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« Enfin, nous allons pouvoir réinvestir la problématique de construire avec un objectif de résultat et pas de moyens. Et pouvoir créer des bâtiments qui vont générer plus d'énergie qu'ils n'en consomment » se félicite l'architecte Maud Caubet. Mais quelles matières employer pour y arriver ? « À la mairie de Paris, le matériau bio et géosourcé (bois, paille), c'est la norme, avec le moins de béton possible » explique Jacques Baudrier, adjoint à la Maire de Paris chargé de la construction publique, du suivi des chantiers, de la coordination des travaux sur l'espace public et de la transition écologique du bâtiment. Le premier bâtiment sans fondation en béton mais avec des pieux vissés a permis de diviser par trois le volume de matière employée. La mairie de Paris a aussi construit une annexe d'école Porte d'Ivry avec 300 tonnes de matières au lieu de 1.300.
Le bon matériau au bon endroit et au bon moment ?
L'Union sociale pour l'habitat, qui représente 30% du marché du logement collectif en France, veut accompagner la montée en compétence sur ces nouveaux matériaux en ouvrant une école bas carbone avec Carbone 4, cabinet de conseil indépendant spécialisé dans la stratégie bas carbone, et l'Institut Français pour la performance du bâtiment (IFPEB). « Nous allons pouvoir mieux choisir les bons matériaux et partager avec les autres filières. Nous voulons devenir la locomotive du logement bas carbone en France » déclare Nicolas Prudhomme, directeur de la Maîtrise d'Ouvrage et des Politiques Patrimoniales chez l'Union sociale pour l'habitat.
La pierre de taille est un de ces matériaux géosourcés avec une empreinte carbone faible, une forte inertie et aucune transformation entre l'extraction et la construction. « Nous possédons une carrière à 40 km de Paris, nous sommes donc en cycle court. C'est une filière oubliée dont on ne parle pas » regrette , qui réclame « une approche holistique avec chaque matériau, qui apportera la meilleure réponse technique au bon endroit et au bon moment ».
Une filière bois à revoir
Concernant les matériaux biosourcés, comme le bois, « il y a un sujet sur la filière pour qu'elle soit plus locale. La terre, elle, provient des millions de tonnes de gravats du chantier du Grand Paris Express » précise Jacques Baudrier. Nicolas Prudhomme regrette que le bois français soit difficile à trouver : « malheureusement, on assiste à des allers-retours vers l'Autriche ou la Pologne. Le bois est souvent produit en France mais transformé ailleurs. Il faudrait pouvoir travailler sur des bilans carbones globaux. Une logique de traçabilité sur les matériaux de construction est nécessaire ». Maud Courbet remarque que la géolocalisation peut aussi permettre de réutiliser les matériaux et réclame « une base de données par ville ou région pour leur redonner une nouvelle vie ». Marc Verrechia rappelle que la pierre de taille peut être utilisée « sur n'importe qu'elle type de façade, pas seulement haussmannienne ».
Pour doper l'utilisation de ces matériaux bio et géosourcés, les intervenants ont leurs idées de solutions. Jacques Baudrier réclame des mesures fiscales comme une TVA à 5,5% pour ces matériaux et un taux plus élevé sur le béton. Nicolas Prudhomme veut « rassurer le maître d'ouvrage sur l'industrialisation et la certification de ces nouvelles filières ». Marc Verrechia est favorable à un label géosourcé de la pierre de taille et Maud Coubet engage à prendre le temps pour « réconcilier tradition et modernité, densité et naturalité pour injecter de manière poétique du bon sens dans notre architecture afin de créer des lieux où il fera bon vivre ».
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