Ciné-tourisme  : quand le choix du lieu de tournage d'un film tourne au jackpot pour les villes françaises

Selon une étude réalisée par l'IFOP pour le CNC, le centre national du cinéma, 80% des touristes étrangers ayant visité Paris en 2023 assurent avoir vu une fiction tournée en France qui leur a donné envie de visiter l'Hexagone. La série Netflix Emily in Paris est celle qui est la plus citée. La tendance du « ciné-tourisme » est devenu la seconde influence dans le choix d’une destination touristique, juste avant les réseaux-sociaux. Et les municipalités, autant que les boîtes de production, l’ont bien compris.
Le ciné-tourisme est un enjeu économique. La dernière étude du CNC le prouve : Emily in Paris est citée dans la majorité des cas, par les touristes étrangers, comme fiction leur ayant « donné envie de visiter la France ».
Le ciné-tourisme est un enjeu économique. La dernière étude du CNC le prouve : Emily in Paris est citée dans la majorité des cas, par les touristes étrangers, comme fiction leur ayant « donné envie de visiter la France ». (Crédits : SARAH MEYSSONNIER)

Neuf millions d'euros : c'est le montant des retombées économiques estimées par l'office de tourisme de Dunkerque à la suite de la sortie du film éponyme, réalisé par Christopher Nolan. Avec un total de 40 millions d'entrées entre l'Europe et les Etats-Unis en 2018, le film a dynamisé l'économie de la ville. Visites des lieux de tournage, expositions, créations d'accessoires, l'office de tourisme local a développé des offres commerciales touristiques en lien avec la production. Le Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) révélait même que la municipalité, ayant pris conscience du phénomène en amont, avait décidé « d'en tirer parti en insistant par exemple auprès du réalisateur pour que le nom de la ville soit dans le titre du film ». De leur côté, les boîtes de production en profitent pour aller chercher des subventions. Lancée en 2013 par la chaîne France 3, la collection de téléfilms Franco-belge « Meutres à... » change de ville à chaque épisode. Régulièrement, les régions d'accueil sont donc sollicitées pour subventionner les épisodes.

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Le cinéma emmène des touristes où il n'y en a pas

Le ciné-tourisme est un enjeu économique.

Atout France-Netflix

En témoigne également la dernière étude du CNC, centrée sur Paris, Nice, Marseille et Sète (Hérault). Dans la capitale, la majorité des touristes étrangers interrogés l'an dernier ont assuré que la série américaine Emily in Paris leur avait « donné envie de visiter la France ». Paris, dont le tourisme est déjà une activité soutenue, a tout de même vu augmenter ses recherches de 200% sur les sites internet du groupe Expedia (Trivago, Hotels.com...) après la diffusion de la dernière série avec Lily Collins.

A Nice, 90% des personnes interrogées par CNC ont déclaré que les fictions tournées dans la ville leur ont donné envie de la visiter. Et c'est Brice de Nice, avec Jean Dujardin, qui a joué un rôle moteur. A Sète, la ville la moins touristique du panel de l'étude, 18% des personnes interrogées ont décidé de venir dans la région après avoir vu une série comme Candice Renoir ou Demain nous appartient.

Influence et placement des produits régionaux

Le cinéma véhicule une certaine image, et peut pousser à la consommation sur place : 83% des touristes français attestent qu'un film ou une série tournée dans la région visitée leur ont donné « une image positive de celle-ci ». Bien que l'effet soit à double tranchant : à Marseille, 46% des touristes attestent que les fictions qu'ils ont vues en rapport avec la région ne leur ont « pas du tout », ou « très peu », donné envie de visiter la région. Dans ce sens, l'influence reste moyenne puisque ce jugement n'a pas empêché les personnes sondées de s'y rendre. Dans la suite des retombées économiques, 62% des touristes étrangers interrogés dans les 4 villes de l'enquête -hors Paris- déclarent que le visionnage d'une production tournée dans la région leur a donné envie d'acheter des produits de la région. Comme les mythiques Ray-Ban aviator de Tom Cruise dans Top Gun, la socca de Nice serait-elle plus vendue si elle était mangée par Jean Dujardin dans Brice de Nice ? Pas sûr.

Les partenariats peuvent influer sur le scénario

L'influence du cinéma peut se chiffrer, et se négocier. Jean-Alexandre Luciani est un producteur français, dont la carrière est « récente », mais qui a tout de même eu le temps de participer à la production du film Les moissonneurs, sélectionné au festival de Cannes en 2018. L'homme est à Bangkok, mais répond entre deux coups de téléphone : « Évidemment que cela se fait de négocier des subventions avec la ville d'accueil ou la région. Dans certains cas, il ne s'agit pas uniquement d'argent, mais de faciliter le tournage, avec une mise à disposition de certains lieux gratuitement par exemple... ». Actuellement en discussion avec un pays frontalier de la France pour y tourner, peut-être, une série, le professionnel poursuit : « Si la municipalité est intéressée, alors on pourra conclure une forme de partenariat en amont du tournage et aller décrocher des subventions. » Pour ce qui est du ciné-tourisme, il précise : « on peut rarement savoir à quel point notre film aura un impact sur l'afflux touristique d'un lieu, les offices de tourisme en profitent donc plus tard, selon la réussite du film. » Pour lui, pour l'instant, les régions et les villes surfent sur la vague plus qu'elles ne cherchent à créer le phénomène, même si cela dépend de la taille et de la notoriété des projets cinématographiques.

Lorsqu'elles en sont conscientes en revanche, elles n'hésitent pas à intervenir. De l'autre côté de l'Atlantique, c'est carrément le gouvernement mexicain qui a mis la main à la poche pour Spectre, le James Bond de Sam Mendès sorti en 2015. Le Mexique a alors négocié, pour 14 millions de dollars, des modifications du scénario comme le fait qu'un « méchant » du film ne soit pas de nationalité mexicaine, ou qu'une célèbre actrice originaire du pays intègre le casting.

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Un essor poussé par celui du streaming

Il est aussi envisageable que les régions et municipalités ne soient pas encore tout à fait conscientes des potentielles retombées économiques qu'offrent un tournage. Le ciné-tourisme est en plein essor, notamment car il suit celui des plateformes de streaming. En 2018, une toute première étude du CNC sur le ciné-tourisme montre que 24% des touristes ont vu un film ou une fiction française via un abonnement ou un catalogue de vidéo à la demande (type Netflix). En 2023, c'est 68% des touristes qui sont passés par ce canal pour visionner une production cinématographique française. Logiquement, plus les plateformes ayant des abonnés dans le monde entier s'étendent, plus le ciné-tourisme s'accroît.

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Commentaires 3
à écrit le 03/02/2024 à 9:11
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C'est devenu un gros business grâce à toutes ces entreprises de streaming et nous sommes le premier pays touristique du monde, combien d'artistes aimeraient tourner en France ? Combien orienteraient ils mêmes leur trame dans notre pays s'ils en avein...

à écrit le 03/02/2024 à 9:08
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Publicis qui sort déjà d'une condamnation en juillet 2023 pour avoir discriminé une de ses employée enceinte. A quoi nous sert cette entreprise en fait ? Débranchons le tuyau.

à écrit le 02/02/2024 à 18:44
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On vient seulement de le découvrir ? Il n'y a pas besoin d'études pour cela ! Quand les touristes vont en Égypte, pour un grand nombre d'entre eux c'est des souvenirs de littérature "mort sur le nil" , d'histoire , de série comme "stargate" ou de fil...

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