Voiture électrique : Ampere, le pari risqué de Renault

Le Capital Market day d'Ampere, l'événement consacré à la filiale regroupant les activités électriques et logicielles de Renault, a lieu ce mercredi 15 novembre. À cette occasion, le groupe dévoilera la stratégie d'Ampere qui entrera en Bourse au printemps prochain. La valorisation de cette entité devrait permettre des investissements importants dans l'électrique. Néanmoins, cette introduction en Bourse pourrait pénaliser la valeur du groupe. Explications.
Luca de Meo, le directeur général de Renault, prévoit une valorisation d'Ampere entre 8 et 10 milliards d'euros.
Luca de Meo, le directeur général de Renault, prévoit une valorisation d'Ampere entre 8 et 10 milliards d'euros. (Crédits : Reuters)

En lançant Ampere, Renault joue gros. Et, à quelques mois de l'introduction en Bourse « si les conditions le permettent » de cette nouvelle entité, qui regroupe les activités électriques et logicielles de l'entreprise française, le groupe a décidé de consacrer ce mercredi la totalité de son « Capital Market day » à ce projet crucial pour son avenir. L'objectif est double : rassurer les investisseurs sur le futur de cette entreprise qui doit réunir 10.000 employés du groupe Renault et développer la notoriété de la nouvelle entité créée le 1er novembre dernier et séparée des autres filiales du groupe que sont  Power (véhicules thermiques), The future is neutral  (recyclage),  Mobilize (services de mobilités) et Alpine (haut de gamme).

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Pour expliquer ce choix de la segmentation, Luca de Meo, le directeur général de Renault et PDG d'Ampere, a rappelé sous la métaphore sportive qu'il est préférable d'avoir « 5 athlètes spécialisés et très performants dans chaque sport plutôt que d'avoir un décathlonien ».

En réalité, cette introduction en Bourse permettra surtout de valoriser cette entreprise au même titre que d'autres constructeurs spécialisés dans l'électrique et les technologies comme Tesla ou encore le Vietnamien Vinfast. Ainsi, Renault espère attirer suffisamment d'investisseurs pour lever une quantité importante d'argent afin d'accélérer sur les deux secteurs stratégiques clés que sont l'électrique et la digitalisation des véhicules. Pour rappel, Tesla est aujourd'hui valorisé autour de 700 milliards... contre seulement 10 milliards pour Renault !

Une valorisation revue à la baisse

Mais Renault n'est pas Tesla. Luca de Meo espère, de son côté, une valorisation d'Ampere « entre 8 et 10 milliards d'euros », avait-il annoncé au Financial Times en septembre dernier, soit l'équivalent de Renault actuellement. Pour les analystes en revanche, la valorisation atteindra à peine les 5 milliards d'euros.

« Au démarrage, cette entrée en Bourse était vue positivement en disant que cela pourrait donner de la clarté au groupe. Désormais, les marchés sont dubitatifs à cause du contexte géopolitique et des ventes de l'électrique qui se tassent. Il est fortement possible que la valorisation soit en dessous de ce qui est attendu », confirme à La Tribune un analyste, en précisant que « l'effet de cette valorisation ne sera pas immédiat et prendra au moins un an ».

À terme, ces investissements permettront de financer les prochains projets de Renault dans l'électrique, en particulier les 4 modèles déjà annoncés comme la Mégane E-Tech, le Scénic ainsi que les Renault 5 et Renault 4.

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Les revers d'Ampere

Pour rassurer les investisseurs, les participations des partenaires ont été annoncées ces derniers mois. Le géant Américain Qualcomm, avec lequel travaille Renault pour la partie digitale du véhicule, est annoncé pour entrer dans le capital d'Ampere. Aussi, Mitsubishi mettra au maximum 200 millions d'euros sur la table tandis que Nissan ne dépassera pas 600 millions d'euros, deux fois moins que ce qu'espérait Luca de Meo.

Au-delà du risque de dévalorisation d'Ampere, qui conduirait à une réduction des financements des projets de Renault, la création d'une entité uniquement liée à l'électrique peut également désorienter les marchés.

« L'introduction d'Ampere en Bourse peut donner l'impression qu'Ampere et Renault ne font qu'un, et que le reste des entités du groupe n'a pas de valeur. Or, le risque est que la seule valorisation d'Ampere au regard du marché actuel ne soit pas à la hauteur des investissements du groupe », prévient un analyste.

Le statut de constructeur automobile historique de Renault ne lui permettra jamais d'être valorisé à des niveaux aussi hauts que ceux de Tesla, selon les experts, même en créant une entité dédiée aux nouvelles technologies.

« Ampere est une opération de communication pour les marchés. Mais le groupe a tout intérêt à rester intégré, avec une porosité des compétences et des connaissances entre l'électrique et le thermique. Le fait d'avoir un seul navire amiral lui permet de gérer les innovations et les coûts car une grande partie de la voiture électrique est la même que la voiture thermique », souligne l'économiste Bernard Jullien.

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Renault pourrait devenir un pionnier

Côté Renault, on tente de rassurer. Ampere ne sera pas totalement séparé. Les salariés resteront sur la même convention collective et auront les mêmes conditions que ceux du reste du groupe, nous confirme-t-on du côté des ressources humaines. Pour preuve, c'est Luca de Meo, le directeur général de Renault, qui dirigera également Ampere, souligne-t-on. Autre poste à cheval sur les deux groupes, celui de Josep Maria Reccasens, le directeur de la stratégie de Renault.

Ampere vise plus de 30 % de croissance annuelle dans les huit prochaines années, à mesure que le marché européen de l'automobile s'électrifie. L'entité ambitionne aussi de réduire ses coûts « de 40% par voiture pour la prochaine génération de véhicules d'ici 2027 et au-delà », notamment en améliorant « la productivité de la fabrication aux meilleurs niveaux, atteignant moins de 10 heures de temps de production par véhicule », avait indiqué le groupe Renault dans un communiqué en juin.

Avant Renault, aucun constructeur automobile n'a officiellement scindé ses activités en deux entités valorisées en Bourse. En revanche, cette action a déjà été menée à bien dans d'autres secteurs comme en hôtellerie avec la scission des activités du groupe Accor ou encore dans les télécoms. Pour l'analyste : « Renault est le pionnier dans son secteur, il est clair que tous les autres constructeurs vont regarder attentivement cette entrée en Bourse. Cela peut être les prémices d'un futur mouvement d'ampleur dans les prochaines années.  »

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Commentaires 2
à écrit le 15/11/2023 à 9:40
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Ne rien faire ou ne pas evoluer est l'assurance de végéter et de disparaître. C'est valable pour toute activité.

à écrit le 15/11/2023 à 7:30
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Bonjour, avant toute chose les industries ne doivent pas nous prendre poyr des américains, ils doit etre possible de fabriquer une voiture électrique a un prix raisonnable. Ensuite, l'électricité s'est bien, mais faut ils encore recyclé les batt...

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