Comment Ledger a réussi à lever 100 millions d’euros en pleine crise des cryptos

La startup française qui vend des appareils pour détenir soi-même des cryptoactifs est parvenue à convaincre des investisseurs d’entrer au capital de la société à hauteur de 100 millions d’euros. Une réussite étonnante dans un moment où les startups, et d’autant plus celles de l’écosystème crypto, cherchent plutôt à survivre et diminuer leurs charges qu’à investir et rechercher du capital.
Maxime Heuze
Ledger a vendu six millions de supports physiques pour cryptomonnaies depuis le lancement de leur premier appareil en 2016.
Ledger a vendu six millions de supports physiques pour cryptomonnaies depuis le lancement de leur premier appareil en 2016. (Crédits : Ledger)

Le Bitcoin n'est pas mort et l'intérêt des investisseurs pour les cryptomonnaies non plus : voilà ce que Ledger clame haut et fort en annonçant avoir clôturé une nouvelle levée de fonds. La startup française de vente de portefeuilles personnels pour cryptomonnaies a en effet convaincu une dizaine de fonds d'investissement (dont quelques nouveaux entrants) d'investir 100 millions d'euros dans son activité.

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Un événement qui n'est pas anodin dans un monde où le financement en capital s'est fortement contracté depuis le printemps 2022 avec la remontée des taux directeurs et la brutale perte de valeur des cryptomonnaies. D'après CB Insights, les montants levés en 2022 dans le monde ont chuté de 35%, à 415 milliards de dollars, avec un deuxième semestre cataclysmique marqué par une chute de 62% sur un an.

Ledger, chouchou des fonds d'investissement

Malgré ce contexte, la dizaine de fonds d'investissement présents au tour de table ont clairement réaffirmé leur confiance dans la petite société française.

« Nous pensons que Ledger jouera un rôle essentiel dans l'avenir du Web3, tant auprès du grand public que des entreprises », affirme Dušan Stojanović, associé fondateur de True Global Ventures qui a accepté de mettre des billes dans cette nouvelle levée de fonds.

Et si les financeurs ont répondu présents sans trembler, c'est avant tout parce que la société estime bien se porter.

« Nous avons une balance de cash confortable, une bonne croissance de notre chiffre d'affaires et un business model rentable par nature », affirme fièrement Pascal Gauthier, le Pdg de Ledger.

La société se vante notamment d'avoir atteint les 6 millions de supports physiques vendus à travers le monde depuis leurs débuts en 2017.

« Lever des fonds est plus compliqué car même si les investisseurs ont toujours de l'argent, ils délivrent aujourd'hui moins de tickets pour se concentrer sur les meilleures boîtes du moment », analyse Stanislas Barthelemi, consultant chez KPMG, spécialiste des cryptomonnaies.

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Une levée pour « être prêt quand l'écosystème crypto redémarrera »

Malgré sa bonne santé, la dernière levée de fonds de Ledger n'a pas pour objectif de développer un nouveau produit ou d'explorer un nouveau marché, mais bien de passer la période de disette actuelle sans réduire ses coûts.

« Cette levée de fonds va nous permettre d'avoir des équipes et un stock suffisants pour être prêt quand l'écosystème crypto redémarrera », confie Pascal Gauthier.

À l'opposé de l'entreprise basée à Vierzon, de nombreuses startup de la tech (comme Back Market) et de l'écosystème crypto (comme Coinbase) ont dû se résoudre au régime sec en diminuant leurs effectifs.

De la recherche et développement qui coûte cher

Si la société leader dans le secteur des portefeuilles personnels de cryptomonnaies fait appel à des financements privés, c'est avant tout parce qu'elle dépense beaucoup d'argent dans la recherche et développement. L'entreprise, qui emploie 800 salariés, consacre en effet une grande partie de son budget à développer de nouveaux supports physiques, de nouveaux logiciels mais aussi à améliorer ses services existants.

« On a 400 ingénieurs répartis dans trois laboratoires. Il y a le "donjon" composé d'une quinzaine de hackers qui ont pour objectif d'attaquer nos services pour trouver des failles, un laboratoire d'innovation avec presque 10 personnes, et un laboratoire dédiés aux supports et appareils avec une vingtaine de personnes », détaille Pascal Gauthier.

Et toute cette masse d'ingénieurs coûte cher. « Rien qu'en termes de coût humain, cette entreprise cherche des professionnels calés en cryptographie. Or, il y a peu de bons profils et beaucoup de demande, donc les employés coûtent cher », précise Stanislas Barthelemi.

Besoin de cash pour alimenter la chaîne de production

En dehors de l'important coût de la recherche, Ledger fait aussi face à un besoin d'investissement dans du matériel.

« On a sorti Ledger Stax fin 2022 et ce nouveau support a connu un très bon lancement. Il y a eu tellement de demandes qu'on a dû suspendre les précommandes et, maintenant, il faut réussir à mettre les appareils sur le marché », ajoute le Pdg de la startup.

Pour satisfaire les clients, Ledger a donc besoin de s'approvisionner en matériels, connectiques et autres écrans, ce qui va nécessiter beaucoup de cash.

Maxime Heuze

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