Faillite de SVB : comment faire revenir les clients dans la banque qui a pris le relais

Entité créée par les régulateurs américains pour succéder à Silicon Valley Bank (SVB), Silicon Valley Bridge Bank a appelé les clients à ramener leurs dépôts au sein de l'organisation. La banque est en train de remettre en route ses différents systèmes, et « accorde de nouveaux prêts et honore les solutions de crédits existantes », a assuré son patron fraîchement nommé par les autorités. . Dans l'immédiat, la faillite de SVB profite surtout aux plus grandes banques comme JPMorgan Chase et Bank of America. De son côté, le prix Nobel d'économie Joseph Stiglitz salue dans un entretien à l'AFP la réaction des autorités américaines mais n'exclut pas d'autres défaillances.
Sur la seule journée de jeudi, SVB avait reçu quelque 42 milliards de dollars d'ordres de retrait de la part de clients alarmés par la volonté de la banque de renflouer rapidement ses liquidités en levant des capitaux.
Sur la seule journée de jeudi, SVB avait reçu quelque 42 milliards de dollars d'ordres de retrait de la part de clients alarmés par la volonté de la banque de renflouer rapidement ses liquidités en levant des capitaux. (Crédits : BRIAN SNYDER)

La confiance sera-t-elle rétablie entre le système bancaire et ses clients ? Tim Mayopoulos, le patron Silicon Valley Bridge Bank, la nouvelle entité créée par les régulateurs américains pour succéder à Silicon Valley Bank (SVB) après sa faillite, a appelé mardi les clients à ramener leurs dépôts.

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« Nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour reconstruire, regagner votre confiance et continuer à soutenir l'économie de l'innovation », a-t-il écrit dans un message, au lendemain de sa nomination à la tête du nouvel établissement par la FDIC, l'agence américaine chargée de garantir les dépôts.

La banque est en train de remettre en route ses différents systèmes, « accorde de nouveaux prêts et honore les solutions de crédits existantes ».

42 milliards de dollars d'ordre de retrait sur une journée

Comme s'il jetait une bouteille à la mer, il a déclaré que « la première chose que vous pouvez faire pour soutenir l'avenir de cette institution est de nous aider à reconstituer notre base de dépôts, à la fois en laissant des dépôts auprès de la Silicon Valley Bridge Bank et en transférant les dépôts qui sont partis au cours des derniers jours ».

Devenue insolvable après des retraits massifs de clients, SVB a été placée vendredi sous le contrôle des autorités. La défaillance de la banque constitue la plus grosse faillite bancaire aux Etats-Unis depuis 2008. Elle avait été précédée mercredi par la mise en liquidation de l'établissement Silvergate Bank, petite banque régionale devenue la destination favorite du milieu des cryptomonnaies. Elle avait ensuite été suivie par la fermeture forcée dimanche de Signature Bank, 21e banque du pays.

Sur la seule journée de jeudi, SVB avait reçu quelque 42 milliards de dollars d'ordres de retrait de la part de clients alarmés par la volonté de la banque de renflouer rapidement ses liquidités en levant des capitaux, après avoir vendu un portefeuille de titres financiers pour 21 milliards de dollars avec une perte de 1,8 milliard à la clef. Dans un document boursier mardi, SVB a précisé que Goldman Sachs était l'acheteur de ce portefeuille.

Une enquête ouverte par Washington

Le ministère américain de la Justice a ouvert une enquête sur la faillite de SVB, ciblant potentiellement les récentes ventes d'actions effectuées par plusieurs dirigeants de la banque. Selon le Wall Street Journal, l'agence supervisant les marchés boursiers, la SEC, a également lancé une investigation.

Pour seul commentaire, la SEC renvoie à une déclaration de son président, Gary Gensler, qui dimanche avait assuré que la SEC « enquêtera et prendra des mesures coercitives si (elle) constate des infractions des lois fédérales sur les valeurs mobilières ».

« En ces temps de volatilité et d'incertitude accrues, la SEC se concentre particulièrement sur le contrôle de la stabilité des marchés et sur l'identification et la poursuite de toute forme de mauvaise conduite susceptible de menacer les investisseurs, la formation de capital ou les marchés de manière plus générale », avait-il alors souligné.

Dans une tribune publiée lundi, l'influente sénatrice Elizabeth Warren avait appelé les procureurs et régulateurs à « enquêter pour savoir si des cadres se sont livrés à des délits d'initiés ou ont enfreint d'autres lois civiles ou pénales ». Elle avait aussi enjoint les autorités à récupérer la rémunération et les bonus versés l'an dernier au patron de SVB, Greg Becker, ainsi que les bonus versés aux cadres.

Selon des documents boursiers, Greg Beck et le directeur financier de SVB, Daniel Beck, ont notamment procédé à des ventes d'actions fin février selon un programme de ventes établi à l'avance.

Les grandes banques tirent leur épingle du jeu

La FDIC a garanti que tous les clients de la banque avant sa mise en faillite auraient accès à l'intégralité de leurs fonds, y compris au-delà de la limite habituelle des 250.000 dollars.

La situation profite surtout aux plus grandes banques comme JPMorgan Chase et Bank of America. Celles-ci ont de leur côté vu affluer des clients et des dépôts au cours des derniers jours, selon deux sources proches du secteur. Ces établissements ne vont pas activement à la recherche de nouveaux clients auprès de concurrents au vu du contexte, ont affirmé ces sources. En revanche, elles accueillent les clients des banques fermées, ce qui représente des montants élevés, a souligné l'une d'entre elles.

Des clients venant de petites et moyennes banques ont aussi probablement transféré tout ou partie de leurs fonds « vers des acteurs majeurs que le gouvernement ne pourra pas, à leurs yeux, laisser faillir », avance Alexander Yokum, qui analyse les banques régionales pour le cabinet CFRA. Les départs devraient toutefois dépendre des banques, de la composition de leur clientèle ou de leur implantation régionale, estime-t-il.

Pas de sorties de dépôts incontrôlables

L'ampleur des mouvements ne saura probablement connue que quand les banques publieront leurs résultats trimestriels, en avril, ou si elles publient un rapport intermédiaire d'ici là, souligne Alexander Yokum. Dans une note, l'agence de notation S&P Global Ratings a souligné n'avoir « pas vu d'éléments indiquant que les sorties de dépôts incontrôlables enregistrées dans quelques banques se soient largement répandues » dans les autres.

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« Nous pensons que les mesures d'urgence annoncées par la Réserve fédérale (dimanche) ont permis aux banques de disposer de sources de liquidités supplémentaires en cas de besoin et ont probablement aussi réduit les chances que la question de la confiance devienne un problème pour un grand nombre de banques », est-il ajouté.

Pour l'économiste Joseph Stiglitz, « la stabilité du système financier doit être repensée »

Quelques jours après la faillite de la Silicon Valley Bank, le prix Nobel d'économie Joseph Stiglitz salue dans un entretien à l'AFP la réaction des autorités américaines, qu'il a toutefois jugé très lente. « Les choses auraient été bien plus faciles si elles avaient répondu plus rapidement, particulièrement en garantissant que les clients qui avaient des dépôts de plus de 250.000 dollars n'allaient pas perdre leur argent », souligne-t-il. Il faut comprendre le degré de stress que ça (le retard des autorités a réagir) a mis sur tous les professionnels du secteur de la tech. C'est un traumatisme qui aura, je pense, des effets à plus long terme. »

 « Les nouvelles technologies favorisent les bank runs (paniques bancaires, NDLR), pointe-t-il. On pensait jusqu'ici que les comptes bancaires étaient difficiles à déplacer. Mais quand tout le monde gère son compte bancaire par Internet, c'est beaucoup plus facile de retirer tout son argent et de le placer ailleurs. Avant la faillite de SVB, il y avait eu très peu de discussions sur la manière dont la technologie avait influencé la probabilité des bank runs. La stabilité du système financier doit être repensée, en prenant en compte les nouvelles technologies. »"

Dans une récente tribune, l'économiste a même estimé que la faillite de SVB était « prévisible ». « Ce qui est intéressant, c'est qu'il n'y avait pas de commentaires négatifs au sujet des prêts accordés par SVB, note-t-il toutefois auprès de l'AFP. « Par le passé, dans la plupart des bank runs, les gens se plaignaient de l'imprudence des banques, qui avaient fait des prêts hypothécaires plus ou moins frauduleux. Mais ici ça n'est pas un problème de prêts, c'est plutôt une asymétrie (entre l'actif et le passif de SVB, NDLR). Et cela peut se produire n'importe où dans notre système économique ».

(Avec AFP)

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Commentaire 1
à écrit le 15/03/2023 à 20:25
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Pourquoi déposer son argent dans une banque régionale soumise à une règlementation on ne peut plus laxiste du fait de l'ex-président Trump? En effet, le président qui n'aimait pas perdre et qui traitaient ses opposants des "losers" a commis une ...

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