Dans la métropole nantaise, les objectifs inscrits au PLH (plan local de l'habitat) sont de 2.000 nouveaux logements par an à minima... Quand la demande locative s'élève, elle, à 39.000 personnes (soit 1.000 à 1.500 demandeurs supplémentaires par an). Afin d'y répondre tout en luttant contre l'étalement urbain, une piste semble faire l'unanimité : la surélévation.
« Nous vivons une crise de la production nationale et Nantes ne fait pas exception. Dans ce contexte, la surélévation est une des réponses à la crise du logement que l'on vit aujourd'hui. C'est une solution qui a des atouts puisqu'elle répond à la raréfaction du foncier et elle s'inscrit dans une logique de décarbonation de nos activités, car il ne s'agit pas de démolir pour reconstruire, mais d'utiliser l'existant. C'est aussi un moyen de redynamiser certains quartiers », est d'avis Cyrille Gallez, directeur du développement et de la construction de La Nantaise d'Habitations qui gère un parc locatif de 13.800 logements en Loire-Atlantique. 87% du parc est sur la métropole nantaise.
Didier Mignery, architecte et président d'UpFactor (solution qui scanne les bâtiments) embraye :
« C'est une des réponses assez pertinentes du moment dans une vision de sobriété foncière. C'est un moyen de faire de la densité douce. De plus, les opérations de surélévation sont régulièrement accompagnées de travaux de rénovation ».
Une expérimentation « test »
La Nantaise d'Habitations qui envisage de poursuivre le développement de son offre locative sociale tout en étant alignée avec le ZAN (objectif de Zéro Artificialisation Nette créé par la loi Climat et Résilience) étudie actuellement la possibilité de surélévation de ses résidences à Nantes et sa première couronne.
26 de ses 435 résidences ont été présélectionnées par les équipes techniques de La Nantaise d'Habitations et scannées par UpFactor. Ce dernier a développé un logiciel qui détecte les potentiels de surélévation en collectant des données, comme la hauteur des bâtiments et la forme des toits, croisées avec quatre règles d'urbanisme (hauteur, gabarit (décroché de toitures), distance entre les bâtiments, limites séparatives). Ce qui permet ensuite de « révéler les restes à construire, bâtiment par bâtiment, et de montrer les opportunités de création de mètres carrés pour ensuite prioriser les actions », explique Didier Mignery.
Au terme de cette première intervention, 17 résidences ont été identifiées comme ayant « un potentiel théorique de surélévation ». Cyrille Gallez ajoute :
« La moyenne de nos opérations est de 15 logements. Il n'y a donc pas ici d'intérêt à faire de la surélévation pour un ou deux logements supplémentaires. Un premier filtrage nous a ainsi permis d'étudier le potentiel de faisabilité selon les règles du PLU.»
Au final, une expérimentation « test » va être menée sur trois résidences bâties entre les années 90 et 2000, comprenant une soixantaine de logements chacune, avec des typologies différentes (toit terrasse, toitures). « Cette étude nous permettra de lever avant tout des freins techniques pour confirmer ou non la faisabilité de surélévation. » L'objectif étant de construire un ou deux étages de plus, soit 20 à 30 logements supplémentaires par résidence.
Pour le bailleur nantais, le but sera aussi de chiffrer le montant de l'investissement en sachant que le coût de la surélévation est « 15% à 20% plus cher » que la construction neuve, d'après UpFactor.
La restitution de son étude est attendue pour la fin d'année ou début 2024. La Nantaise d'Habitations sélectionnera alors la résidence qui sera le premier démonstrateur à faire l'objet d'une surélévation, avant un dépôt des permis de construire en 2024, le lancement des travaux l'année d'après et la livraison en 2026.
Une solution qui a le vent en poupe
D'après Didier Mignery, 10% du parc bâti pourrait bénéficier d'une surélévation en France. À Lyon, par exemple, UpFactor dit avoir accompagné la métropole sur une analyse à grande échelle des potentiels de surélévation du parc social. Des filiales du groupe Action Logement, comme Alliade, se seraient d'ailleurs engagées dans des démarches projets.
D'autres collectivités se montreraient intéressées pour faire de la surélévation. C'est le cas de l'Eurométropole de Strasbourg et de la collectivité de Saint-Nazaire (Loire-Atlantique). Et dans une grande métropole comme Paris ? « D'après une étude menée en 2015, l'Atelier d'Urbanisme Parisien (APUR) a estimé que 10.000 immeubles pouvaient faire l'objet d'une surélévation. Dans le cadre du nouveau PLU bioclimatique, qui entrerait en vigueur en 2025, la surélévation est un outil mis en avant par les services de l'urbanisme pour créer du logement à Paris », indique Didier Mignery, selon qui une étude va être engagée avec l'APUR pour tester ce gisement.
« Cette solution de la densification douce par la surélévation apparaît comme une solution à ne plus négliger. »
UpFactor dit avoir également signé avec les villes de Bordeaux, Rennes et Montpellier.
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