Au Panama, l'exploitation de la première mine de cuivre d'Amérique centrale remise en cause

La cour suprême du Panama a jugé « inconstitutionnel » le renouvellement du contrat d'exploitation de la mine Cobre Panama au géant minier canadien First Quantum Minerals. Le président du pays a annoncé vouloir lancer un processus de fermeture du site, dont la contribution compte pour quelque 5% du PIB et génère 40.000 emplois directs et indirects.
Robert Jules
Site de Cobre Panama.
Site de Cobre Panama. (Crédits : Reuters)

La transition énergétique, qui substitue les métaux aux énergies fossiles, doit composer avec la montée de la contestation à travers la planète des projets d'extension des activités extractives. Dernier en date, celui de la plus grande mine de cuivre d'Amérique centrale, Cobre Panama, localisée au Panama à quelque 120 km à l'ouest de la capitale, sur la côte caribéenne.

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Le feu vert donné par le parlement le 20 octobre dernier au renouvellement de la concession pour 40 ans à l'exploitant, la société minière canadienne First Quantum Minerals (FQM), qui compte parmi les 10 premières compagnies mondiales de cuivre, a provoqué la colère d'une partie de la population. Ce nouveau contrat visait à remplacer l'accord de concession initial, déclaré inconstitutionnel en 2017 pour ne pas avoir été conclu après appel d'offres public, ni consultation populaire.

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Une décision rapide

Finalement, mardi dernier, les contestataires ont eu gain de cause. Suite au dépôt de deux recours portant sur les volets juridique et environnemental, la Cour suprême a jugé « inconstitutionnel » le contrat de concession, une décision rendue à l'unanimité après quatre jours à peine de délibérations entre les neuf membres de la Cour.

Dans la foulée, Laurentino Cortizo, le président panaméen, a promis dans une allocution télévisée de lancer un processus de fermeture « ordonnée et sûre », considérant qu'« en raison de l'impact sur la société panaméenne », chaque décision adoptée « doit être abordée de manière responsable, inclusive et participative ». L'exécutif avait été critiqué pour son « inaction ». Or, les manifestations et les barrages routiers ont déjà causé plus de 1,7 milliard de dollars de pertes aux secteurs de l'agriculture, du tourisme et du commerce, selon les organisations professionnelles.

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Toutefois, l'arrêt de l'exploitation de cette mine à ciel ouvert (voir photo) n'est pas négligeable pour l'économie du pays. La production cuprifère du site a contribué en 2021 à 4,8% du PIB du pays et à 80% de ses exportations, affirme Cobre Panama. Elle représente quelque 1,5% de la production mondiale annuelle de cuivre. En 2022, le site a extrait 85 millions de tonnes de minerai dont ont été raffinés 350.000 tonnes de cuivre, près de 140.000 onces d'or et plus de 2,8 millions d'onces d'argent.

De son côté, FQM affirme avoir investi 10 milliards de dollars dans la mine et les infrastructures connexes, créant environ 40.000 emplois directs et indirects dans l'économie locale, dont 90% occupés par des Panaméens.

Vers un arbitrage international

La décision de la cour suprême est importante « non seulement pour l'avenir du Panama, mais aussi pour notre défense devant les tribunaux internationaux », a déclaré à l'AFP l'une des leaders de la contestation, l'écologiste Raisa Banfield, ajoutant : « Aucune entreprise étrangère ne peut venir ici en brandissant ses millions et dire qu'elle peut faire ce qu'elle veut parce qu'elle investit ».

Le gouvernement avait indiqué dimanche dernier avoir été informé par FQM de son intention de recourir à l'arbitrage international, si le contrat les liant était déclaré inconstitutionnel, et assuré se tenir « prêt à défendre les intérêts nationaux ».

Un différend potentiellement haussier pour les cours du métal rouge. La semaine dernière, les investisseurs s'étaient déjà positionnés à l'achat sur les marchés à terme. « Plusieurs perturbations ont été signalées dans les mines, celle de Cobre Panama a annoncé qu'elle suspendait sa production en raison des manifestations dans le pays qui ont empêché les opérations normales et les efforts logistiques. Le même jour, les employés de la mine de cuivre Las Bambas au Pérou ont annoncé une grève illimitée à partir du 28 novembre. Il s'agit de développements importants puisque les deux mines représentent ensemble environ 3% de l'offre mondiale », soulignaient ainsi dans une note les experts des matières premières chez SG.

Sur le London Metal Exchange (LME), la tonne de cuivre pour une livraison à trois mois cotait ce mercredi à 8.383 dollars, soit une hausse de 6,2% depuis son dernier point bas le 23 octobre.

Robert Jules

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Commentaire 1
à écrit le 29/11/2023 à 18:08
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C'est intéressant, contre la cupidité pathologique de ceux qui possèdent et détruisent le monde en ronflant une association citoyens-justice, notre dernière chance de débloquer ce système capitaliste. Un petit espoir toujours bon à prendre par les te...

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