« Dieselgate » : embourbé dans l'affaire, Continental accepte de payer 100 millions d'euros d'amende

Le second équipementier automobile mondial a annoncé, ce jeudi, qu'il allait payer 100 millions d'euros d'amende pour mettre fin à des poursuites le visant dans le cadre du scandale des moteurs diesel truqués du groupe Volkswagen. De nombreux autres groupes automobiles et équipementiers sont inquiétés dans cette affaire.
(Crédits : FABIAN BIMMER)

La justice suit son cours dans la gigantesque affaire du « Dieselgate ». Ce jeudi, le second équipementier automobile mondial Continental a annoncé avoir accepté de payer 100 millions d'euros d'amende pour mettre fin à des poursuites le visant dans le cadre de ce scandale. L'amende a été infligée en raison d'une « négligence (autour de la) livraison de logiciels de calcul et de contrôle » pour les moteurs manipulés. Et l'entreprise a renoncé à faire appel, ce qui clôt les poursuites contre elle. Continental précise avoir provisionné en grande partie le montant de l'amende.

Pour rappel, le « dieselgate » a éclaté en 2015 quand Volkswagen a admis avoir trafiqué 11 millions de moteurs de type « EA 189 » sur ses véhicules diesel d'un logiciel capable de les faire apparaître comme moins polluants lors de tests en laboratoire et sur les routes.

Lire aussiCinq ans après le Dieselgate, les luttes intestines persistent chez Volkswagen

Comme le leader du marché Bosch, Continental s'est rapidement également retrouvé dans le viseur des enquêteurs pour les équipements fournis à Volkswagen. Les poursuites ont visé son ancienne division de transmissions « Powertrain Drive », devenue Vitesco après sa scission du groupe puis sa mise en Bourse. L'équipementier a d'ailleurs annoncé qu'il allait désormais se retourner vers Vitesco pour récupérer les 100 millions d'euros déboursés. L'affaire est donc close pour Continental mais les poursuites sont encore en cours contre une quarantaine de personnes du groupe, a appris l'AFP auprès du parquet de Hanovre. D'anciens cadres dirigeants sont poursuivis pour le délit de fraude et des techniciens pour celui d'aide à la fraude.

D'autres entreprises, et leurs dirigeants, inquiétés par la justice

Dans cette affaire tentaculaire qui a ébranlé le secteur automobile allemand et nui à la réputation de la première économie européenne dans son ensemble, l'ancien PDG d'Audi a été condamné en Allemagne à 21 mois de prison avec sursis ainsi qu'à une amende de 1,1 million d'euros, le 27 juin. Rupert Stadler devient ainsi le premier dirigeant du groupe Volkswagen à écoper d'une sanction pénale dans le scandale des moteurs diesel truqués. Ce financier de formation, n'est pas accusé d'être l'instigateur de la fraude mais d'avoir eu connaissance de l'installation de logiciels illégaux et de n'avoir rien fait pour y mettre fin.  Le manager de 60 ans a eu « au plus tard » en juillet 2016 une « connaissance établie » de l'installation de logiciels illégaux sur des modèles de la marque Audi et VW, mais sans avoir pris les « mesures nécessaires » pour cesser leur commercialisation, a détaillé le juge Stefan Weickert lors de la lecture du jugement.

Lire aussi« Dieselgate » : À son procès, l'ancien patron d'Audi reconnaît avoir mis en vente des moteurs avec des logiciels truqués

Avant cela, le groupe Volkswagen a dû payer depuis plus de 30 milliards d'euros en remboursements, dédommagements et frais judiciaires, dont le plus gros aux États-Unis. Mais les ennuis ne sont pas terminés pour le groupe allemand. Un autre grand procès pénal a démarré en septembre 2021, impliquant quatre anciens responsables de Volkswagen accusés de fraude. Des audiences sont prévues jusqu'en 2024 et le principal accusé, l'ancien PDG du premier constructeur européen à l'époque du scandale, Martin Winterkorn, sera jugé en septembre pour son rôle dans le scandale. Des investisseurs réclament par ailleurs réparation en justice, alors que le titre de VW s'était effondré de quelque 40% dans les jours suivant l'éclatement du scandale.

D'autres volets judiciaires restent, de plus, ouverts comme en France où la cour d'appel de Paris a confirmé en mars la mise en examen pour tromperie aggravée de Volkswagen. L'Allemand n'est pas seul ici, les constructeurs Renault, Peugeot, Citroën et Fiat-Chrysler ayant aussi été mis en examen mi-2021.

Dix-neuf millions de véhicules concernés

L'affaire fait toujours du bruit, près de dix ans après sa découverte, puisqu'elle a des conséquences concrètes sur la pollution du trafic automobile. En mars 2023, le Conseil international sur le transport propre (ICCT), une ONG environnementale a prévenu que dix-neuf millions de véhicules diesel roulant en Europe présenteraient des niveaux « suspects » d'émissions d'oxyde d'azote (NOx).

Plus précisément, sur les 53 millions de voitures diesel vendues dans l'UE et au Royaume-Uni entre 2009 et 2019, 24 millions de véhicules produits - et 19 millions roulent encore, dont 3,3 millions en France - présentaient des émissions « suspectes » par rapport aux décisions de la CJUE, selon l'ICCT. Les 19 millions de véhicules suspects, de 200 modèles, ont été vendus par de nombreux constructeurs sous les normes Euro 5 et Euro 6.

Seize millions de véhicules affichent même des niveaux d'émissions qualifiés d'« extrêmes » (trois ou quatre fois la limite officielle). Ces émissions excessives indiquent « l'utilisation probable » d'une stratégie de calibration du moteur, interdite. Or, le système de filtration des rejets de NOx est réduit ou désactivé quand les températures sont trop basses et au-dessus d'une certaine altitude. Les constructeurs automobiles ont toujours soutenu que c'était nécessaire pour protéger le moteur. La Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a, depuis 2023, rendu plusieurs arrêts jugeant illégal un logiciel équipant des véhicules diesel.

A noter, pour établir ce rapport, l'ICCT a analysé trois sources de données sur les émissions de Nox : les données d'essais en laboratoire et en conditions réelles transmises par des autorités gouvernementales, celles d'essais en conditions réelles produites par des organisations indépendantes et une vaste base de données de mesures par télédétection.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 1
à écrit le 25/04/2024 à 19:16
Signaler
"Le commerce est l'école de la tromperie" Nicolas Machiavel (1469-1527).

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.