Immobilier : au Sénat, Airbnb et les acteurs de la location de vacances se défendent d'aggraver la crise du logement

Le directeur général France d'Airbnb et le vice-président de l'Union nationale pour la promotion de la location de vacances (UNPLV) viennent d'être auditionnés, par la mission d'information du Sénat, sur la crise du logement. Morceaux choisis sur le diagnostic de performance énergétique (DPE), la fiscalité, le nombre de nuitées ou encore le quota de Saint-Malo.
César Armand
Le directeur général France d'Airbnb et le vice-président de l'Union nationale pour la promotion de la location de vacances (UNPLV) étaient auditionnés ce mardi par la mission d'information du Sénat, sur la crise du logement.
Le directeur général France d'Airbnb et le vice-président de l'Union nationale pour la promotion de la location de vacances (UNPLV) étaient auditionnés ce mardi par la mission d'information du Sénat, sur la crise du logement. (Crédits : DR)

Qui est responsable de la crise du logement ? Les maires qui délivrent, ou non, des permis de construire ? Les banques qui octroient, ou non, des crédits immobiliers ? C'est la question que se pose la commission des Affaires économiques du Sénat qui auditionne actuellement les acteurs politiques, publics et privés. Ce 2 avril, c'était au tour de Clément Eurly, le directeur général France d'Airbnb, et Philippe Bauer, vice-président de l'Union nationale pour la promotion de la location de vacances (UNPLV), la fédération qui représente les entreprises du secteur (Abritel, Booking...).

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Dans leur propos introductif, les deux décideurs se sont référés à une étude réalisée par Strategy&/PwC à la demande d'Airbnb, rendue publique fin octobre 2023, identifiant le manque de construction et la vacance de logements comme « principaux facteurs de la pénurie de logements en France ». Toujours selon ce document, seulement 0,2% des logements - soit 1 logement sur 500 - sont dédiés à la location meublée touristique en France, c'est-à-dire loués plus de 120 jours par an sur les plateformes.

Faut-il passer de 120 à 90 jours ?

Un seuil sur lequel les députés Annaïg Le Meur (Renaissance, Finistère) et Iñaki Echaniz (Socialiste, Pyrénées-Atlantiques) souhaitent donner la main aux maires. Dans leur proposition de loi visant à remédier aux déséquilibres du marché locatif en zone tendue, adoptée par l'Assemblée le 29 janvier et en passe d'arriver au Sénat, les deux parlementaires ouvrent la possibilité d'abaisser de 120 jours à 90 jours par an la durée maximale pendant laquelle une résidence principale peut être louée.

« L'impact sur le logement serait nul. L'impact sur le pouvoir d'achat et l'attractivité des territoires serait évident », a déclaré aux sénateurs, ce matin, Clément Eurly, le patron hexagonal d'Airbnb. Il en veut pour preuve qu'Airbnb a rapporté en 2023 près de 187 millions d'euros de taxes de séjour aux collectivités territoriales et, en moyenne, 3.900 euros bruts de revenus annuels aux logeurs.

Qu'en est-il des quotas ?

« La France est le pays où la location meublée touristique est la plus sévèrement et la plus strictement réglementée en Europe », a ensuite lâché le vice-président de l'UNPLV, Philippe Bauer, sous sa casquette de directeur des relations institutionnelles France et Europe Centrale du groupe Expedia, interrogé par la sénatrice (UDI) du Pas-de-Calais, Amel Gacquerre, sur l'explosion de ces logements sur les plateformes touristiques.

Et de poursuivre sur les communes qui connaissent mal la réglementation. Philippe Bauer a ainsi évoqué les quotas mis en place en 2021 à Saint-Malo quartier par quartier, alors que ces derniers ne sont pas autorisés par la loi. Les propriétaires locaux ont saisi deux avocats qui ont porté l'affaire en justice. « Nous verrons ce que le dit le Tribunal administratif de Rennes et nous veillerons à appliquer la loi », a poursuivi le professionnel, cette fois au nom de l'Union nationale pour la promotion de la location de vacances.

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Rebondissant sur cette histoire de quota, que les députés Le Meur et Echaniz entendent graver dans le marbre, Clément Eurly d'Airbnb a demandé la mise en place d'un décret d'application définissant la proportionnalité et faisant la différence entre le stock et le flux de logements concernés. « Si le quota est de 500 logements, qu'en sera-t-il de la 501è demande ? Il y a des situations différentes et des quotas différents à établir quartier par quartier », a poursuivi le représentant français de la multinationale américaine.

Doit-on revoir la fiscalité ?

Autre suggestion, cette fois de l'Union nationale pour la promotion de la location de vacances, afin d'inciter les multipropriétaires à revenir à la longue durée : revoir les abattements fiscaux. Aujourd'hui, tout bailleur d'un logement meublé de longue durée doit payer à l'Urssaf des cotisations sociales si ses recettes excèdent 23.000 euros. Demain, l'UNPLV pousse « que ces abattements fiscaux continuent de bénéficier aux petits propriétaires, mais qu'ils soient rabotés pour les multipropriétaires ».

« Baisser les seuils et adapter les niveaux d'abattement pour que la location meublée touristique de courte durée soit aussi bien-disante que la location longue durée me semblent être une très bonne idée », a abondé Clément Eurly, directeur France d'Airbnb.

Qu'en est-il du DPE ?

Avec Philippe Bauer, ils se retrouvent également sur les changements liés au diagnostic de performance énergétique créés par la loi Le Meur-Echaniz. L'article 1er du texte soumet en effet la mise en location d'un meublé de tourisme à la réalisation préalable d'un DPE. Autrement dit, « cela entraîne sa subordination aux mêmes obligations de performance énergétique que les logements », est-il écrit dans l'exposé des motifs.

« Le DPE devient une barrière à l'entrée pour les nouveaux meublés touristiques », s'est ému Philippe Bauer, vice-président de l'Union nationale pour la promotion de la location de vacances.

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Sauf que les députés ont tout prévu. « Le conseil municipal a la faculté de déroger à l'obligation si une telle dérogation est justifiée par l'existence de circonstances locales particulières », est-il précisé dans la proposition de loi. Par exemple, dans les stations de ski, les passoires thermiques sont surreprésentées dans le parc locatif, mais ces logements sont indispensables pour la survie économique de ces territoires de montagne.

En l'absence de dérogation certes, l'obligation entrera en vigueur de la même manière que pour les habitats classiques. A savoir 2025 pour l'interdiction à la location des logements G, 2028 pour les F et 2034 pour les E.

César Armand

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Commentaires 2
à écrit le 02/04/2024 à 19:10
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Le Sénat n'aurait-il pas dû se pencher sur ce problème avant ? Nos politiques ont toujours 10 ans de retard.

à écrit le 02/04/2024 à 19:05
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Un location Airbnb pour 2/3 jours c'est vraiment se faire des nœuds au cerveau alors qu'il.est si simple d'aller à l'hôtel et pas toujours pour beaucoup plus cher, le service en plus.

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