Immobilier : garder son ancien crédit pour acheter un nouveau bien, la solution de la Fnaim pour relancer les ventes

La Fédération nationale de l’immobilier (Fnaim) milite depuis plusieurs mois pour que le gouvernement oblige les banques à généraliser la transférabilité et la portabilité des crédits immobiliers. Une mesure qui permettrait à de nombreux acquéreurs de conserver ou bénéficier d’un crédit à un taux inférieur à 2% et relancerait les transactions immobilières. Mais cette proposition ne fait pas l’unanimité et nombre de banquiers et de courtiers estiment qu’il s’agit d’une mesure difficile à mettre en place voire risquée.
Maxime Heuze
Les propriétaires souhaitant changer de bien pourraient réutiliser leur crédit contracté lors de l'achat de leur ancienne propriété pour acheter un nouveau bien, plutôt que de le rembourser pour en contracter un nouveau comme il est d'usage.
Les propriétaires souhaitant changer de bien pourraient réutiliser leur crédit contracté lors de l'achat de leur ancienne propriété pour acheter un nouveau bien, plutôt que de le rembourser pour en contracter un nouveau comme il est d'usage. (Crédits : Pixabay/Raten-Kauf)

C'est peut-être l'une des solutions pour dégripper le marché immobilier :  réutiliser ou transférer les anciens crédits. Voilà une idée originale portée par la Fédération nationale de l'immobilier (FNAIM) depuis plusieurs mois.

L'idée de la portabilité est simple : les propriétaires souhaitant changer de bien pourraient réutiliser leur crédit contracté lors de l'achat de leur propriété actuelle pour acheter un nouveau bien, plutôt que de le rembourser pour en contracter un nouveau comme il est d'usage. Une mesure qui permettrait aux propriétaires acquéreurs de continuer à bénéficier de crédits à des taux inférieurs à 2%, très nombreux avant 2022. C'est-à-dire, ceux qui ont acheté leur bien depuis plus d'une dizaine d'année. Ils s'exposeraient alors seulement à un prêt complémentaire à des taux actuels (autour de 4%) en cas d'achat d'un bien plus onéreux.

La Fnaim propose aussi de mettre en place la transférabilité des crédits permettant à un vendeur de donner à l'acquéreur de son bien son ancien crédit... et son taux avantageux. « Permettre aux acheteurs d'obtenir l'ancien crédit des vendeurs, contracté à un taux bas, serait aussi bénéfique aux primo-accédants qui sont coincés par la remontée des taux », présente à La Tribune, Loïc Cantin, président de la Fnaim.

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Un marché immobilier grippé par les taux de crédits hauts

Des propositions qui ciblent le problème de l'envolée des taux des crédits immobiliers, aujourd'hui au cœur de la crise traversée par le secteur. Selon la Fnaim, le renchérissement du coût de l'endettement a baissé le pouvoir d'achat immobilier des emprunteurs de 15% en deux ans.

Si l'attente d'une baisse des taux directeurs a fait repasser le taux de crédits moyen à 3,99% en février selon le dernier pointage de l'Observatoire Crédit Logement/CSA, l'onde de choc de ce surenchérissement du coût d'endettement sur l'immobilier a été brutal. La production de crédit s'est effondrée de 40 % entre février 2023 et février 2024, selon les chiffres de la Banque de France, entraînant une chute de 22% du nombre de ventes immobilières sur l'ensemble de l'année 2023 selon la Fnaim. « Beaucoup de propriétaires se disent qu'ils ne vont pas vendre leur bien acheté avec un crédit à 1% pour racheter un bien avec un crédit à 4% », explique à La Tribune, Loïc Cantin, président de la Fnaim.

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La mesure est néanmoins loin de faire consensus.

Les banques vent debout contre cette mesure

Ces propositions « comportent en fait plus d'inconvénients que d'avantages au-delà de la lourdeur et complexité particulières de leur éventuelle mise en place », tacle la Fédération bancaire française (FBF), interrogée par La Tribune. Un transfert des crédits ne mettrait pas les banques dans une position délicates puisqu'elles n'auraient qu'à laisser courir leur crédit en cours. Mais, elles craignent néanmoins de subir un important manque à gagner. Depuis la hausse des taux directeurs, ces dernières voient en effet leurs charges augmenter, à l'image de la rémunération du livret A (à 3% contre moins de 1% avant 2022) qui leur incombe. Des hausses de coûts que ces acteurs entendent compenser en augmentant leurs marges sur les crédits immobiliers.

Par conséquent, la proposition de la Fnaim les pénaliserait dans la mesure où elle ne leur permettant pas de contracter de nouveaux crédits à 4%. Un bâton dans les roues des acteurs de la finance assumé par Loïc Cantin qui appelle ce dispositif à être mis en place par le biais d'une loi, « pendant un ou deux ans le temps que le marché sorte de la crise ».

Un jeu dangereux selon la FBF, puisque « la volatilité plus grande des durées réelles de crédit et le poids plus important donné au bien immobilier comme garantie », pourraient pousser les banques à changer leurs modèles de financement et passer à des crédits à taux variable pour compenser des risques accrus.

Une mesure vraiment réalisable ?

De leur côté, les courtiers questionnent aussi la faisabilité de cette mesure. « Pour qu'un emprunteur puisse réutiliser son crédit, il faut que cela soit inscrit dans son contrat », rappelle Caroline Arnould, présidente de l'Association professionnelle des intermédiaires en crédits (APIC). « Sans cette mention, il faudrait donc forcer les banques à casser leurs contrats commerciaux et je ne vois pas comment le gouvernement pourrait imposer cela », ajoute-t-elle. Le ministère du Logement, favorable à cette mesure reconnaît néanmoins que « le gouvernement ne va pas (et ne pourrait pas) imposer à toutes les banques de mettre de telles clauses dans les contrats. Ce serait d'ailleurs un très mauvais signal pour le système bancaire. »

Concernant le transfert d'un prêt entre un vendeur et un acquéreur, les doutes sont encore plus forts. « C'est quasiment impossible car un crédit dépend des critères d'éligibilité du contracteur. Un vendeur ne peut pas transférer son assurance crédit à l'acquéreur de son bien car elle dépend de son âge, son état de santé ou encore sa situation financière », nuance aussi Bérengère Dubus, présidente de l'Union des intermédiaires de crédit (UIC). « Il faut mettre d'accord le vendeur, l'acheteur, l'assureur du prêt, et que la banque soit la même entre vendeur et acheteur », nuance aussi le ministère du Logement, ajoutant néanmoins que « c'est un travail sur lequel les professionnels peuvent se mobiliser, et le gouvernement sera en soutien. »

Des points que concède le président de la Fnaim, conscient que de nombreux acheteurs seraient inéligibles à reprendre les prêts de leurs vendeurs. « Mais nous estimons que les dossiers de transferts de crédits acceptés pourraient concerner 10 à 15% des transactions, ce qui enverrait un bon signal au marché », conclut Loïc Cantin.

Maxime Heuze

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Commentaires 5
à écrit le 12/04/2024 à 18:07
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"La Fédération nationale de l'immobilier (Fnaim) milite depuis plusieurs mois pour que le gouvernement oblige les banques à généraliser la transférabilité et la portabilité des crédits immobiliers." Mesure complètement absurde puisqu'un prêt im...

à écrit le 12/04/2024 à 12:46
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problème sur la garantie du prêt hypothèque ppd etc.;;;;

à écrit le 12/04/2024 à 8:48
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Ou plutôt la possibilité de «  revendre son crédit immo hors assurance …ex : en 2021 j a obtenu un crédit à 0,7%… je le revend à 2 ou 3 % selon la situation de l’ acquéreur , celui ci reversant 20000€ à partager entre la banque et moi .. il reste ...

à écrit le 12/04/2024 à 7:51
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Hou là il faut vraiment que ce soit la crise pour qu'un lobby exige d'un truc d'un autre ! Le gâteau se réduit.

à écrit le 12/04/2024 à 7:35
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l'idee en soi est a etudier, cela dit rendre ca obligatoire, c'est aller a la boucherie; au passage les prets se font sur des biens ' d'une certaine qualite'; une famille qui quitte un deux piece suite a l'arrivee d'un gamin pour aller vivre dans un ...

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