Hydrogène « vert » : deux nouveaux projets d’électrolyseurs sur l’axe Seine

Les producteurs d’hydrogène bas carbone orientent leur boussole vers les zones industrielles de la vallée de Seine qui cherchent à se sevrer de l’hydrogène « gris » pour alléger leur empreinte. Après Air Liquide, c’est au tour du nantais Lhyfe et du parisien Verso Energy de sortir du bois. Le premier près du Havre, le second sur le port de Rouen.
L'usine Normand'Hy d'Air Liquide sera la première à sortir de terre
L'usine Normand'Hy d'Air Liquide sera la première à sortir de terre (Crédits : Air Liquide)

Commençons par planter le décor. Place forte du raffinage et de la production d'ammoniac (l'ingrédient de base des engrais), la vallée de Seine concentre à elle seule près de 45% de la demande française en hydrogène. Selon une étude Delphy (réalisée pour le compte de la Délégation interministérielle au développement de la vallée de Seine), elle en consomme environ 350.000 tonnes par an. Ce, essentiellement à partir du méthane... au prix d'émissions massives de dioxyde de carbone dans l'atmosphère.

Pour rappel, une tonne d'hydrogène issue du gaz émet jusqu'à 10 tonnes de CO2. C'est dire si les zones industrielles qui longent le fleuve de Paris au Havre vont devoir se désintoxiquer de cet H2 dit « gris » délétère pour le climat. On ne s'étonnera donc pas d'y voir fleurir les projets d'électrolyseurs.

Dans cette course au sevrage, Air Liquide a été le premier à prendre le départ avec son projet de giga factory Normand'hy en cours de construction au cœur du complexe pétrochimique de Port-Jérôme (Seine-Maritime). D'un coût de 400 millions d'euros pour une puissance « d'au moins 200 MW », l'installation attendue dans deux ans est présentée comme « le plus gros électrolyseur jamais construit ». Pour autant, celui-ci sera très loin de suffire à la demande. Il ne fournira (que) 28.000 tonnes d'hydrogène propre par an. Soit moins du dixième de ce qui serait nécessaire pour honorer les promesses de décarbonation des industriels de l'axe.

Lhyfe entre dans la danse

L'ampleur du besoin pousse Lhyfe à avancer ses pions à son tour. La jeune pousse nantaise convoite un terrain également situé dans la zone de Port-Jérôme, au voisinage direct de l'une des trois usines françaises du fabricant d'engrais norvégien Yara. Le site qui produit de l'ammoniac est le septième plus gros émetteur français de GES et l'un des 50 gros pollueurs avec qui le gouvernement a signé « un contrat de transition ».

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Autant dire que l'emplacement n'a pas été choisi au hasard. La startup projette d'y construire une unité d'électrolyse moitié moins capacitaire que celle d'Air Liquide (100 MW). L'installation, dont le coût n'est pas encore connu, pourrait délivrer jusqu'à 34 tonnes d'hydrogène bas carbone quotidiennement.

Pour l'heure, le projet en est au stade de la concertation publique. Celle-ci devrait débuter dans le courant du mois de février prochain. « La localisation du site au sein d'un bassin de consommation d'hydrogène majoritairement gris est pertinente », argumentent les dirigeants de Lhyfe dans leur lettre d'intention. Côté calendrier, les intéressés tablent sur une mise en route de leur électrolyseur au printemps 2028, quasiment en même temps que celui qui vient d'être retenu par le port de Nantes Saint-Nazaire. D'ici là, il leur faudra avoir obtenu les autorisations administratives et réuni les financements nécessaires.

Verso Energy en piste à Rouen

Lhyfe n'est pas seul à se mettre sur les rangs. Nouvel entrant dans la production d'H2, le parisien Verso Energy voit grand pour sa première incursion en vallée de Seine. Fondé par l'ex-patron de Direct Energie, Xavier Caïtucoli, Verso Energy vient de réserver un terrain sur le port de Rouen avec la bénédiction d'Haropa, sa maison-mère. L'entreprise se fait fort d'y construire une unité de production d'hydrogène par électrolyse de l'eau d'une puissance « pouvant atteindre 350 MW ». De quoi fournir « plus de 50.000 tonnes par an » à horizon 2029.

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Là encore, l'emplacement n'a pas été choisi au hasard. Le site voisine avec celui du fabricant d'engrais LAT Nitrogen (anciennement Borealis), un autre gros émetteur du club des « 50 ». « C'est un client que nous pourrions adresser même si ce n'est pas seul », indique à La Tribune Antoine Huard, directeur général de Verso Energy. Outre son électrolyseur, l'entreprise projette de bâtir une seconde installation, cette fois pour fabriquer du carburant de synthèse à partir du CO2 qui pourrait être capté à la sortie des cheminées des usines voisines.

Le montant global de l'investissement est estimé à un demi-milliard d'euros. Autant dire que comme Lhyfe et Air Liquide, Verso Energy attend avec une certaine impatience que soient dévoilés les détails du mécanisme de soutien à l'hydrogène bas carbone, promis par la ministre de la Transition énergétique, Agnès Pannier Runacher.

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