Ce mardi 1er août est marqué par la hausse de 10% des tarifs réglementés de vente de l'électricité, après une hausse de 15% en février dernier. La facture annuelle d'un consommateur moyen chauffé à l'électricité passera ainsi de 1.640 à 1.800 euros par an, selon les calculs du gouvernement, lequel rappelle que les Français bénéficieront néanmoins d'un tarif parmi les plus bas d'Europe.
« C'est vrai, malgré les deux hausses successives depuis le début d'année, le tarif réglementé de vente d'électricité en France reste en dessous de la moyenne européenne, qui se situe aux alentours de 25 centimes le kilowattheure. Dans l'Hexagone, la moyenne se situe autour de 22 centimes le kilowattheure », confirme Jacques Percebois, professeur émérite à l'université de Montpellier, spécialiste de l'économie de l'énergie.
Une électricité à moins de 10 centimes le kilowattheure en Hongrie
Les Français ne bénéficient toutefois pas des tarifs les plus attractifs. Ces derniers se localisent surtout dans les pays de l'Est de l'Union européenne. « En Hongrie, le kilowattheure avoisine 10 centimes. Il est à 15 centimes en Pologne », précise le spécialiste. « Mais on peut s'interroger sur la vérité des prix dans ces pays, où une partie du tarif n'est pas tout à fait représentative des coûts », ajoute-t-il, évoquant des aides d'Etat. Le pouvoir d'achat des ménages n'est pas le même non plus. Le salaire mensuel minimum en Hongrie est de 579 euros, soit l'un des SMIC les plus faibles d'Europe. A titre de comparaison, il s'élève dans l'Hexagone à 1.709,28 d'euros depuis le 1er janvier 2023.
Le prix de l'électricité domestique en France reste, en revanche, sensiblement inférieur à celui pratiqué en Belgique (plus de 30 centimes le kilowattheure), en Espagne (31 centimes) ou encore en Allemagne (34 centimes) et surtout au Danemark, qui est le pays où les électrons sont les plus coûteux pour les ménages européens (aux alentours de 45 centimes le kilowattheure).
Des prix structurellement plus élevés en Allemagne et au Danemark
Structurellement, les prix de l'électricité en Allemagne et au Danemark ont toujours été très élevés en raison des taxes qui ont été mises en place pour subventionner le développement massif des énergies renouvelables (parcs éoliens et solaires). « Tandis que les industriels allemands ont été protégés, les consommateurs domestiques ont supporté ces importantes subventions », explique Jacques Percebois.
En France, la facture d'électricité se décompose en trois tiers : le coût de fourniture (c'est-à-dire les coûts de production et d'approvisionnement sur le marché de gros), les taxes, et un plus petit tiers correspondant au coût des réseaux (liés aux investissements réalisés dans le réseau de transport d'électricité géré par RTE et le réseau de distribution géré par Enedis).
Le poids des taxes diminue en France
Au cours des dix dernières années, le tarif réglementé de vente de l'électricité a augmenté d'environ 60%.
« De 2010 à 2021, la hausse en France était essentiellement imputable aux taxes qui ont augmenté pour financer le développement des énergies renouvelables. Mais depuis 2022, la tendance s'est inversée : c'est le coût de fourniture qui s'est envolé », retrace le spécialiste de l'économie de l'énergie.
Si le coût de fourniture a sensiblement gonflé en 2022 c'est parce que le parc nucléaire tricolore a connu une indisponibilité historique et que la France a dû massivement importer de l'électricité (alors qu'elle était habituellement exportatrice nette) et donc s'approvisionner davantage sur le marché de gros. Marché sur lequel la définition du prix du mégawattheure dépend en grande partie de celui du gaz, qui s'était lui-même envolé après que la Russie ait envahi l'Ukraine.
Ainsi, pour protéger le pouvoir d'achat des ménages, l'Etat français n'a pas augmenté le coût des taxes en 2022 contrairement aux années précédentes. Il a même supprimé la Taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité (TICFE), en maintenant toutefois la TVA. Et, malgré la hausse de 10% entrée en vigueur ce mardi 1er août, l'État continuera de prendre en charge plus d'un tiers de la facture des ménages (37% contre 43% actuellement). « Sans ce bouclier tarifaire, les consommateurs français paieraient plus de 40 centimes le kilowattheure », précise Jacques Percebois.
Quid de 2024 ?
A quoi peut-on s'attendre pour 2024 ?
« Il ne faut pas penser que les prix de l'électricité vont se mettre à chuter pour le consommateur final français [même si sur le marché de gros, les prix ont largement baissé, ndlr]. (...) Il faut seulement espérer qu'ils n'augmentent pas trop car il y aura un effet rattrapage », prévient le spécialiste.
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