Brexit : HSBC se renforce tout doucement en France

La banque britannique HSBC a transféré toutes ses succursales européennes (sauf l'allemande) à sa filiale française, qui a augmenté la taille de son bilan. Mais les 1.000 emplois transférés tardent à se matérialiser.
Delphine Cuny
Le siège de HSBC à Paris.

L'annonce tonitruante par le précédent directeur général, Stuart Gulliver, avait des airs de menaces pour les gouvernants britanniques : le géant bancaire HSBC avait évoqué dès 2016 la possibilité de transférer 1.000 emplois de la City vers Paris du fait du Brexit. Son successeur avait pris ses distances avec ce chiffre qui ne figure plus dans les communications officielles. A cinq semaines de la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne, on est loin du compte : selon nos informations, HSBC France, qui emploie 8.000 personnes, contre 9.500 il y a trois ans, après une restructuration, vient de renforcer ses effectifs d'une centaine de personnes (traders et vendeurs en salle de marchés, etc) seulement, plutôt par des recrutements sur place que des transferts.

Le sujet du Brexit semble un peu tabou chez le groupe britannique, le terme même est banni des communiqués au profit de formules plus évasives sur "l'incertitude prolongée autour de la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne". Comme annoncé en 2016, la France sera pourtant bien la base de repli post-Brexit dans l'UE, car HSBC y possède une banque de plein exercice depuis le rachat du CCF en 2002, avec toutes les licences nécessaires. Toutes les succursales européennes doivent lui être rattachées - sauf l'allemande, cotée en Bourse et détenue à 80% par la maison-mère.

"Dans un contexte d'évolution politique et réglementaire en Europe, HSBC ajuste ses activités de manière à conforter sa proposition paneuropéenne pour les clients. Pour ce faire, HSBC France a acquis ou va acquérir d'ici au 1er mars 2019 certains actifs et passifs de 9 entités européennes de HSBC Bank plc, (Grèce, Pologne, Irlande, Belgique, Pays-bas, Luxembourg, Espagne, Italie, République Tchèque)" explique la banque dans un communiqué publié mardi 19 février, sans mentionner là non plus le terme de Brexit.

Capital renforcé, équipe légèrement musclée

Filiale à 99,99% de HSBC Bank Plc, HSBC France a dû renforcer son bilan et a procédé à deux augmentations de capital d'un total de 1,4 milliard d'euros en janvier et février 2019. Son bilan pèse désormais plus de 17,6 milliards d'euros. Les effectifs ajoutés de ces entités européennes représentent plus d'un millier d'emplois mais HSBC ne communique pas de chiffre exact. Le point sur les relocalisations ou créations de postes en Europe continentale est un sujet balayé comme trop sensible.

"2019 ouvre une nouvelle page pour HSBC France" fait valoir son directeur général, Jean Beunardeau. "Les transferts futurs d'équipes depuis Londres se feront au gré des décisions de nos clients, les grandes entreprises européennes [non françaises]. Pour l'instant, très peu de clients ont transféré leur activité et ils sont toujours servis depuis Londres » observe-t-il. 

"Le chiffrage est un piège" soupire un cadre du groupe. Trop d'aléas demeurent selon la banque sur les termes d'un accord - la direction ne croit pas à un "hard Brexit" - et sur l'étendue des opérations qui seraient concernées par la perte du "passeport européen" donnant accès au marché unique : les opérations de change ne sont pas des services financiers mais celles de couverture de change, oui. La période de transition espérée d'un an devrait donner du temps pour des ajustements. HSBC France a créé une activité de gestion notionnelle de trésorerie, une autre de conservation de titres et va créer par la suite une activité actions et une autre de dérivés d'actions. Ce qui devrait encore muscler les équipes françaises.

A Bercy, les dirigeants du groupe britannique ont dû clarifier leurs intentions auprès des ministres. Selon une source au fait des échanges, ils auraient revu en baisse leur estimation à « quelques centaines » de postes en mettant en avant le cash injecté et les bénéfices taxables futurs, qui rapporteront de l'argent à l'Etat.

HSBC, dont la filiale suisse avait négocié avec le parquet national financier une amende 300 millions d'euros pour éviter un procès en France pour blanchiment de fraude fiscale en octobre 2017, a fait valoir que son empreinte fiscale et sociale en France s'élève à 520 millions d'euros en 2018, en comprenant l'impôt sur les sociétés, les charges sociales employeur, les taxes sur les salaires et la contribution au Fonds de résolution unique (FRU), qui n'est cependant pas versée à l'Etat français mais in fine au Conseil de résolution unique européen (Single Resolution Board).

La banque britannique, qui a publié jeudi un bénéfice avant impôts de 19,9 milliards dollars, en hausse de 16% en 2018, mais inférieur aux attentes, a prévenu qu'elle allait repousser certains investissements cette année, sur les 15 à 17 milliards de dollars envisagés sur trois ans dans la technologie et en Chine, en raison d'un ralentissement de sa croissance sur ses deux principaux marchés, le Royaume-Uni et la Chine, justement. Dans ce contexte, le groupe cherche aussi à limiter le coût de la réorganisation post-Brexit en conservant des équipes centralisées à Londres pour les économies d'échelle. Si cela demeure possible après le 29 mars.

Delphine Cuny

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Commentaires 2
à écrit le 05/10/2019 à 10:17
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ayant mon compte chez hsbc avant ccf depuis de nombreuses années je me fait du soucis ? pouvez -vous me rassurer .car il faudra prendre une décision?merci de me répondre honnétement.

à écrit le 21/02/2019 à 9:19
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Qu’ils viennent, qu’ils viennent....la Justice les taillera en pièces, comme UBS...!

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