Comment PSA conforte les ambitions de la filière auto en Bretagne

L'annonce en juin de la construction à PSA-La Janais d'un nouveau SUV assure non seulement dix ans de visibilité industrielle à l'usine rennaise, mais, surtout, elle donne un coup d'accélérateur à une filière automobile bretonne en déclin ces dernières années. En misant sur l'innovation et le croisement des filières, le territoire veut contribuer à la création de l'usine automobile du futur. Avec l'appui de son pôle cyber.
Le « Fab Lab » Excelcar est né il y a un an sur le site de La Janais. Doté d'un budget de 5 millions d'euros, il mobilise quelque 40 personnes dont 50% issus de PSA.

En Bretagne, la filière automobile patine moins. Avec pour véhicule de tête, l'usine PSA-La Janais, cette industrie en déclin ces dernières années (- 30 % d'emplois entre 2007 et 2010) et fortement ralentie par l'ampleur du plan social du site de Rennes en 2012 (1.400 emplois sur 5.600) reprend de la vitesse. Mi-juin, c'est Carlos Tavares qui était à la manœuvre : en visite à Rennes, le Pdg du groupe PSA a confirmé l'attribution en 2018 d'un nouveau véhicule destiné à Citroën et un investissement de 100 millions d'euros pour moderniser l'usine.

Après l'attribution en 2015 du véhicule P87 (successeur du 5008) à Rennes-La Janais, la production de ce SUV, initialement prévue hors d'Europe (en Chine), est une bonne nouvelle : elle assure 10 ans de visibilité industrielle et permettra d'augmenter de plus de 60%, à 100.000 unités par an, la production de l'usine.

"Il n'y a aucune fatalité au déclin industriel" (Le Drian)

Tout en se félicitant du rôle d'accompagnement de la Région Bretagne et de Rennes Métropole « en vue de faire progresser Rennes sur la voie de l'usine excellente », le Pdg de PSA respecte son engagement de pérenniser le site de La Janais au-delà de 2019-2020, pris lors de la signature du rachat fin 2015 pour 13 millions d'euros de 52 hectares par les collectivités. Alors que Rennes Métropole travaille à la réindustrialisation de cette partie du site, la production du nouveau véhicule à Rennes consolide un bassin industriel rennais, encore fragile, et ses sous-traitants.

« La production d'un nouveau véhicule à Rennes est la reconnaissance de l'excellence du site industriel rennais et de ses sous-traitants, soulignaient en juin Jean-Yves Le Drian, président de la Région Bretagne et Emmanuel Couet, président de Rennes Métropole. Il n'y a aucune fatalité au déclin industriel. »

L'Ille-et-Vilaine, un bastion de l'automobile

 Dans les faits, le département de l'Ille-et-Vilaine, qui compte aussi l'usine Sanden, numéro deux mondial de la climatisation automobile, Delphi (électronique embarquée), et des startups comme Yokogo (solutions de communication pour véhicules connectés) reste un gros bastion du secteur en Bretagne.

Après le partenariat en 2015 de PSA avec le groupe Bolloré pour la production de la voiture électrique e-Mehari et dans le domaine de l'auto-partage, les entreprises du département ont reçu ces derniers mois d'autres signes de confiance. La fabrication des pièces du futur P87 a ainsi été attribuée à des fournisseurs installés en Ille-et-Vilaine dont Plastic Omnium pour les pare-chocs et les volets arrière, Faurecia pour les sièges, planches de bord, panneaux de portes et tapis d'insonorisation. Fin 2015, l'équipementier automobile Cooper Standard (plus de 1.000 salariés) a annoncé l'investissement de 12,5 millions d'euros à Rennes et de 14 millions d'euros à Vitré.

« Véhicules et mobilités » : un secteur de 20.000 emplois

Pour autant, au-delà de Rennes et de son agglomération, c'est l'ensemble de la Bretagne qui entend rester « une région automobile compétitive en Europe ». La filière automobile emploie à ce jour près de 20.000 salariés sur plus de 250 établissements répartis sur l'ensemble du territoire et dans des entreprises comme Autocruise à Brest (filiale de TRW Automotive, spécialiste des radars et régulateurs de vitesse), Centigon à Lamballe (véhicules blindés), Blue Solutions à Quimper, (Bolloré, activités de stockage d'électricité).

S'inscrivant dans une politique de soutien à la R&D, à la formation, et à son réseau de compétences technologiques et scientifiques, la Bretagne applique au secteur automobile sa stratégie économique (la "Glaz Economie") de croisements de filières. Après les crises successives, la filière automobile, devenue filière « véhicules et mobilités » se recentre sur sa capacité d'innovation. L'industrie bretonne adapte par exemple son savoir-faire et ses capacités de production à la mobilité décarbonée (véhicule vert) pour devenir une référence sur les nouvelles solutions de mobilité. Les accords PSA-Bolloré roulent sur cette voie, de même que l'expérience que l'industriel breton doit mener dès 2017 à Rennes Métropole avec les BlueBus, gros bus articulés et fonctionnant à l'énergie électrique.

Excelcar: carrosserie du futur et cybersécurité

Autre domaine de recherche : la carrosserie du futur, qui tire partie des avancées de la filière nautique. C'est sur ce projet, lié à l'utilisation de matériaux composites légers et moins énergivores, que la plate-forme industrielle Excelcar est née il y a un an, sur le site de La Janais. Doté d'un budget de 5 millions d'euros, ce Fab Lab mobilise quelque 40 personnes dont 50% de PSA.

Soutenu par les collectivités locales à hauteur de 2,2 millions d'euros, il est aussi financé par les industriels membres tels que le fonds d'innovation de l'Union des industries et des métiers de la métallurgie (UIMM), le pôle de compétitivité ID4car, des ETI et des PME du Grand Ouest (Faurecia, Cooper Standard, Coriolis Composites, Edixia en Bretagne).

« Excelcar mobilise aussi les laboratoires de recherche et rayonne sur près de 50 PME. 25 projets collaboratifs sont en cours, certains sont testés chez PSA, pour une mise en oeuvre après 2018 », précise Sergio Capitao, son directeur.

Plus largement, Excelcar a vocation à travailler sur l'industrie et « l'usine automobile du futur » que la Bretagne veut contribuer à faire émerger. Au-delà des techniques innovantes, la cybersécurité des véhicules connectés ouvre un champ d'expérimentations numériques. L'accord avec PSA intègre d'ailleurs la volonté de la marque d'investir dans ce domaine et de participer, en tant que membre, au même titre que Thalès, DCNS ou La Poste, au Pôle d'excellence cyber en Bretagne. PSA contribuera sur la thématique de la mobilité, de la voiture connectée et du piratage des données.

« Une filière forte sur un territoire, c'est une filière qui ne perd pas la bataille de l'innovation et sa capacité de développement. Pour capter des marchés, il faut amener de la différenciation sur les standards de production » résume Sergio Capitao.

Par Pascale Paoli-Lebailly

@pplmedia35

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