Bourse : quelles nouvelles du match Valeo contre Faurecia ?

Après avoir caracolé en tête des valeurs préférées des investisseurs pendant des années, le titre Valeo traverse depuis un an un important trou d’air. À l’inverse, Faurecia semble en profiter, à la faveur d’une stratégie plus visible mais également grâce à des perspectives de croissance et de rentabilité plus solides.
Nabil Bourassi
Les investisseurs veulent choisir entre Valeo et Faurecia, alors que les deux valeurs offrent de solides perspectives de croissance.
Les investisseurs veulent choisir entre Valeo et Faurecia, alors que les deux valeurs offrent de solides perspectives de croissance. (Crédits : John Schults)

Les marchés font-ils des infidélités à Valeo, en se tournant de plus en plus vers Faurecia ? Si les deux entreprises ne sont pas concurrentes dans la vie réelle - chacune exerçant dans des activités différentes -, elles sont parfois perçues comme rivales dans le panier des investisseurs qui veulent s'exposer au juteux secteur des équipementiers automobiles. Or, jusqu'ici, ils achetaient soit du Valeo, soit du Faurecia, mais rarement les deux... Et c'était surtout du Valeo ! Entre 2013 et son plus haut 2017, son titre s'est envolé de plus de 300% là où Faurecia avait grimpé de "seulement" 100%. En d'autres termes, le groupe emmené par Jacques Aschenbroich, siphonnait les allocations d'actifs des investisseurs au détriment de Faurecia.

Faurecia a calqué son modèle sur celui de Valeo

Il faut dire que Valeo avait tous les atouts pour séduire : croissance constante du chiffre d'affaires, progression ininterrompue de la marge opérationnelle, diversification géographique pertinente, perspectives de croissance à long terme très optimistes plusieurs fois révisées à la hausse. De son côté, Faurecia a mis plus de temps à se restructurer et à adopter une stratégie de croissance rentable, calquant d'ailleurs son modèle sur celui de Valeo.

En matière de rentabilité, Faurecia revient effectivement de loin puisqu'en 2015, sa marge opérationnelle était deux fois moins élevée que celle de Valeo (8%). Et si celle-ci a fortement progressé depuis pour atteindre 6,9% en 2017 (elle était de 3,6% en 2013), elle reste néanmoins un point en-dessous de celle de Valeo. Mais selon les analystes, la progression devrait se poursuivre.

Résultat : depuis un an, Faurecia est de retour dans les paniers des investisseurs qui, du coup, lâchent du lest sur Valeo. En un an, le titre Valeo a décru de près de 17% (une baisse qui s'est accentuée depuis le 1er janvier à -20%). Sur la même période, Faurecia a pris plus de 40% ! À noter toutefois que le titre stagne depuis le 1er janvier. Il n'empêche que la dynamique est là.

Un secteur prometteur

En réalité, ces deux acteurs des équipementiers automobiles ont totalement changé de profil financier et stratégique, et l'heure du choix discriminant semble révolu. D'abord parce que le secteur reste très prometteur.

Les perspectives de croissance en valeur sont supérieures à celles de la croissance en volume, et ce sont les équipementiers qui en seront les principaux bénéficiaires. Ensuite, les équipementiers automobiles pourraient être les grands vainqueurs de la transformation en cours dans l'industrie automobile.

« Les équipementiers auto sont de plus en plus perçues comme des valeurs technologiques, cette nouvelle perception est structurante dans l'approche que nous devons désormais avoir sur ces titres », explique Marco Bruzzo, directeur général délégué de Mirabaud Asset Management.

Selon lui, ces valeurs vont continuer, de fait, "à superformer le secteur automobile". Il faudra alors regarder de près les deux champions français du secteur qui affichent deux profils différents.

« Historiquement, il existe une prime sur le titre Valeo d'environ 11%, à l'inverse, Faurecia accuse une sous-valorisation de 18% par rapport aux multiples du secteur », souligne Marco Bruzzo.

Faurecia en plein rattrapage

Faurecia pourrait ainsi être le titre le plus prometteur puisqu'il devrait profiter de ces perspectives de marché en même temps qu'il va pouvoir rattraper son retard.

« Faurecia a très bien négocié son virage stratégique et largement amélioré la rentabilité de ses opérations, et le titre offre un potentiel intéressant. Le groupe a multiplié les partenariats et acquisitions, ses prises de positions dans les SUV aux États-Unis, sa capacité à désormais battre le consensus comme au premier trimestre, le durcissement réglementaire qui sera favorable à ses activités... L'enjeu pour le management est de continuer à superformer le marché pour réduire cette décote », explique Marco Bruzzo.

En outre, Faurecia a adopté une nouvelle approche de communication en multipliant les réunions d'analystes et en faisant davantage de pédagogie sur ses produits et technologies. Fort de cette meilleure visibilité, les marchés peuvent mieux replacer l'entreprise française dans la dynamique technologique du secteur.

Enfin, les derniers résultats de Faurecia ont renforcé cette perspective. Avec une hausse de 9,3% au premier trimestre, le chiffre d'affaires a battu le consensus d'au moins deux points. Les analystes constatent également que le groupe progresse dans toutes les régions du monde, et ses métiers s'inscrivent tous dans une forte dynamique de marché et de valeur. D'après un analyste bon connaisseur de l'entreprise, la marge opérationnelle de la seule branche Clean Mobility (systèmes de dépollutions) pourrait atteindre 12% à moyen terme et même 15% en 2030, à mesure que les réglementations vont se durcir. "Il est temps d'acheter du Faurecia", nous confiait récemment Patrick Koller, le Pdg.

Valeo, une baisse en trompe-l'oeil ?

Côté Valeo, pas de quoi paniquer ! La contre-performance de ces douze derniers mois pourrait bien être un trompe-l'oeil. « Valeo traverse une année de transition qui ne remet pas en cause ses fondamentaux, au contraire, il faut voir sa contre-performance depuis un an comme une opportunité à moyen terme », rappelle Marco Bruzzo, avant d'ajouter:

« Chez Valeo, le pire est passé (...) Son modèle de croissance rentable n'est pas cassé ».

Ainsi, les perspectives de croissance du groupe Valeo restent 700 points de base au-dessus de celles attendues pour l'ensemble du marché automobile sur les cinq prochaines années. Cette hypothèse est très confortable, mais elle est également au-dessus de celle anticipée pour Faurecia qui s'inscrit à 500 points de base au-dessus du secteur.

« Valeo est le meilleur moyen de se positionner sur l'électromobilité européenne, et le potentiel est immense (...) La JV avec Siemens est tout à fait prometteuse », rappelle Marco Bruzzo.

Le groupe français s'est effectivement allié avec l'Allemand pour développer des technologies de propulsion à haute tension. Le carnet de commandes de la coentreprise est passé de 6 à 10 milliards d'euros en seulement un an (2017). Elle pourrait ainsi largement contribuer à la croissance du chiffre d'affaires de Valeo en le portant à 35 milliards d'euros (JV incluse) soit plus de deux fois celui enregistré en 2016.

Deux valeurs à fort potentiel

En résumé, Valeo et Faurecia offrent des potentiels de croissance appréciables. Discriminer l'un contre l'autre semble difficile tant Faurecia repart de l'avant et que Valeo garde un vrai gisement de croissance.

Ils devront néanmoins poursuivre leur politique d'innovation dans un contexte où tout s'accélère que ce soit dans l'intelligence artificielle (pour Valeo), ou l'hydrogène sur laquelle Faurecia mise beaucoup, et même dans l'électromobilité avec une nouvelle génération de batteries électriques. Au-delà, ces valeurs pourraient tirer d'autres acteurs dans leur sillage comme Plastic Omnium, et dans une moindre mesure Michelin qui reste encore structurellement exposé aux matières premières.

Nabil Bourassi

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