Licorne, centaure, startup, exit, cafard, Série A.... : tout comprendre au vocabulaire de la tech

Animaux fantastiques, figures mythologiques, et beaucoup d'anglicismes : bienvenue dans le vocabulaire très spécifique de la tech. Startup, licorne, centaure, cafard, venture, growth, biotech, deeptech, exit... La Tribune fait le point.
Sylvain Rolland
Le nombre de licornes a explosé depuis 2021.
Le nombre de licornes a explosé depuis 2021. (Crédits : DR)

Les différents types de startups

  • Startup

Commençons par la base. Une startup désigne une entreprise innovante récente - on date de manière informelle le début du phénomène au début des années 2010 -, en pleine croissance, et qui évolue dans l'écosystème du numérique. Contrairement aux entreprises classiques, les startups se distinguent car elles amènent sur le marché une innovation - produit ou service - dotée d'un très fort potentiel de croissance économique.

Les startups sont ainsi davantage concentrées sur leur croissance rapide, ou hypercroissance dans le jargon, que sur leur rentabilité. C'est pourquoi beaucoup se financent par le capital-risque : elles réalisent des levées de fonds (au début, quelques centaines de milliers ou quelques millions d'euros, davantage ensuite) pour financer leur recherche et développement et leur commercialisation. La rentabilité est pour elles un objectif de long terme, conséquence de leur pénétration du marché. Les startups peuvent ainsi perdre de l'argent pendant très longtemps, si les investisseurs continuent de les soutenir, pour continuer à croître rapidement.

Deux orthographes du mot sont communément admises : start-up ou startup, le premier est la reprise exacte du mot anglais, le second est sa francisation.

  • Scale-up

Ce terme anglo-saxon indique une startup qui a déjà réussi à se tailler une place sur son marché et qui est en pleine hyper-croissance, notamment à l'international, mais qui n'a pas encore atteint le statut de licorne (voir plus loin). L'étape de la scale-up correspond au moment où la startup doit véritablement se structurer pour passer une étape supplémentaire de croissance. Généralement, les scale-up ont de gros besoins de financements : elles doivent lever des dizaines de millions d'euros pour recruter massivement, ouvrir de nouveaux bureaux à l'étranger, éventuellement mener des acquisitions pour grossir.

Contrairement au mot startup, qui se francise en enlevant le tiret, on écrit scale-up en gardant le tiret.

  • Licorne

A chaque levée de fonds, la startup fixe une valorisation avec ses investisseurs. Plus l'entreprise croît, plus sa valorisation, qui se calcule sur la base d'un multiple de son chiffre d'affaires qui varie selon les secteurs et le potentiel de croissance, est élevée.

Au bout de plusieurs levées de fonds de plus en plus conséquentes, la pépite peut devenir ainsi une licorne : une startup non-cotée valorisée au moins un milliard de dollars. Il y a aujourd'hui plus de 1.000 licornes dans le monde, dont seulement 26 en France et plus de 250 en Europe. L'écrasante majorité est américaine ou chinoise. La moitié des licornes dans le monde ont atteint ce statut depuis 2021. 75% des licornes en Europe sont des startups du logiciel.

Quand une licorne atteint une valorisation de 10 milliards de dollars, elle devient une décacorne. Ce niveau est difficile à atteindre : il n'y a qu'une cinquantaine de décacornes dans le monde, dont 17 en Europe fin 2021, aucune en France. Enfin, les pentacornes sont les startups non-cotées qui atteignent une valorisation d'au moins 50 milliards de dollars. Il n'y en a que quatre dans le monde : les américains Stripe et SpaceX, ainsi que les chinois Bytedance (l'éditeur de TikTok) et Didi Chuxing. Il n'y a aucune hectocorne (startup non-cotée valorisée au moins 100 milliards de dollars), même si Bytedance a brièvement atteint ce statut avant de le perdre.

  • Zèbre

Pas toutes les startups ont vocation à devenir des licornes. D'autres animaux ont donc été choisis pour les qualifier. Ainsi, un zèbre est une startup qui cherche un équilibre entre la croissance et la rentabilité, et ne sacrifie pas la seconde au bénéfice de la première. Les zèbres sont souvent des startups qui évoluent exclusivement dans le BtoB, ou des startups à impact. Elles se rapprochent davantage des entreprises traditionnelles dans leur mode de fonctionnement. Le terme est apparu en 2017.

  • Cafard

De son côté, le cafard se caractérise surtout par sa résilience et sa pertinence dans un marché de niche. L'hyper-croissance n'est pas du tout son objectif. Le terme est apparu en 2016.

  • Centaure

C'est le nouveau mot à la mode dans la French Tech. Apparu en 2022 sous la plume du fonds d'investissement Bessemer Venture Partners, il désigne des startups qui réalisent au moins 100 millions de dollars d'ARR, ou revenus récurrents annuels, qui est le modèle économique dominant dans la tech.

Le nombre de licornes ayant explosé depuis 2021 à cause de l'inflation délirante des valorisations dans la tech post-Covid, les investisseurs sont désormais en recherche d'indicateurs financiers plus terre-à-terre pour mesurer le succès d'une startup. Un centaure est donc un club d'élites de startups très performantes économiquement : il y en a environ 10 en France, pour 26 licornes. Certains centaures, parce qu'ils se sont concentrées sur les revenus plutôt que sur l'hyper-croissance, ne sont d'ailleurs même pas des licornes, à l'image de Silaé, champion du logiciel RH.

Le vocabulaire de l'écosystème tech

  • French Tech, Mission French Tech

A ne pas confondre. La French Tech désigne l'écosystème français de la tech dans son ensemble. Comme une bannière commune qui rassemble les entrepreneurs, les investisseurs et tous les acteurs de l'écosystème : incubateurs, accélérateurs...

De son côté, la Mission French Tech est l'organisme de l'Etat chargé de fédérer l'écosystème et de développer des politiques publiques pour aider les startups. Cette structure a été créée fin 2012 par Fleur Pellerin, alors ministre déléguée au Numérique, et présidée de 2013 à 2017 par David Monteau, de 2018 à 2021 par Kat Borlongan, et depuis 2021 par Clara Chappaz. Sous la tutelle de Bercy, et notamment du ministère délégué au Numérique, la Mission French Tech développe des programmes d'accompagnement comme le Next40 et le French Tech 120 - l'indice des startups les plus performantes de la French Tech -, le Green20, l'Agri20 ou encore Tremplin, destiné à ouvrir la tech aux milieux économiques et sociaux qui en sont le plus éloignés.

  • Deeptech, martech, fintech, cleantech, biotech...

Il s'agit des multiples sous-secteurs de la tech. Comme le numérique est transversal et transforme tous les secteurs, les startups de chaque secteur se regroupent sous diverses appellations, avec parfois leur propre fédération professionnelle, à l'image de France Biotech, qui regroupe toutes les biotechnologies françaises, ou France Fintech.

Ainsi, les fintech - contraction de finance et de tech -, sont les startups qui apportent des solutions numériques au secteur de la finance. Les martech sont les startups dans le marketing, les adtech sont celles dans le secteur de la publicité, les agritech pour l'agriculture, les greentech pour l'énergie, les cleantech pour l'environnement, les spacetech pour les technologies spatiales. Il y a même les sextech - startups qui développent des innovations dans le domaine de la sexualité et de la santé intime - ou encore les churchtech, ou innovations destinées à numériser la pratique de la foi.

Il arrive que plusieurs mots désignent les startups d'un même secteur. Ainsi, la heathtech regroupe les startups de la santé, mais au sein de cet écosystème, on trouve des biotech -solutions basées sur des biotechnologies-, des medtech - nouveaux médicaments - et des solutions de e-santé, comme tout ce qui concerne l'amélioration de l'expérience patient grâce au numérique, à l'image de Doctolib.

A noter que les biotech se déploient dans plusieurs secteurs. L'OCDE (Organisation de coopération et de développement économique) définit les biotechnologies comme « toutes les applications de la science et de la technologie à des organismes vivants ou à leurs composantes ». Par conséquent, les domaines d'application sont très larges : de la santé à l'environnement, en passant par la cosmétique, l'alimentaire ou l'industrie chimique.

Comme les biotech, les deeptech désignent des startups qui peuvent évoluer dans des secteurs très différents. Leur point commun ? Il s'agit de technologies de rupture, fruit de longues années de recherche publique, développées dans des laboratoires puis transférées dans des entreprises pour leur trouver une application industrielle et commerciale. Ces startups font face à des problématiques spécifiques qui nécessitent des politiques publiques adaptées, à l'image du Plan Deeptech développé par l'Etat avec Bpifrance depuis 2018.

Le vocabulaire des investisseurs

  • Venture, growth, early stage

Ces mots, tous anglo-saxons, désignent les stades de maturité d'une startup et la catégorie d'investissement de l'investisseur.

Le venture désigne globalement les levées de fonds de moins de 50 millions d'euros, tandis que le growth, ou equity, désigne les tours de table supérieurs à 50 millions d'euros.

Le stade de l'early stage correspond spécifiquement à l'amorçage : il s'agit des débuts de la startup, lorsque celle-ci a besoin de fonds pour développer sa technologie et/ou trouver ses premiers clients.

  • Seed, série A, B, C...

Il s'agit des noms donnés aux levées de fonds des startups.

Le seed correspond à la levée de fonds d'amorçage (il peut y en avoir plusieurs), souvent de quelques centaines de milliers d'euros, voire de quelques millions.

Lorsque la startup est prête à attaquer son marché, elle lève des fonds auprès d'investisseurs institutionnels. Chaque nouveau tour de table est désigné par une lettre de l'alphabet : la série A est la première levée de fonds institutionnelle post-amorçage, la série B est la deuxième, la série C la troisième, etc. Certaines licornes en sont à leur série F ou G ou au-delà. A chaque nouveau tour, les montants levés et la valorisation de l'entreprise augmentent (en général).

  • Exit, M&A, IPO

Le but de lever des fonds étant de croître rapidement pour conquérir son marché, il arrive un moment où les investisseurs souhaitent obtenir leur retour sur investissement, de préférence avec un juteux bénéfice. Les startups ont donc vocation, à un moment ou à un autre, à « sortir » du portefeuille de leurs investisseurs : c'est le fameux exit.

Il peut y avoir plusieurs types de sorties. La première option, celle dont rêvent la plupart des entrepreneurs de la tech, est de devenir rentable et de poursuivre seul son chemin. La startup devient alors avec le temps une ETI ou un grand groupe, à l'image des GAFAM américains (Google, Apple, Meta -Facebook-, Amazon et Microsoft), qui ont été des startups financées par le capital-risque avant de devenir des géants. En France, la startup Veepee a également fait ce chemin : de petite startup biberonnée par ses investisseurs, elle est devenue un géant du e-commerce qui employait fin 2021, 5.500 personnes dans le monde, réalisait 3,8 milliards d'euros de chiffre d'affaires et était largement rentable.

La deuxième forme de sortie, honorable pour les entrepreneurs comme pour les investisseurs, est le rachat, ou M&A (fusion/acquisition). Lorsqu'une startup a atteint une place confortable sur son marché, elle peut se vendre auprès d'un acteur plus gros, qui récupère sa technologie/ses clients/sa marque. Les investisseurs encouragent ce type de sortie.

La troisième forme honorable de réaliser un exit est d'entrer en Bourse, ce qu'on appelle faire une IPO (initial public offering), ce qui permet aux investisseurs de récupérer leur mise et, si l'IPO est un succès, de toucher le jackpot. OVHCloud et Deezer, qui ont été parmi les premières licornes françaises, sont entrées en Bourse sur Euronext, respectivement en octobre 2021 et juillet 2022. Elles ne sont de fait plus des licornes.

On dit numérique ou digital ?

Numérique. Le mot français numérique se traduit en anglais par digital, mais le mot digital existe aussi en français et signifie qui se rapporte au doigt. Beaucoup de grands groupes français aiment parler de transformation digitale, mais c'est une erreur : ils parlent en réalité de la transformation de leurs doigts ou par leurs doigts.

Sylvain Rolland

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