24 février, Vladimir Poutine, le joueur de Go et d'échecs, autocrate assumé au faciès de Nosferatu hypercortisoné, annonçait avec malice et gourmandise les étapes d'un plan vraisemblablement nourri depuis belle lurette. Sa leçon magistrale d'histoire préfabriquée, mardi, le palindromique 22 02 2022 - était-ce un signe ? -, exprimait sa froide nostalgie de la grande Russie, ou de la regrettée URSS, celles de Pierre le Grand ou de Vladimir (Tiens, tiens !) Ilitch Lénine, et le rêve d'un empire retrouvé. L'orgueilleux dictateur, grisé par de trop longues années consacrées à asseoir son pouvoir absolu, entend bien entrer dans l'histoire, au risque de l'anéantir et d'étouffer son peuple. La longévité des potentats, quelque temps illusoire, ne vaut rien au bonheur des nations. Il était temps pour lui : soixante-dix ans, c'est encore bien jeune, mais on ne sait jamais.

Et de laisser bien désemparées les démocraties occidentales : le ballet diplomatique des missions de bons offices était vain, mais nécessaire. Entre mensonges, entêtement, revanche et faux semblants, tout discours de paix rationnel était inaudible au maître du Kremlin. En leur, en septembre 1938, Neville Chamberlain et Edouard Daladier n'avaient pas fait mieux que leurs homologues contemporains face à une autre paranoïa, assez comparable. La raison politique envolée, les ministres et les présidents ne valent finalement pas un bon psychanalyste, selon Vincent Haigeux. Mais il eût fallu s'y prendre beaucoup plus tôt, pour investir les arcanes du sur-moi de l'empereur. Les réactions se succèdent, la condamnation est universelle - sauf pour le vieux copain XI Jinping, dont il a évidemment épargné les olympiades pharaoniques, qui garde un œil rivé sur Kiev, et l'autre sur Taiwan, c'est louche -. Les conseils de défense, les G7, les conseils européens, les conseils de l'Otan, le conseil de sécurité de l'ONU - que de conseils ! - cherchent une réponse. Ça fait beaucoup de monde autour de la table de conférence. L'Europe désunie par des intérêts objectivement divergents traine trop. Les Etats Unis sont certes fermes, et défendront « le moindre pouce de terrain de l'Otan », mais de beaucoup plus loin. Gaz, pétrole et blés, entre autres, sont en jeu et en enjeu. On ne fait pas d'omelette sans casser des œufs, s'il en reste, et même s'il pourrait en coûter aux européens, les affidés du néo-tsar, les « oligarques », qui le tiennent aussi par la barbichette, seraient sans doute affectés par des mesures qui contrarieraient sérieusement leurs modestes intérêts. Tout atermoiement devient complice et malvenu. Avec Poutine, tout est possible.

Notre Président, réellement plus que jamais à la manœuvre, s'obstine à chercher l'improbable solution, en soit-il félicité. « Nous en sommes à un tournant dans l'histoire de notre pays. »Mais il lui faut aussi penser à l'incontournable salon de l'agriculture. Heureusement que le bon omicron décide enfin de se faire discret. Un clou chasse l'autre. Que faire du meeting prévu par les fans à Marseille ? De veillées d'armes en petites phrases, les troupes étaient prêtes. Aura-t-il seulement le temps de prononcer sa déclaration de candidature avant le 4 mars ? Pendant ce temps, les zélateurs fidèles de Vladimir Poutine, Jean-Luc Mélenchon, Z, qui ne croyait pas à l'attaque il y a trois jours, et Marine, recomptent leurs « parrains » et rétropédalent sec, en entamant un sacré virage sur l'aile. La campagne des Républicains glisse sur un aboiement. Où sont les autres ? Que feriez-vous, mesdames et messieurs, si aujourd'hui vous étiez Président de la République française ?

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Commentaires 4
à écrit le 07/03/2022 à 17:52
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Bien vu ...comme d'hab ....

à écrit le 04/03/2022 à 11:29
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" Les conseils de défense, les G7, les conseils européens, les conseils de l'Otan, le conseil de sécurité de l'ONU - que de conseils ! - cherchent une réponse" --- Une pléthore de technostructures qui coûtent un "pognon de dingue" sans aucune effic...

à écrit le 02/03/2022 à 8:46
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"Que feriez-vous, mesdames et messieurs, si aujourd'hui vous étiez Président de la République française ?" Je calculerais et traquerais le coût du capital partout où il se terre, cet élément qui est en train d'éradiquer l'humanité et son environnemen...

le 04/03/2022 à 11:38
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@Citoyen. La lutte des classes est un combat du siècle dernier. Au XXIéme siècles ce sont les technostructures 'politico-mediatico-humano-intello-woko-progressistes" inutiles qu'il faut traquer partout où elles opèrent en coutant un "pognon de ding...

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