L'interdiction de la vente des voitures thermiques en 2035 peut-elle être reportée ?

SPECIAL EUROPEENNES - 1/15. Plusieurs candidats aux élections européennes veulent revenir sur l'interdiction de la vente des véhicules thermiques neufs en 2035. Une clause de revoyure pour faire un premier bilan aura lieu en 2026. Mais il est peu probable que cette décision soit reportée, tant sont astronomiques les investissements en jeu du côté de l'industrie automobile.
En tout, environ 100 milliards d'investissements sont engagés en Europe pour la transition vers l'électrique sur les 3 prochaines années, estime Luc Chatel, le président de la PFA.
En tout, environ 100 milliards d'investissements sont engagés en Europe pour la transition vers l'électrique sur les 3 prochaines années, estime Luc Chatel, le président de la PFA. (Crédits : DR)

Au 1er janvier 2035, plus aucune voiture à essence, diesel ou hybride neuves ne sera commercialisée en Europe. Une décision adoptée depuis 2022 par le Parlement et les Etats membres. Avant les élections européennes qui se tiendront le 9 juin prochain, plusieurs partis ont exprimé leur opposition à cette mesure. C'est le cas des Républicains, du Rassemblement national ou encore de Reconquête en France. Avec eux, les partis populistes d'Italie comme Fratelli d'Italia ou la Ligue, Vox en Espagne ou encore AFD en Allemagne refusent cette interdiction. Plusieurs membres du PPE, le parti majoritaire sortant pourtant à l'origine de cette mesure ont également exprimé un avis défavorable à l'image du candidat tête de liste des Républicains, François-Xavier Bellamy, qui évoquait « une décision dramatique » au micro de Jean-Jacques Bourdin il y a deux semaines.

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« On n'est pas contre la voiture électrique mais sans que cela ne passe par l'interdiction obligatoire de la voiture thermique. Il faut d'abord une adaptation », a justifié Aleksandar Nikolic, conseiller régional sur la liste du Rassemblement National lors d'une conférence organisée par la Plateforme de l'automobile (PFA), principal syndicat du secteur, cette semaine. Une clause de revoyure est prévue pour 2026 avec tous les Etats membres pour faire un point d'étape sur l'objectif de 2035.

Une annulation peu probable

« Personne n'a réellement pensé que cette clause serait activée, c'était plutôt pour calmer l'opposition au moment de faire passer la loi. Si elle est activée, alors ce sera soft. Par exemple, décaler la date butoir de deux ans », avance Bernard Jullien, économiste spécialisé dans l'automobile. Le patron de Renault, Luca de Meo, n'était pas contre un report, estimant qu'« initialement, nous aurions souhaité plutôt une cible à 2040 pour nous laisser le temps de construire une chaîne de valeur capable de concurrencer les constructeurs chinois qui disposent d'une génération d'avance », avait-il déclaré dans un entretien à La Tribune il y a un an.

Néanmoins, Luca de Meo s'est dit prêt pour 2035, tout comme Vincent Salimon, directeur de BMW France : « nous vendons actuellement 25% de nos voitures en électrique, et l'interdiction n'est que dans 11 ans ».

Même son de cloche du côté du syndicat allemand IG Metall, pourtant défavorable à cette mesure en premier lieu. « L'interdiction de 2035 n'est pas la bonne solution », a renchéri le principal syndicat allemand automobile IG Metall, « il faut mettre fin au chaos des nouvelles directives. »

Plusieurs centaines de milliards en jeu

Et c'est bien de la visibilité que réclament les constructeurs automobiles et la plupart des gros acteurs du secteur.

« Ce que je demande, c'est de la stabilité ! Arrêtez de changer les règles, ou de laisser penser qu'elles pourraient changer », avait imploré Carlos Tavares, le directeur général de Stellantis, lors d'une visite d'usine à Metz il y a quelques semaines. Pourtant, le dirigeant portugais s'était montré l'un des plus réticents à cette interdiction, réclamant une neutralité technologique et appelant Bruxelles à sortir du dogmatisme. Mais désormais, les constructeurs ont mis tellement d'argent sur la table pour cette transition industrielle qu'aucun retour en arrière n'est envisageable.

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« J'ai lancé mon avion à pleine puissance sur la piste d'envol, il ne faut pas couper les réacteurs maintenant, sinon l'avion tombe », a imagé le directeur général de Stellantis.

« Rester avec les deux options - thermiques et électriques - pendant une longue période n'est pas tenable car cela entraîne trop de surcoût dans la dispersion des volumes  », explique Bernard Jullien. En tout, environ 100 milliards d'investissements sont engagés en Europe pour la transition sur les 3 prochaines années, estime Luc Chatel, le président de la PFA.

La clause de 2026 pour obtenir plus d'aides des Etats ?

« La clause de 2026 peut en revanche permettre d'obtenir davantage des Etats », anticipe Bernard Jullien, notamment des aides publiques pour l'achat de véhicules électriques. Les membres de l'Union européenne affichent des règles différentes, qui exaspèrent les constructeurs et les consommateurs. A titre d'exemple, l'Allemagne a supprimé ces aides à l'achat de véhicules électriques neufs du jour au lendemain, la France les a orientées pour les véhicules les moins polluants et l'Italie a choisi de les axer sur les véhicules hybrides et électriques, rien que pour cette année.

Les discours populistes sur le renoncement à l'interdiction de 2035 servent plutôt à rassurer les consommateurs alors même que le marché des véhicules électriques stagne en Europe. Depuis le début de l'année et après une croissance fulgurante pendant trois ans, la part des électriques reste stable en avril, à 11,9% par rapport à l'année dernière. Et reste bien inférieure aux 14,6% de part de marché enregistrés sur toute l'année 2023. En Italie, elle est même en recul.

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Il faudra donc redoubler d'effort pour faire adopter la voiture électrique et atteindre l'objectif de la neutralité carbone à horizon 2050. Au-delà de la date de 2035, d'autres mesures ont été avancées par les candidats aux Européennes, comme le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières étendu à l'automobile ou encore des droits de douane plus élevés, en particulier pour restreindre les véhicules venus de Chine, autre grande préoccupation du secteur automobile actuel.

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Commentaires 31
à écrit le 28/05/2024 à 9:21
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Prendre des décisions pour dans 11 ans c'est un peu prématuré, mais il fallait fixer une date.

à écrit le 27/05/2024 à 18:43
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La question est plutôt: il y aura t-il de l'électricité pour tout le monde et à quel cout ? Quant aux batteries si elles étaient interchangeables il y aurait moins de durée pour faire le plein. Encore un truc gérer magnifiquement par des financiers..

à écrit le 27/05/2024 à 18:22
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Nous voulons suicider notre économie et notre mode de vie. ce dogmatisme parisien et des grandes villes qui n'ont rien à faire des personnes qui ont besoin de se déplacer en province. J'aimerai que ceux qui veulent supprimer les voitures thermiques s...

à écrit le 27/05/2024 à 17:49
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Mettre en cause l'UE ou Macron c'est ignorer que tous les états qui ont des constructeurs sur leurs sols : usa , chine , japon les subventionnent massivement à coup de milliards pour développer des VE , Ford, Toyota etc... .

à écrit le 27/05/2024 à 16:32
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C'est trop tard pour revenir en arrière et ça pourrait juste ralentir la mise en place de l'infrastructure, ce qui serait néfaste. On pourra lever l'interdiction seulement parce que ça n'aura pas d'effet. En 2030 les voitures électrique coûteront déj...

à écrit le 27/05/2024 à 16:27
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Décidemment, nous avons, "aux affaires", les mêmes tristes rigolos qu'en France. Il serait temps de prévoir de lourdes sanctions financières pour ces décisions qui mettent en danger la survie économique d'un demi milliard d'européens. Les finances pu...

à écrit le 27/05/2024 à 13:22
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Pas reportée non. Mais amendée. A la manière dont l'ont été les ZFE en France. Ou le 80 km/h. Ou le nucléaire. C'est toujours comme ça quand on prend des décisions stupides. On trouvera bien une présentation, un bilan, un argument quelconque pour vid...

à écrit le 27/05/2024 à 11:22
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Il n'y aura pas de retour en arrière par contre je penses que, comme j ele pense depuis le début, ils vont reporté à 2045 et vony y inclure les hybrides lorsqu'ils verront que ce n'est pas possible en voyant tous les retards.

le 27/05/2024 à 13:55
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Je n'ai jamais compris pourquoi ils ont supprimé les hybrides, c'est la meilleure approche pour passer au tout électrique.

le 27/05/2024 à 15:20
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@isigny - Par pure idéologie, l'ADEME a d'ailleurs œuvrée en ce sens avec les ONG pour défendre l'idée que les véhicules hybrides rechargeables seraient inutiles car rarement rechargés, en appuyant leur argumentation sur l'usage des véhicules d'entre...

à écrit le 27/05/2024 à 11:21
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Il n'y aura pas de retour en arrière par contre je penses que, comme j ele pense depuis le début, ils vont reporté à 2045 lorsqu'ils verront que ce n'est pas possible en voyant tous les retards.

le 28/05/2024 à 7:15
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Un retour en arrière est tout à fait possible, simplement maintenant ce sont les constructeurs qui veulent continuer car ils ont fait des investissements dans l´électrique. Pourtant ils devraient aussi voir que s´ils perdent le savoir-faire sur le th...

à écrit le 27/05/2024 à 11:04
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Deux observations; -Les constructeurs et les grands équipementiers ont déjà trop investi pour repousser l'échéance d'autant que certains ont déjà programmé l'arrêt de voitures thermiques dès 2030 . -En ce qui concerne les véhicules thermiques achet...

à écrit le 27/05/2024 à 10:21
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☠️ L'UNION EUROPÉENNE NOUS CONDUIT À LA RUINE 🤓📉🤪📉💀 ‼️ Face aux partis et aux technocrates francophobes, francosceptiques et atlantistes, l'UPR de François Asselineau prône le FREXIT, la sortie de l'otan et la sortie de l'euro 🇲🇫🕊️📈🚀🙂

le 27/05/2024 à 11:21
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L'UPR nous fera toujours rire !

à écrit le 27/05/2024 à 9:52
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Les voitures thermiques neuves achetées en 2034 seront autorisées à rouler ainsi que les voitures d'occasion. Une voiture bien entretenue peut durer très longtemps. Les risques objectifs sont du côté de la disponibilité des pièces et de l'évolution...

le 27/05/2024 à 11:08
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Oui à condition que les fournisseurs de carburant et autres pièces de rechange ne créent pas la pénurie .Exemple Totalenergie investit massivement dans l'installation de bornes de recharge électriques et pourrait aussi réduire la distribution de carb...

le 27/05/2024 à 11:12
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Sauf qu'en 2034, les constructeurs auront fait disparaître leurs modèles thermiques depuis bien longtemps (déjà en cours sur certains modèles). On arrive bien à transformer une voiture d'occasion en voiture électrique (rétrofit). Les constructeurs pe...

à écrit le 27/05/2024 à 9:45
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10 ans avant la date fatidique, on sent bien que l’objectif de 2035 pour ne plus produire de véhicules à moteur thermique en Europe sera remis en question et modifié….. Et quid des camions, des tracteurs, des véhicules militaires, et des outils diver...

à écrit le 27/05/2024 à 9:36
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Complètement idiots nos députes quand ils pénalisent le pauvre gars qui va au boulot avec sa voiture ancienne alors que la pollution vient surtout des loisirs Venez faire un tour AU MANS 24h voitures 24h camions 24 karting 24 h voitures anciennes ...

à écrit le 27/05/2024 à 9:11
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On peut rappeler que pour fabriquer une batterie électrique, il faut donc l'équivalent de la consommation d'eau de 500 personnes pendant un an.

à écrit le 27/05/2024 à 9:09
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On s'est tiré une balle dans le pied, car on a pas oser prévoir d'interdire la revente des véhicules thermiques d'occasion, donc on importera des véhicules d'occasions qui seront mis en vente. Bref il vaut mieux faire marche arrière rapidement , et c...

le 27/05/2024 à 12:23
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Exact. Sans l'interdiction de revente des voitures d'occasion, l'interdiction portant sur les voitures neuves en 2035 n'est qu'une demi-mesure. Mais on peut tout à fait ajouter cette clause à la loi : on a 18 ans pour le faire. Ainsi quelqu'un qui di...

à écrit le 27/05/2024 à 8:40
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Tout l'intérêt serait d'avoir moins de véhicule sur les routes au lieu de transformer le parc en élèctrique ! Mais non...! On veut que la consommation ne se tarisse pas... il y a trop de fric en jeu !

le 27/05/2024 à 9:18
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"avoir moins de véhicule sur les routes" il faut que les gens restent beaucoup plus chez eux, c'est quoi cette bougeotte ? Surtout dans les campagnes où y a rien, il faut se déplacer 'souvent' en ville (école, courses, médecin, sport, bibliothèque, ....

le 27/05/2024 à 13:05
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Je pense au contraire que c'est bien l'objectif recherché, sans le dire vraiment. D'abord le parc stagne aujourd'hui, le nombre de candidats au permis de conduire baisse, les prix des VE augmentent et l'accès à l'automobile a commencé de baisser. Plu...

à écrit le 27/05/2024 à 8:32
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Ben surtout qu'on ne voit pas de parti politique être en mesure à s'opposer à l'UERSS empire prévu pour durer mille ans, le RN avoue sa vassalité également en ce moment, à demi mots mais ils sont obligés de commencer )à nous préparer à la même politi...

à écrit le 27/05/2024 à 7:59
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Les consommateurs n'en veulent pas de ces voitures électriques. Autonomie encore limitée, usure des batteries, très forte décote sur le marché d'occasion... La voiture hybride ou thermique légère auraient été des alternatives intéressantes. Mais nos ...

le 27/05/2024 à 9:30
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"Autonomie encore limitée" ça le sera toujours, avec 1000km vous trouverez que ça ne suffit pas, 2000km non plus (le progrès devrait faire dépasser le pétrole). Avec les batteries "solides" plus légères ça devrait permettre de rouler plus [à vérifier...

à écrit le 27/05/2024 à 7:33
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On s'achemine doucement, mais sûrement vers "un retard de construction" fréquent dans ce genre de chantier. Pas de quoi en faire un fromage !

à écrit le 27/05/2024 à 7:23
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Quand on prend un pb sous l'angle de la bave morale donc tolérante donc de gauche, on arrive tjs à une catastrophe... alors advienne que pourra mais faudra se garder chouineries et indignation

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