L’industrie des télécoms accentue sa pression sur Bruxelles pour un changement de régulation

Alors que les élections européennes se rapprochent, et avec elles la perspective d’une nouvelle commission, plusieurs grands noms des télécoms, à l’instar de Nokia, Ericsson, Orange ou encore Vodafone appellent Bruxelles à revoir la régulation du secteur. Tous souhaitent, en particulier, davantage de consolidation pour améliorer leur santé financière.
Pierre Manière
Les principaux opérateurs télécoms européens souhaitent que la Commission facilite le passage de quatre à trois opérateurs dans les différents pays.
Les principaux opérateurs télécoms européens souhaitent que la Commission facilite le passage de quatre à trois opérateurs dans les différents pays. (Crédits : Reuters)

C'est, à leurs yeux, le moment de renforcer leur lobbying afin d'être entendus par la sphère politique. Plusieurs grands noms européens des télécoms ont récemment réitéré leur souhait de voir la réglementation du secteur évoluer à l'échelle continentale. Tous souhaitent s'assurer que leurs desiderata figureront bien parmi les priorités de la prochaine commission, qui verra le jour dans le sillage des élections du mois de juin.

Ce mercredi, les deux champions européens des équipements télécoms, le suédois Ericsson et le finlandais Nokia, se sont fendus d'une missive commune avec l'opérateur britannique Vodafone, ainsi qu'avec les américains IBM et Intel.

Dans cette lettre, ils appellent les décideurs politiques européens à poser les bases d'« un véritable marché unique numérique » dans l'Union européenne (UE), à « combler le déficit d'investissements » dans les réseaux, et à « éviter d'introduire des charges réglementaires inutiles ». Le 12 avril dernier, Orange s'est livré à un plaidoyer similaire. Le numéro un français des télécoms, qui dispose d'un bureau à Bruxelles, a publié un « manifeste » de quelque 40 pages à ce sujet.

« Manque cruel de retour sur investissement »

Équipementier et opérateurs télécoms défendent tous la même ligne. Tous estiment que le secteur va droit dans le mur, tout comme les objectifs de l'UE en matière de connectivité, si la réglementation n'évolue pas. « Les opérateurs européens souffrent d'un manque cruel de retour sur leurs investissements dans les réseaux », écrit l'opérateur Orange.

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Le leader français des télécoms rappelle que de nombreux grands opérateurs - comme Vodafone, Telecom Italia, ou encore Telefonica - sont en difficulté. Ils n'ont aujourd'hui, d'après Christel Heydemann, la patronne d'Orange, pas les moyens de débourser les 200 milliards d'euros qui manquent pour assurer l'objectif de Bruxelles d'apporter une connectivité d'un gigabit par seconde à tous les habitants d'ici à 2030.

Pour permettre aux opérateurs et équipementiers de retrouver des couleurs, tous militent pour « une modernisation du cadre réglementaire », et notamment « une nouvelle approche du contrôle des fusions », expliquent Ericsson, Nokia et Vodafone dans leur communiqué. « La barre en matière de consolidation sur les marchés nationaux est trop haute », renchérit Orange, qui file la métaphore sportive en bon partenaire des Jeux olympiques.

Les opérateurs souhaitent, en clair, que la Commission européenne facilite le passage de quatre à trois opérateurs dans les différents pays. Ce qui assurerait une meilleur rentabilité économique pour les acteurs restants. Mais jusqu'à présent, tout retour à trois opérateurs par pays membre de l'UE est vu d'un mauvais œil à Bruxelles. La Commission européenne, très protectrice des consommateurs, considère que ces fusions sont synonyme d'une moindre concurrence, et donc de hausses de prix.

Harmoniser les attributions de fréquences

En parallèle, les cadors des télécoms plaident pour différentes mesures qui permettraient de poser les bases d'un marché unique des télécoms dans l'UE. Ils militent, par exemple, pour une harmonisation des procédures d'attribution des fréquences mobiles. Aujourd'hui, chaque pays les attribue comme bon lui semble, ce qui crée de fortes disparités à l'échelle continentale.

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Orange remarque que les dernières fréquences 5G ont été attribuées pour 40 ans en Espagne, contre 15 ans en France. En outre, ce même spectre a été alloué en 2018 en Espagne, et pas moins de cinq ans plus tard en Pologne... Ces différences, argue l'opérateur français, qui est présent dans tous ces pays, lui coûtent cher, puisqu'elles impactent directement sa stratégie d'investissements dans les réseaux.

Enfin, les opérateurs souhaitent toujours que les géants américains du Net participent au financement des réseaux télécoms. Leur argumentaire est désormais bien rôdé. Ils expliquent que les services d'Apple, Amazon, Facebook ou Google, de plus en plus « datavores », les obligent à déployer des réseaux toujours plus importants pour des retours financiers dont ils ne voient pas la couleur. La Commission européenne est, c'est peu dire, attendue au tournant.

Pierre Manière

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Commentaires 2
à écrit le 19/04/2024 à 9:16
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On les comprend il vaut mieux contourner madame Van Layen qui depuis son immense succès avec le covid est devenue vachement chère quand même hein... ^^

à écrit le 18/04/2024 à 11:55
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Plus de concentration pour consolider = politique anticoncurrentielle + entente illicites sur le dos des consommateurs pour maximiser les primes des PDG et des cadres dirigeants + satisfaire des fonds spéculatifs vautours. De plus ces fonds doivent ê...

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