« Dieselgate » : l'ancien PDG d'Audi condamné, premier dirigeant de Volkswagen à écoper d'une sanction pénale

Rupert Stadler est condamné à 21 mois de prison avec sursis et à une amende de 1,1 million d'euros à l'issue de son procès déterminant sa responsabilité dans l'affaire du « Dieselgate ». Pour rappel, l'ancien patron d'Audi avait décidé de plaider coupable après plus de deux ans de procès. Il était accusé d'avoir eu connaissance de l'installation de logiciels illégaux sur les véhicules du groupe Volkswagen, sans être intervenu pour y mettre un terme.
Rupert Stadler, un financier de formation, n'est pas accusé d'être l'instigateur de la fraude mais d'avoir eu connaissance de l'installation de logiciels illégaux et de n'avoir rien fait pour y mettre fin.
Rupert Stadler, un financier de formation, n'est pas accusé d'être l'instigateur de la fraude mais d'avoir eu connaissance de l'installation de logiciels illégaux et de n'avoir rien fait pour y mettre fin. (Crédits : POOL)

[Article publié le mardi 27 juin 2023 à 10h40 et mis à jour à 13h56] C'est l'épilogue, après deux longues années de procès à Munich. L'ancien PDG d'Audi a été condamné en Allemagne à 21 mois de prison avec sursis dans l'affaire du « Dieselgate », ainsi qu'à une amende de 1,1 million d'euros, ce mardi 27 juin. Rupert Stadler devient ainsi le premier dirigeant du groupe Volkswagen à écoper d'une sanction pénale dans le scandale des moteurs diesel truqués. Vêtu d'un costume bleu sombre et d'une chemise blanc col ouvert, Rupert Stadler n'a pas montré de réaction à l'énoncé de sa peine. Le procès aura nécessité « plus de 170 jours d'audience » avec « plus de 190 témoins entendus et plus de 1.400 documents lus », a détaillé Laurent Lafleur, porte-parole au tribunal.

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Le « Dieselgate » a provoqué un scandale mondial et lourdement entaché la réputation de l'industrie automobile allemande. En 2015, à la suite d'accusations de l'agence environnementale américaine (EPA), Volkswagen avait reconnu avoir équipé 11 millions de moteurs de type « EA 189 » sur ses véhicules diesel d'un logiciel capable de les faire apparaître comme moins polluants lors de tests en laboratoire et sur les routes. Le groupe Volkswagen a dû payer depuis plus de 30 milliards d'euros en remboursements, dédommagements et frais judiciaires, dont le plus gros aux États-Unis.

Des dommages chiffrés à 69 millions d'euros

Rupert Stadler, un financier de formation, n'est pas accusé d'être l'instigateur de la fraude mais d'avoir eu connaissance de l'installation de logiciels illégaux et de n'avoir rien fait pour y mettre fin.  Le manager de 60 ans a eu « au plus tard » en juillet 2016 une « connaissance établie » de l'installation de logiciels illégaux sur des modèles de la marque Audi et VW, mais sans avoir pris les « mesures nécessaires » pour cesser leur commercialisation, a détaillé le juge Stefan Weickert lors de la lecture du jugement.

Initialement, l'ancien cadre avait contesté les faits reprochés tout au long de son procès qui s'est ouvert en septembre 2020. L'ancien patron de la firme aux anneaux entre 2007 et 2018, filiale de Volkswagen, avait finalement décidé de plaider coupable, afin de bénéficier d'une peine moins lourde que les dix ans de prison encourus. Devant les juges, Rupert Stadler a ainsi avoué avoir eu connaissance courant 2016 de valeurs d'émission des voitures diesel susceptibles d'être manipulées et avoir laissé leur commercialisation se poursuivre en Allemagne jusqu'à début 2018. Il a ainsi pu éviter une peine qui pouvait atteindre jusqu'à dix ans de prison. Il avait effectué 4 mois de détention provisoire en 2018.

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L'accusation a estimé que l'ancien PDG avait causé des dommages à hauteur de 69 millions d'euros, correspondant à la commercialisation à tort de 26.546 véhicules pendant la période incriminée. Les deux coaccusés de Rupert Stadler, un ancien directeur chez Audi et Porsche, Wolfgang Hatz, et son bras droit chez Audi, Giovanni Pamio, ont eux avoué avoir manipulé des moteurs de véhicules pour que les valeurs légales de gaz d'échappement soient respectées lors d'essais sur un pont, mais pas sur la route.

Il ont été condamnés mardi respectivement à deux ans de prison avec sursis assortis d'une amende de 400.000 euros pour le premier et 21 mois de prison avec sursis assortis d'une amende de 50.000 euros pour le second. La procédure de plaider-coupable et la relative mansuétude des peines proposées par le tribunal ont suscité des critiques en Allemagne au regard de l'ampleur de l'affaire.

D'autres volets judiciaires restent ouverts

Si Rupert Stadler est le premier haut dirigeant du groupe Volkswagen à être condamné dans le scandale, son procès laisse désormais plusieurs questions sans réponse : qui a initié la fraude ? Quels autres dirigeants de Volkswagen étaient au courant et ont laissé la fraude perdurer ?

Les yeux se tournent vers le tribunal de Brunswick (nord), non loin du siège historique du constructeur, où un autre grand procès pénal a démarré en septembre 2021, impliquant quatre anciens responsables de Volkswagen accusés de fraude. Des audiences sont prévues jusqu'en 2024 et toujours sans le principal accusé, l'ancien PDG du premier constructeur européen à l'époque du scandale, Martin Winterkorn, dispensé de procès pour raison médicale. Des investisseurs réclament par ailleurs réparation en justice, alors que le titre de VW s'était effondré de quelque 40% dans les jours suivant l'éclatement du scandale.

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D'autres volets judiciaires restent ouverts, comme en France où la cour d'appel de Paris a confirmé en mars la mise en examen pour tromperie aggravée de Volkswagen. L'Allemand n'est pas seul ici, les constructeurs Renault, Peugeot, Citroën et Fiat-Chrysler ayant aussi été mis en examen mi-2021. Les scories de son sulfureux passé vont encore accompagner un moment le premier constructeur européen dirigé aujourd'hui par Oliver Blume, un dirigeant venu de la filiale Porsche pour mener la transition du groupe vers l'électrique et résister à la monter en puissance des concurrents chinois.

(Avec AFP)

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Commentaires 2
à écrit le 27/06/2023 à 12:31
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Et en France, la justice en est où ? Parce que les allemands vont vite et fort, la CJUE confirme, mais chez nous c'est la justice version oui oui (mais ça fait bien longtemps que la justice a plusieurs vitesses en France).

à écrit le 27/06/2023 à 10:53
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La désastreuse faiblesse de l'UE qui incapable de punir les véritables responsables de cette tricherie que sont les propriétaires de ces entreprises, s'en prennent à leurs larbins qui en plus s'en sortent bien. Bienvenu en UERSS empire prévu pour dur...

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