Le géant de la donnée Palantir au plus mal depuis son entrée en Bourse

Le spécialiste de l'analyse de données Palantir traverse sa période la plus instable depuis son entrée en Bourse en septembre 2020. Le marché sanctionne ses projections de croissance jugées trop faibles, tandis que l'entreprise ne communique toujours pas ses objectifs de rentabilité.
François Manens
(Crédits : Reuters)

L'action du spécialiste de l'analyse de données Palantir s'est effondrée de 22% le lundi 9 mai. C'est la plus grosse baisse quotidienne enregistrée depuis l'entrée en Bourse de l'entreprise en septembre 2020. Ce mardi, en cours de séance, l'action continuait de chuter de plus de 3%. Au premier trimestre 2022, l'éditeur de logiciels a une fois de plus accusé un déficit à hauteur de 101 millions de dollars (95 millions d'euros) pour un chiffre d'affaires de 446,4 millions de dollars (422 millions d'euros). Mais surtout, les marchés sanctionnent sa croissance, jugée trop faible, qui pourrait afficher au deuxième trimestre son niveau le plus bas (25%) depuis que les comptes de l'entreprise sont publics.

Dans un contexte difficile pour les valeurs technologiques, l'incapacité de l'éditeur de logiciel à trouver un modèle économique pérenne inquiète les investisseurs. Interrogé sur son objectif de rentabilité par un analyste, le directeur financier du groupe a refusé de partager ses projections puis rapidement détourné le sujet. Depuis le début de l'année, la valeur de l'action a chuté de 58%.

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Une croissance de 25% jugée trop lente

A l'origine de la baisse du cours de Palantir se trouve ses projections de vente pour le deuxième trimestre, à 470 millions de dollars (445 millions d'euros). Ce chiffre d'affaires serait 25% supérieur à celui de l'année précédente, un rythme de croissance impressionnant mais inférieur à celui attendu d'une entreprise de la tech.

Au premier trimestre, le chiffre d'affaires de l'entreprise auprès des clients gouvernementaux avait augmenté de 16% à 241,7 millions de dollars, la plus faible croissance de ce segment d'activité depuis l'entrée en Bourse de Palantir. Problème : le groupe dépend grandement des contrats gouvernementaux pour soutenir sa croissance, puisque sa clientèle d'entreprise a toujours grandi à un rythme moindre.

Palantir réalise encore près de la moitié de son chiffre d'affaires sur le marché américain, qui tire d'ailleurs sa croissance. Considéré comme une entreprise stratégique, le groupe ne vend pas ses logiciels aux pays qui ne sont pas alignés avec les intérêts des Etats-Unis comme la Chine ou la Russie, mais a signé plusieurs contrats avec les pouvoirs européens.

L'instabilité géopolitique pourrait profiter à Palantir

Pour rassurer ses actionnaires, le CEO Alex Karp leur a adressé une lettre qui dépeint un futur incertain et conflictuel. Le dirigeant va même jusqu'à prévenir du pire : "le monde sous-estime de manière considérable la menace d'un conflit nucléaire en Europe de l'Est". Dans ce futur incertain et presque apocalyptique, Palantir tirerait son épingle du jeu, puisque la majorité de ses clients sont des grands industriels, des agences de défense et de renseignement ou encore des spécialistes de la santé. L'entreprise entend d'ailleurs conquérir plus de parts sur le marché du renseignement, et elle a débauché une demi-douzaine d'anciens représentants du gouvernement pour la conseiller sur sa nouvelle stratégie.

Créé en 2004, après les attentats du 11 septembre 2001, Palantir a reçu à ses débuts des financements de la CIA. Depuis, l'entreprise est régulièrement accusée de favoriser la surveillance de masse ou encore de développer l'usage des algorithmes pour des prises de décision en matière de sécurité publique. Autrement dit, de jouer avec les limites de l'éthique, même si cette réputation sulfureuse tend à s'émousser.

Plutôt discrète dans sa stratégie de développement, l'entreprise édite des logiciels de collecte et d'analyse de données qui permettent d'établir des scénarios de prédictions. Parmi ses clients, on retrouve des entreprises européennes comme Airbus et le Crédit Suisse, mais surtout des services de polices et de renseignements. Palantir travaille notamment avec l'agence américaine en charge des douanes et du contrôle des frontières (ICE, pour United States Immigration and Customs Enforcement), dont les actions sont régulièrement critiquées par les ONG humanitaires.

François Manens

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Commentaire 1
à écrit le 11/05/2022 à 11:04
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Ben c'est logique même si nos données représentent pour eux des centaines de milliards cela reste bien souvent sous le manteau, pas simple en bourse tandis qu'ils sont un minimum obligés de s'exposer. Une bonne nouvelle quand même parce que si on nou...

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