La ministre du Logement aurait dû s'y attendre. Après s'être déclarée, mardi dernier, « ouverte », si nécessaire, à des « ajustements » sur « les contenus et les délais » de la nouvelle réglementation environnementale ''RE2020'', Emmanuelle Wargon vient de recevoir, ce 12 janvier 2021, une lettre des huit organisations représentant la construction. Ils y demandent un report de l'entrée en vigueur au 31 mars 2022, soit près de neuf mois après la date initialement prévue.
Le BTP soumet quinze « ajustements essentiels »
Dans cette missive que La Tribune a consultée, également adressée à la ministre de la Transition écologique Barbara Pompili, la filière constate une « traduction malheureuse et probablement trop technocratique d'une partie des mesures proposées » et soumet quinze « ajustements essentiels » aux deux membres du gouvernement Castex.
« Les documents présentés par le gouvernement n'apportent pas, à ce jour, les éléments d'objectivation nécessaires à l'évaluation de la soutenabilité des performances annoncées, notamment en termes de maîtrise des surcoûts et d'impact sur les filières constructives », dénoncent l'USH, la FPI, le Pôle Habitat FFB, la FFB, la Fédération SCOP BTP, la CAPEB, l'UNSFA et l'UNTEC.
Vers une aggravation de la construction neuve ?
Pour l'Union sociale pour l'habitat (USH), qui représente le monde HLM, la Fédération des professionnels de l'immobilier (FPI), la Fédération française du bâtiment (FFB), les SCOP du BTP, la Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment (CAPEB), l'Union nationale des syndicats français d'architectes (UNSFA) et l'Union nationale des Économistes de la construction (UNTEC), l'étude d'impact financier « montre l'absence d'équilibre à 50 ans ».
De même qu'ils jugent la nouvelle méthode de l'analyse du cycle de vie (ACV), dite ''dynamique'' « en rupture » avec les travaux liés à l'expérimentation E+C-. Ce label désignant des bâtiments à énergie positive (E+) et réduction carbone (C-) avait été lancé en 2017 par la ministre d'alors Emmanuelle Cosse, aujourd'hui présidente de l'Union sociale pour l'habitat, et première à monter au front.
Outre la soutenabilité économique des projets via la maîtrise des coûts et l'innovation, les fédérations du bâtiment et du logement, ainsi que leurs alliés, redoutent une « aggravation de la chute de la construction neuve » dès cette année. Le cas échéant, cela constituera « un échec aux conséquences environnementales, économiques et sociales graves ».
Des propositions qui « méritent d'être précisées »
En attendant la réponse des ministres, tous ces acteurs doivent se retrouver ce soir au sein du Conseil supérieur de l'efficacité énergétique et de la construction (CSCEE). « Ces propositions ont déjà été soumises au CSCEE qui les a déjà examinées en bureau la semaine dernière », déclare à La Tribune son président Christophe Caresche.
« Nous reprenons ce travail aujourd'hui avec la réunion plénière qui se prononcera dessus comme sur d'autres propositions », ajoute l'ex-député (PS) de Paris. « Sur le fond, elles sont proposées avec un esprit ''d'ajustement'' selon leur propre expression, qui est conforme à l'esprit du CSCEE », même si certaines méritent d'être précisées », conclut Christophe Caresche.
Dès le 18 décembre dernier, l'USH, la FPI, le Pôle Habitat FFB, la FFB, la Fédération SCOP BTP, la CAPEB, l'UNSFA et l'UNTEC avaient déjà alerté sur un risque de « rupture majeure et critique pour l'offre de bâtiments, l'activité et les emplois du secteur (...) ». « Il est nécessaire de partager une trajectoire et un calendrier de mise en œuvre progressif et adapté », écrivaient alors les signataires dans une déclaration transmise à la presse aux côtés de la Fédération des syndicats des métiers de la prestation intellectuelle du conseil, de l'ingénierie et du numérique et de l'Association des industries de produits de construction.
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