Facebook va lancer d'ici peu un portefeuille numérique pour stocker des cryptomonnaies

Le réseau social ne lâche pas l’affaire. Alors que son projet de monnaie numérique diem piétine, Facebook compte accélérer sur le lancement effectif de Novi, son portefeuille numérique pour stocker des cryptomonnaies d’ici à la fin de l’année. Depuis 2018, Facebook multiplie tous azimuts les expériences dans le domaine des paiements, quitte à manquer de clarté sur sa stratégie et ses objectifs.
Ancien président de PayPal, David Marcus est désormais en charge des projets Novi et diem au sein de Facebook.
Ancien président de PayPal, David Marcus est désormais en charge des projets Novi et diem au sein de Facebook. (Crédits : DR)

Le diem se fait attendre? Qu'importe ! Facebook annonce le lancement d'un wallet (portefeuille numérique) pour patienter. Le réseau social, qui avait ébranlé le monde financier et les gouvernements avec son projet de monnaie numérique privée, le libra, transformé depuis en diem, un stablecoin adossé au dollar, souhaite en effet proposer à ses utilisateurs un wallet pour y stocker des cryptomonnaies.

Selon le Français David Marcus, ancien président de Paypal et actuellement en charge du projet cryptomonnaie chez Facebook, cité par le site The Information et repris par l'AFP, les équipes du réseau social « sont très engagées » dans le lancement dès cette année du wallet, baptisé Novi (ex-Calibra).

Ce dirigeant a précisé qu'il préfèrerait lancer le wallet en même temps que le diem mais que la gestation de cet stablecoin était désormais entre les mains de l'Association Diem et que l'environnement réglementaire n'était pas encore suffisamment clarifié.

Cette association réunit plusieurs partenaires autour de Facebook, comme le groupe français de télécoms Iliad (Free), le géant de la musique en ligne Spotify ou encore le groupe américain Uber.

« Le portefeuille est prêt, nous avons acquis les licences nécessaires aux Etats-Unis et dans d'autres pays. En théorie, nous souhaitons le lancer avec le diem mais cela dépendra de combien de temps il faudra pour créer le diem, raconte David Marcus au site spécialisé. Dans tous les cas, l'application Novi doit être capable de gérer d'autres cryptomonnaies que le diem.

America First !

L'annonce en 2019 par Facebook de son intention de lancer sa propre cryptomonnaie avait suscité une levée de boucliers de la part des banques centrales qui y voyaient une menace de souveraineté pour leur propre monnaie. Face à ces réactions très négatives, Facebook a changé, fin 2020, de stratégie et mis (beaucoup) d'eau dans son vin en proposant son nouveau projet autour du diem, centré à la fois sur les Etats-Unis et le dollar (un diem pour un dollar).

Terminé donc la vocation universaliste du libra pour se recentrer sur un projet plus mercantile, plus simple et surtout plus acceptable pour les régulateurs. Pour rassurer, Facebook a même monté une association qui regroupe une trentaine de sociétés dans les domaines de la technologie, de la finance et de la consommation, et confié l'émission de son futur diem à une banque, Silvergate Bank, domicilié aux Etats-Unis (adieu la Suisse) et spécialisée dans les cryptomonnaies. Le mot d'ordre est clair : America First !

Fortes ambitions dans le paiement

Le wallet et le diem ne sont que les briques d'une ambition forte du réseau social dans le domaine des paiements, manifestée dès 2018. Le groupe avait alors expérimenté une solution de paiement, à l'image d'Apple Pay ou de Google Pay, mais uniquement réservé à l'univers du réseau social. En principe, l'idée est de permettre aux « amis » de faire des dons sur Instagram, de rembourser sur Messenger ou alors, dans un futur proche, faire des achats sur la marketplace de Facebook. En Inde, c'est via sa messagerie WhatsApp que Facebook avance ses pions, envisageant même distribuer des crédits.

En 2020, Facebook décide même de créer une division entièrement dédiée aux paiements, Facebook Financial, sous la houlette de David Marcus, « le deuxième cerveau » de Mark Zuckerberg (dit-on), pour mieux coordonner l'ensemble de ses projets et tenter de créer une véritable ligne de produits.

L'objectif ? Permettre les échanges d'argent entre ses différentes plateformes (Facebook, WhatsApp, Instagram, Messenger) pour rendre ces dernières incontournables dans le quotidien de ses utilisateurs. C'est la vieille tentation du réseau social de faire ses plateformes « des lieux de vie » pour satisfaire tous les besoins des consommateurs en limitant au maximum les frictions du paiement. C'est d'ailleurs cette stratégie qui a permis aux géants Tencent et Alibaba de s'imposer dans la vie des Chinois, au risque d'effrayer les autorités chinoises et de les amener à réagir violemment.

Résultats mitigés

Mais, jusqu'ici, les efforts de Facebook n'ont guère été probants. Les foules sont loin d'être au rendez-vous. L'impression de dispersion des projets et des ressources domine. Alors que Facebook tente de promouvoir le paiement sur WhatsApp en Inde, il se focalise sur Facebook Pay pour conquérir le Brésil. Et les projets de wallet et de diem apportent davantage de confusion que de clarté à la stratégie menée.

De fait, si tout le monde parle du projet diem, Facebook se refuse pour l'heure de concentrer toutes ses ressources sur ce projet. Prudence sur le futur de ce projet ? Ou volonté de capitaliser une grande diversité d'expériences, dans des pays et des environnements complètement différents, notamment du point de vue réglementaire, pour frapper enfin un grand coup ? La réponse n'est pas évidente aujourd'hui.

Haro sur le diem, vive les monnaies digitales !

Une certitude toutefois : le projet libra (puis diem) a soudainement réveillé la torpeur des banques centrales sur le dossier des monnaies numériques. Malgré l'hostilité des banques commerciales, qui y voient un danger pour leur modèle économique (notamment une désintermédiation de la clientèle retail et ses dépôts), toutes les grandes banques centrales mènent désormais leur projet de monnaie numérique de banque centrale (MNBC), que ce soit pour les transactions de gros ou pour les transactions de détail. A une exception près cependant, et de taille, la puissante banque centrale américaine (Fed) reste toujours sur la réserve.

Même la BCE, malgré le mutisme des banques européennes (même si les banques allemandes semblent plus souples sur le sujet), se donne un délai de réflexion de deux ans avant de se lancer à grande échelle sur une MDBC.

La Banque de France est notamment très allante sur le projet d'un e-euro, comme l'a réaffirmé début juillet le gouverneur François Villeroy de Galhau : « nous devons être prêts sinon quoi, nous risquerions une érosion de notre souveraineté monétaire ». Bien plus que Facebook, ce sont les nouvelles ambitions chinoises autour de l'e-yuan, un moyen pour accélérer l'internationalisation du yuan, qui font désormais trembler les banquiers centraux.

Reste que la position de la BCE, tout comme celle de la Fed, apparaît avant tout défensive au regard de nombreuses banques centrales de pays émergents, comme Singapour, qui avancent comme un cheval au galop. La bataille des monnaies numériques n'a pas véritablement commencé mais chacun s'y prépare déjà.

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