C'est désormais acquis. Boeing ne livrera pas entre 400 et 450 exemplaires de son 737 MAX cette année. Alors que 2023 devait consacrer la remontée en puissance du constructeur américain, les nouveaux problèmes de qualité annoncés fin août ont sonné le glas de cet objectif ambitieux. Au lieu d'une hausse de cadences pour son avion moyen-courrier pouvant aller jusqu'à 20 % par rapport à l'an passé, Boeing devrait égaler ou légèrement dépasser sa performance 2023 avec 375 à 400 exemplaires livrés. Une contre-performance qui rejaillit directement sur ses résultats, au moment où le groupe dévoile ses chiffres du troisième trimestre ce mercredi.
Jusqu'ici, la position de Boeing était de maintenir son objectif. Comme le rapporte l'AFP, Brian West, directeur financier du groupe, avait ainsi déclaré début septembre : « Nous ne modifions pas cette fourchette (400 à 450 avions) mais je m'attends à ce que l'on soit dans la partie basse ». Depuis, le constructeur a indiqué la nécessité d'étendre les inspections pour quantifier et résoudre ces problèmes de qualité qui touchent la partie arrière de la cloison pressurisée d'une partie de ses 737 MAX. Des malfaçons venues de l'un de ses principaux sous-traitants, Spirit Aerosystems.
Dans un communiqué, Boeing indique qu'il « ne s'agit pas d'un problème immédiat de sécurité des vols et la flotte en service peut continuer à fonctionner en toute sécurité », comme il l'a toujours affirmé jusque-là. Pour autant, « les livraisons et la production à court terme seront affectées pendant que le programme effectue les inspections et les retouches nécessaires, et la société prévoit maintenant de livrer 375 à 400 avions cette année ».
Une annonce attendue
Pour autant, cette nouvelle ne devrait pas surprendre outre mesure les suiveurs du secteur. Un analyste confiant ainsi la semaine dernière à La Tribune que les objectifs de livraisons annuels de 737 MAX étaient déjà « très tendus ». Il se montrait déjà peu confiant quant à leur réalisation avec un mois d'octobre bien parti pour être du même acabit que celui de septembre (15 appareils sur le mois, à peine 70 sur le trimestre).
Pour cet analyste, le problème était antérieur à l'annonce d'inspections supplémentaires sur les 737 MAX, celles-ci pouvant avoir « un impact mineur » ou tout au plus « générer un peu plus de tension » sur la production. L'une des principales craintes pour ces investigations plus poussées dans la chaîne d'approvisionnement est de voir Boeing trouver de nouveaux défauts de qualité chez ses sous-traitants.
Cette séquence arrive alors que Boeing était en passe de remonter à une cadence moyenne de 38 exemplaires mensuels. Cet objectif est néanmoins maintenu pour la fin de l'année, et le passage à 50 par mois à l'horizon 2025-2026. La cadence se poursuit également pour le 787 avec la transition en cours vers 5 avions livrés par mois avant de monter à 10 exemplaires d'ici 2025-2026. L'objectif de 70 à 80 livraisons sur l'année est bien parti, avec 50 appareils remis à leurs clients au cours des neufs premiers mois de l'année contre 9 l'an dernier. Mais la réussite du Dreamliner n'empêche pas le nombre de livraisons total de baisser de 6 % au cours du troisième trimestre par rapport à la même période l'an dernier.
Un impact financier immédiat
Cela se ressent dans les résultats financiers. En dépit d'une hausse de 25 % du chiffre d'affaires à 7,9 milliards de dollars, tiré par la bonne forme des 787, la division Boeing commercial airplanes (BCA) voit sa perte opérationnelle se creuser à 678 millions de dollars sur le trimestre avec les difficultés du 737. Depuis le début de l'année, BCA a perdu 1,7 milliard de dollars, peu ou prou comme en 2022, malgré un chiffre d'affaires de plus de 23 milliards de dollars, en hausse de 40 %.
Pour l'ensemble du groupe, la situation semble meilleure. Malgré des difficultés, Boeing Defense, Space & Security a réduit ses pertes de moitié depuis le début de l'année, tandis que Boeing Global Services continue de performer. Au total, cela donne pour le groupe un chiffre d'affaires de 56 milliards de dollars sur les neuf premiers mois de l'année, en hausse de 20 %, et une perte opérationnelle de 1 milliard de dollars, trois fois inférieure à celle de l'an dernier sur la même période. La perte nette est divisée par deux à 2,2 milliards de dollars.
La mesure la plus inquiétante vient du flux de trésorerie libre, directement touché par le ralentissement des livraisons du 737 MAX. Sur les neuf premiers mois de l'année, il est positif à 1,5 milliard de dollars contre un flux négatif de plus de 800 millions de dollars l'an dernier. En revanche, sur le seul troisième trimestre, il est à nouveau négatif à hauteur de 310 millions de dollars contre près de trois milliards engrangés à la même période en 2022. Malgré cela, Boeing maintient son objectif de générer entre 3 et 5 milliards de dollars de cash sur l'année.
Calhoun se veut rassurant
Dave Calhoun, directeur général de Boeing, s'est ainsi voulu confiant. « Nous continuons à progresser dans notre redressement et, malgré les défis à court terme, nous restons sur la bonne voie pour atteindre les objectifs financiers que nous nous sommes fixés pour cette année et pour le long terme », a-t-il déclaré dans un communiqué avant d'ajouter : « Nous nous efforçons de stabiliser notre chaîne d'approvisionnement et d'améliorer nos performances opérationnelles en augmentant régulièrement nos cadences de production pour répondre à la forte demande. [...] En misant sur la sécurité, la qualité et la transparence, nous continuerons à rétablir notre solidité opérationnelle et financière. »
Le patron de Boeing a également adressé aux salariés afin de rassurer ses troupes : « J'ai entendu des personnes extérieures à notre entreprise se demander si nous avions reculé d'un cran. Je pense que c'est tout le contraire. [...] grâce à la culture que nous sommes en train d'instaurer, nous avons identifié des non-conformités du passé que nous avons désormais la rigueur de trouver et de corriger une fois pour toutes. [...] je suis certain que nous nous souviendrons de cette période comme d'un moment où nous avons pris les mesures nécessaires pour mettre Boeing sur la bonne voie pour l'avenir. »
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