Relance du nucléaire : une centaine de députés réclament un débat public

Plus d'une centaine de députés ont saisi la Commission nationale du débat public (CNDP) pour réclamer la tenue d'un débat sur « la place du nucléaire dans le mix énergétique de demain ». Alors qu'un débat sur la construction de six nouveaux réacteurs va être lancé et qu'une concertation générale sur l'énergie a démarré la semaine dernière, les élus jugent que ce n'est pas « suffisant ». Avec ce débat, ils souhaitent « rendre le pouvoir de décision à la population ».
Cette saisine intervient alors qu’une concertation gouvernementale générale sur l'énergie a commencé le 20 octobre. En parallèle, la CNDP va lancer un débat sur la construction de six nouveaux réacteurs nucléaires.
Cette saisine intervient alors qu’une concertation gouvernementale générale sur l'énergie a commencé le 20 octobre. En parallèle, la CNDP va lancer un débat sur la construction de six nouveaux réacteurs nucléaires. (Crédits : Reuters)

Débattre publiquement sur la question du nucléaire, voilà ce que réclament 105 députés issus de cinq groupes politiques - EELV, LFI, PS, Modem (un seul député, Hubert Ott) et Liot (un député, Paul Molac). Ils ont pour cela saisi la Commission nationale du débat public (CNDP) ce mardi 25 octobre. « Nous constatons que les espaces dédiés à un débat public sur les questions énergétiques sont largement insuffisants », explique la députée EELV de la Drôme Marie Pochon, à l'origine de la saisine, avec Julien Bayou.

Cette saisie de la CNDP par des députés est « inédite », a relevé Julien Bayou. Elle vise à réclamer qu'un « vrai débat puisse s'engager sur la question énergétique », et pas seulement sur la décision de la construction de six nouveaux EPR par le seul chef de l'État - c'était d'ailleurs une promesse de campagne d'Emmanuel Macron.

« Nous proposons d'avoir un débat très en amont » de la loi de programmation sur l'énergie et le climat (LPEC), qui doit déterminer avant le 1er juillet 2023 les priorités d'actions de la politique énergétique nationale, pour « rendre le pouvoir de décision à la population », a expliqué Julien Bayou.

La saisine de la CNDP « est salutaire, le gouvernement ne doit pas avoir peur du peuple », a aussi souligné l'insoumise Clémence Guetté, tout en reconnaissant que tous les groupes signataires n'avaient pas la même approche du mix énergétique nécessaire. « À la fin, nous ne voterons peut-être pas la même chose sur le nucléaire », a aussi reconnu le socialiste Dominique Potier, mais « nous croyons en la science pour éclairer les débats », citant « le foisonnement de production » des agences d'État, instituts et ONG.

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Les Français appelés à donner leur avis

Cette saisine intervient alors qu'une concertation gouvernementale générale sur l'énergie a commencé le 20 octobre. Car la France est à l'aube de choix de société qui vont l'engager pour des décennies. Afin de lutter contre le réchauffement climatique et parvenir à la neutralité carbone en 2050, le pays doit sortir des énergies fossiles, en recourant à plus d'électricité.

Oui, mais comment ? Actuellement, environ 70% du courant vient aujourd'hui du nucléaire. Mais le parc vieillit. La volonté du gouvernement est de créer de nouveaux réacteurs tout en développant les énergies renouvelables (solaire et éolien marin surtout).

Les Français sont invités à donner leur avis via une consultation en ligne sur le site www.concertation-energie.gouv.fr, comme l'avait promis Emmanuel Macron en février quand il avait annoncé la relance du nucléaire à Belfort. Plusieurs réunions régionales en présentiel seront aussi organisées, ainsi qu'un "forum des jeunesses" réunissant 200 jeunes mi-janvier.

Trois questions sont sur la table : comment adapter notre consommation ? Comment satisfaire nos besoins énergétiques tout en sortant de notre dépendance aux énergies fossiles ? Comment planifier et financer notre transition énergétique ? Lundi, le site avait déjà recueilli plus de 4.000 contributions.

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En parallèle, la CNDP va lancer à compter de ce jeudi et jusqu'au 27 février un débat sur la construction de six nouveaux réacteurs nucléaires EPR 2. Dix thèmes jalonneront les réunions, dont la première sera en duplex à Dieppe et Paris. Parmi eux : "impacts sur le territoire", "leçons du premier EPR", "incertitudes climatiques et géopolitiques", mais aussi "avons-nous besoin d'un nouveau programme nucléaire ?".

Les réflexions pourront s'appuyer sur plusieurs scénarios à 2050 produits par le gestionnaire du réseau à haute tension RTE et par l'Ademe. Tous incluent une poussée des énergies renouvelables (solaire, éolien...), avec une part variable de nucléaire, démarrant à zéro et accompagnée de fortes mesures de sobriété.

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Un débat, vraiment ?

Pour rappel, le Parlement doit voter au plus tard en 2024 la feuille de route énergétique de la France (fixant notamment la part de chaque énergie). La synthèse des deux débats sera versée aux travaux parlementaires.

Mais le gouvernement a déjà annoncé en septembre deux projets de loi d'accélération, l'un des renouvelables et l'autre du nucléaire. « Le débat public va être lancé alors que le gouvernement a déjà décidé de faire six réacteurs ! », s'agace Jean-Claude Delalonde, président de l'Anccli, la fédération des Commissions locales d'information, installées autour de chaque centrale en France.

Au ministère de la Transition énergétique, on répond que les « grands axes ont été brossés par le président Emmanuel Macron (...) mais il y a la question du comment. C'est ce qui est au cœur de cette concertation : définir plus précisément la manière dont on va détailler cette politique ».

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Commentaires 3
à écrit le 25/10/2022 à 19:30
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Bonjour, Bien sûr, un vrai débat public, pas un truc de 100 copains écolo complètement déjanté.... Un vrai débat, avec un référendum pour définir le choix de la population...

le 25/10/2022 à 21:34
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"pour définir le choix de la population" et si la décision est bancale, ça sera LA décision et il n'y aura rien à redire. :-) On devrait obliger les constructeurs à modifier leurs appareils, sous réserve de confirmation, en coupant au tableau électr...

à écrit le 25/10/2022 à 18:00
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C'est étonnant que l'on veuille nous faire croire que la décision est encore "le fait du prince" et que cela passe sans discussion ! :-)

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