Les marchés font de la résistance face à une récession qui se profile

Les marchés actions continuent de progresser en attendant les annonces des banques centrales américaine et européenne mercredi et jeudi. Pourtant, les indicateurs commencent à se dégrader, notamment aux Etats-Unis où le crédit bancaire est en chute libre. Plus prudents, les marchés obligataires anticipent clairement une récession aux Etats-Unis à la fin de l'année.
Les marchés ont intégré l'idée que les banques centrales seront prêtes à intervenir en injectant à nouveau des liquidités à la moindre alerte.
Les marchés ont intégré l'idée que les banques centrales seront prêtes à intervenir en injectant à nouveau des liquidités à la moindre alerte. (Crédits : Reuters)

C'est un étrange climat qui règne actuellement sur les marchés financiers. Les actions se portent au mieux, surtout à Wall Street, avec un indice S&P 500 dopé, il est vrai, par quelques valeurs de technologie, comme Nvidia.

Les investisseurs, pourtant frileux sur les actions, parlent même outre-Atlantique de « bull market » (marché haussier) et se demandent s'il ne faudrait pas reprendre un peu plus de risque. Surfant sur des résultats trimestriels finalement meilleurs qu'attendu, les marchés actions continuent de parier sur le scénario idéal « d'atterrissage en douceur » de l'économie.

Indicateurs en berne aux Etats-Unis

Ce n'est pourtant pas le scénario retenu par les marchés obligataires qui semblent plutôt anticiper une récession aux Etats-Unis. Résultat, les taux longs refluent et l'inversion de la courbe des taux (les taux courts sont plus élevés que les taux longs) s'accentue encore un peu plus, comme un signal d'alerte. Les indicateurs ne sont pas si bons aux Etats-Unis, avec un net ralentissement du crédit bancaire (conséquence logique de la politique de resserrement monétaire) et un marché de l'emploi qui commence à donner des signes de faiblesse, notamment des salaires qui ne progressent plus.

Pause de la Fed

Malgré tout, le S&P 500 poursuit sa hausse lundi et affiche un gain de près de 12% en trois mois. Par rapport à son sommet historique de la fin 2021, l'indice ne cède que 10% alors que la banque centrale américaine a initié depuis le printemps 2022 onze hausses consécutives de taux pour les porter entre 5 et 5,25%, au plus haut depuis 2006. Aujourd'hui, les marchés s'attendent à une pause lors de la prochaine réunion de la Fed de mardi et mercredi prochain, avant un ultime relèvement de 25 points de base en juillet. Il reste cependant une incertitude après l'annonce imprévue du relèvement des taux directeurs des banques centrales du Canada et de l'Australie.

En Europe, les Bourses sont plus prudentes, mais les principaux indices se maintiennent sur des niveaux élevés compter tenu de perspectives de croissance pour le moins médiocres. A Paris, le CAC 40 ne s'écarte pas trop de son pic historique de fin d'avril et se maintient au-dessus des 7.200 points.

Le gain est toujours de 12% depuis janvier et la performance est moins concentrée sur les seules valeurs du luxe. Le consensus table sur une nouvelle hausse de 25 points de base des taux de directeurs de la zone euro lors de la prochaine réunion de jeudi de la Banque centrale européenne (BCE). Le même scénario est attendu en juillet et même une troisième nouvelle hausse de taux en septembre n'est pas exclue. L'inflation est toujours tenace en zone euro et la BCE est partie avec retard dans sa politique de hausse de taux.

Avenir plus sombre sur les actions

« Nous redoutons moins de nouvelles hausses de taux qu'un assèchement des liquidités qui viendraient faire pression sur des multiples de valorisation des actions et sur l'économie. Quand vous avez un crédit bancaire quasiment à l'arrêt aux Etats-Unis, la probabilité d'un rebond économique solide est très faible. C'est pourquoi nous anticipons des croissances proches de zéro aux Etats-Unis sur plusieurs trimestres », avance Frédéric Rollin, conseiller en stratégie d'investissement chez Pictet Asset Management.

La résistance apparente des marchés repose pour l'essentiel sur la résilience de l'économie américaine, qui repose en partie sur le financement de la consommation par l'énorme excédent d'épargne accumulé pendant la crise sanitaire. Mais cette réserve s'épuise vite - plus de la moitié des 2.600 milliards de dollars accumulés a été consommée- et le crédit bancaire ne sera plus présent pour prendre le relais.

A ce jeu, une récession pourrait vite se manifester en fin de d'année ou début de l'année prochaine. Mais peu importe, les marchés ont intégré l'idée que les banques centrales seront prêtes à intervenir en injectant à nouveau des liquidités à la moindre alerte. C'est sur ce pari que les actions parviennent à se maintenir. Et cette fois-ci, les Bourses ne peuvent espérer compter sur la Chine pour jouer le rôle de roue de secours de la croissance mondiale. Elle a désormais un agenda plus géopolitique qu'économique.

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Commentaires 2
à écrit le 13/06/2023 à 18:30
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L'activité des marchés est depuis toujours décorrélée de l'économie réelle , les cours de bourse évoluent , réagissent plus précisément à des événements que seuls quelques initiés sont en mesure de décrypter .

à écrit le 13/06/2023 à 8:31
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"Mais je donne ce conseil à tous les rois et toutes les églises et à tout ce qui est faible par l’age et la vertu, laissez vous donc renverser ! Afin que vous reveniez à la vie et qu'à vous revienne la vertu !" Nietzsche.

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