Brexit : les startups de la Fintech en ordre de bataille

Comme les acteurs institutionnels, de nombreuses fintech basées au Royaume-Uni s'activent auprès des régulateurs européens pour s'assurer un accès au marché unique. Certaines anticipent également une baisse d'activité sur leur marché local.
Juliette Raynal
Cofondée par Nik Storonsky, la néobanque Revolut, qui compte 4 millions d'utilisateurs en Europe, a obtenu une licence bancaire et un agrément d'établissement de monnaie électronique en Lituanie. Elle avait également entamé des discussions auprès du régulateur luxembourgeois mais n'y a pas donné suite.
Cofondée par Nik Storonsky, la néobanque Revolut, qui compte 4 millions d'utilisateurs en Europe, a obtenu une licence bancaire et un agrément d'établissement de monnaie électronique en Lituanie. Elle avait également entamé des discussions auprès du régulateur luxembourgeois mais n'y a pas donné suite. (Crédits : DR)

Anticiper pour ne pas subir. Voilà en résumé la stratégie des jeunes entreprises innovantes de la finance qui, à cinq semaines de la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne, entendent sécuriser leur accès au marché unique. « Nous ressentons un vrai appel d'air lié au Brexit. Lors du Paris Fintech Forum fin janvier, de nombreuses entreprises étrangères sont venues nous solliciter », témoigne Edouard Plus, à la tête du Swave, un incubateur parisien qui aide les startups de la finance à se développer. En effet, les fintech qui exercent leur activité en Europe grâce à un permis obtenu auprès du régulateur britannique, la FCA (Financial Services Authority), pourraient se voir priver d'un accès au marché européen en cas de hard Brexit le 29 mars prochain. Ce risque concerne à la fois les fintech britanniques et les fintech étrangères ayant choisi Londres pour établir leur camp de base sur le Vieux Continent.

Cette incertitude les incite à demander un agrément auprès d'autres régulateurs européens et donc à créer, ou muscler, de nouvelles implantations. De quoi contribuer à faire monter en puissance d'autres hubs de l'innovation financière alors que le Royaume-Uni domine le secteur en captant plus de la moitié des investissements réalisés dans la fintech européenne. Pour attirer les futures pépites de la finance, la Lituanie a mis en place tout un arsenal : licence bancaire spécifique cinq fois moins coûteuse en capital et procédure accélérée et en anglais. Le pays balte s'attend ainsi à recevoir une centaine de demandes émanant de ces jeunes entreprises. La néobanque britannique Revolut y a déjà obtenu le précieux sésame et avait, en parallèle, initié des discussions auprès du régulateur du Luxembourg. Dans un univers hyperconcurrentiel, elle ne peut se contenter de son marché local et veut éviter à tout prix de se couper de ses autres clients européens.

Élargir le périmètre géographique

Elle compte 4 millions d'utilisateurs sur le Vieux Continent, dont 550.000 en France, et prévoit d'ouvrir entre 8.000 et 10.000 nouveaux comptes par jour en Europe. Dans la même logique, la plateforme britannique de transfert d'argent Transferwise, et ses 4 millions d'utilisateurs dans le monde, a aussi pris ses précautions en initiant une demande auprès du régulateur belge pour garantir la continuité du service fourni aux utilisateurs. La banque mobile Starling, encore uniquement présente au Royaume Uni, s'est tournée vers le législateur irlandais pour s'attaquer à d'autres pays européens.

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De son côté, la fintech britannique Ebury, spécialisée dans les paiements internationaux et désormais régulée à Londres et à Bruxelles, a entrepris d'élargir son périmètre géographique pour contrebalancer une potentielle chute d'activité sur son marché domestique. « Les premières années, le Royaume-Uni était notre principal marché. Désormais, les revenus générés en dehors sont majoritaires. Si notre activité baisse au Royaume-Uni, elle sera compensée par les pays que nous avons récemment ouverts », confie Cyril Léger, directeur général France d'Ebury.

Reproduire les infrastructures

Dans cet univers mouvant, l'attractivité du marché français pourrait permettre à Paris d'attirer des acteurs déjà bien installés. Le britannique GoCardless, dont la plateforme de prélèvement bancaire automatique est utilisée par 40000 entreprises à travers le monde, s'apprête à obtenir son agrément en France. « Nous avons une activité "B to B", donc nous souhaitions un agrément dans un pays où la réglementation est robuste pour rassurer nos entreprises clientes. De plus, la France est notre second marché après le Royaume-Uni et nous avions déjà un bureau parisien. Cette présence a facilité les discussions avec le régulateur », détaille Ahmed Badr, chargé des questions juridiques chez GoCardless.

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La société Onfido, qui propose de vérifier automatiquement l'identité d'une personne à partir d'un selfie, a toqué à la porte du Swave pour être accompagnée dans ses démarches auprès du régulateur. L'Hexagone représente un marché stratégique. : sa solution est déjà utilisée par plusieurs entreprises tricolores dont Compte Nickel (BNP Paribas). L'entreprise s'apprête à inaugurer ses bureaux parisiens et compte investir plus de 4 millions d'euros dans les douze mois pour renforcer sa présence.

Mais l'anticipation d'un hard Brexit ne se limite pas aux seules couvertures réglementaires et business. « Cela nécessite aussi de reproduire notre infrastructure de paiement », témoigne Philippe Gelis, cofondateur et directeur général de Kantox, société londonienne spécialisée dans la gestion du risque de change et bientôt régulée en Espagne. L'entrepreneur évalue à plusieurs centaines de milliers d'euros les investissements nécessaires à ces préparatifs. Un coût pas si anodin, surtout pour les startups les moins établies.

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  • En 2019, la Lituanie s'attend à recevoir une centaine de demande de licence émanant de startups de la finance.

Juliette Raynal

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Commentaire 1
à écrit le 28/02/2019 à 11:10
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Si les geeks qui montent des start up pouvaient arrêter de faire de la musculation cela ne ferait qu'augmenter leur crédibilité exposant moins leurs complexes tellement pratiques pour des manipulateurs extérieurs.

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