Crypto-actifs : quelles nouvelles exigences pour obtenir le statut PSAN ?

OPINION. Les exigences pour l'obtention de l'enregistrement PSAN seront renforcées à partir du 1er juillet 2023. Ces conditions supplémentaires sont issues du socle commun de règles que les PSAN devront respecter quand MICA entrera en application fin 2024. Une montage insurmontable (et coûteuse) pour les créateurs d'entreprise français et européens du secteur des crypto-actifs ? Par Marc Lécorché, le CEO de Qwarks.
Marc Lécorché, CEO de Qwarks.
Marc Lécorché, CEO de Qwarks. (Crédits : dr)

L'effondrement de l'écosystème Terra luna en mai 2022 et les déboires autour de la faillite de FTX ont mis en évidence la nécessité d'une réglementation plus stricte du marché des crypto actifs. Une réglementation existe en France depuis plusieurs années. Elle s'articule en 2 volets : un enregistrement obligatoire pour les PSAN (prestataires de services sur actifs numériques) et un agrément PSAN optionnel. Mais les événements de 2022 ont fait naître des réflexions globales sur le marché des crypto et ont accéléré le durcissement de la réglementation.

Lire aussiCrypto : les régulateurs américains partent en guerre contre les entreprises du secteur

La question s'est notamment posée de rendre l'agrément PSAN obligatoire à partir du 1er octobre 2023. Face à cette perspective de durcissement et à l'agenda très serré, l'ADAN (Association pour le développement des actifs numériques) s'est mobilisée soutenant qu'il était quasiment impossible de réunir toutes les conditions pour décrocher cet agrément dans le temps imparti. Un travail de pédagogie a été initié pour expliquer pourquoi un agrément PSAN obligatoire n'était pas soutenable dans un calendrier accéléré. L'agrément a été annulé pour cette date si rapprochée.

Face à la perspective de l'entrée en vigueur fin 2024 de la réglementation européenne MICA (Markets in Crypto-Assets), les choses ont tout de même bougé. Un compromis a été trouvé : l'enregistrement PSAN sera renforcé au 1er juillet 2023 et l'agrément PSAN sera demandé fin 2024, en même temps que l'application de MICA. Ces nouvelles dispositions sont stipulées au sein du projet de loi DDADUE (Loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne) voté à l'Assemblée nationale le 28 février 2023.

Ce vote signe une nouvelle étape pour l'économie de la crypto et du Web3 en France. Après le 1er juillet 2023, les règles du jeu vont changer. Les acteurs du marché ont donc une période de temps limitée pour obtenir l'enregistrement PSAN avant que les exigences ne soient renforcées.

Enregistrement renforcé : une montagne à franchir pour les nouveaux PSAN ?

Les exigences pour l'obtention de l'enregistrement PSAN seront renforcées à partir du 1er juillet 2023. Ces conditions supplémentaires sont issues du socle commun de règles que les PSAN devront respecter quand MICA entrera en application fin 2024.

Qu'est-ce que cela signifie concrètement ? Qu'est-ce qui va changer en juillet ?

Qui dit renforcement de l'enregistrement PSAN, dit conditions additionnelles à respecter pour être autorisé à exercer au niveau français. Le projet de loi DDADUE voté par l'Assemblée nationale stipule que pour être autorisés par l'Autorité des marchés financiers à lancer leur activité, les nouveaux PSAN doivent :

  • Disposer d'un dispositif de sécurité et de contrôle interne adéquat
  • Disposer d'un système de gestion des conflits d'intérêts
  • Expliciter leurs responsabilités au sein d'une convention que leurs clients acceptent
  • Etablir une politique de conservation
  • Restituer les crypto-actifs de leurs clients sans délai en cas de problèmes imputables au conservateur
  • Ségréger leurs fonds et ceux de leurs clients
  • Ne pas utiliser les actifs de leurs clients sans autorisation préalable de leur part

Lire aussiCryptomonnaies : plombée par le scandale FTX, la plateforme Genesis dépose le bilan

Cybersécurité : une mise en conformité complexe

Parmi les nouvelles règles apparues, certaines encadrent l'information relative aux clients et à la ségrégation des actifs. Une excellente nouvelle qui répond à des enjeux stratégiques au vu de ce qui s'est passé avec FTX. Malheureusement, d'autres règles ont été ajoutées en dernière instance et sont aujourd'hui problématiques à respecter au vu du calendrier accéléré. Il s'agit notamment des règles relatives à la cybersécurité. A partir de juillet, il va en effet être demandé aux PSAN de disposer d'un système informatique résilient et solide. Si les enjeux autour de la cybersécurité sont évidents, ce volet de la réglementation est très contraignant pour les FinTech des cryptos car la mise en conformité est extrêmement coûteuse. A noter que ces coûts de mise en conformité dépendent de la taille de l'acteur et des services qu'il offre au sens de l'article L. 54-10-2 CMF.

Une clarification est également nécessaire : certaines dispositions n'ont pas été pensées spécifiquement pour les marchés de crypto actifs. Il est essentiel d'apporter des informations supplémentaires pour que les PSAN comprennent ce qu'ils doivent faire mais aussi pour que les régulateurs comprennent comment bien superviser le marché. La mise en place de ce dispositif implique de former les acteurs mais aussi les autorités.

Se faire accompagner par des acteurs de la finance traditionnelle

Dans ce contexte, certains acteurs de la FinTech se sont tournés vers des acteurs de la finance traditionnelle pour être accompagnés et bénéficier des meilleures pratiques. C'est le cas de la startup lyonnaise Qwarks qui est accompagnée par l'Atelier de l'Asset Management 2AM.

Pour Hugo Bordet, Regulatory affairs à l'ADAN, l'enregistrement renforcé va alourdir le délai de validation. Le traitement d'une demande d'enregistrement menant au dépôt d'un dossier complet peut en effet prendre un délai conséquent. Ainsi, il est probable qu'un dossier déposé après avril ne puisse être instruit par l'AMF sous le régime actuel de l'enregistrement. Les acteurs du marché font donc preuve de diligence pour obtenir leur enregistrement PSAN avant que les nouvelles exigences ne soient en place. Les acteurs qui avaient en projet de déposer l'enregistrement PSAN se retrouvent en effet contraints d'accélérer le dépôt pour passer avant l'enregistrement renforcé en juillet 2023.

Il y a actuellement 67 PSAN enregistrés en France. Pour être exact, 69 entreprises ont été enregistrées PSAN depuis la création du statut PSAN en 2020 mais 2 ont été radiées en septembre 2022.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 1
à écrit le 12/04/2023 à 9:14
Signaler
Ces efforts de labellisation sont voués à l'échec depuis le début. Le principe d'un mal-nommé "cryptoactif" est d'être un moyen de lever des fonds auprès de capital-risqueurs qui n'y connaissent pas grand chose, sans avoir de compte à leur rendre ...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.