Alitalia : un nouveau remède de cheval (irréalisable ? ) pour survivre

Le conseil d'administration d'Alitalia a validé un plan de restructuration visant à réaliser un milliard d'économies d'ici à 2019 et à augmenter le chiffre d'affaires de 30%. Il sera soumis aux syndicats.
Fabrice Gliszczynski

Enième plan de la dernière chance pour Alitalia. Moins de trois ans après le "sauvetage" d'Etihad, en 2014, la compagnie aérienne italienne a décidé de lancer un nouveau plan de restructuration drastique pour tenter de survivre, alors qu'elle est en perte chronique depuis près de 20 ans.

Options payantes

Les objectifs sont pour le moins très ambitieux, voire irréalistes. Adopté ce mercredi en conseil d'administration, ce plan vise à économiser un milliard d'euros d'ici à 2019 (ce qui est énorme pour une entreprise qui réalise 2,9 milliards d'euros de chiffre d'affaires), tout en augmentant son chiffre d'affaires de 30% pour atteindre 3,7 milliards d'euros en 2019, grâce à la mise en place de toute une palette d'options payantes sur le moyen-courrier comme le choix des sièges, de l'enregistrement des bagages en soute, ou l'embarquement prioritaire ou encore  la vente à bord des boissons et des collations.

Développement vers les Amériques

Si 20 avions seront retirés de la flotte moyen-courrier, la compagnie entend augmenter le nombre de sièges par appareil. Sur les vols long-courriers, Alitalia continuera à offrir ses services habituels, et compte se développer "vers les Amériques". Ce qui ne sera une simple affaire, en tout cas vers les Etats-Unis, dans la mesure où la compagnie italienne fait partie de la "co-entreprise" transatlantique aux côtés d'Air France-KLM et Delta et que tout développement sur l'Atlantique nord doit avoir le feu vert des autres partenaires.

Sur le plan de la distribution, la compagnie entend notamment s'appuyer sur le numérique, en développant les ventes sur smartphone et tablettes.

"L'industrie aérienne est férocement concurrentielle et en perpétuelle évolution. Seul un changement radical permettra de redonner un futur à notre compagnie", a jugé son patron Cramer Ball, qui planche sur ce plan depuis des mois, sur fond de tensions avec les banques actionnaires Intesa Sanpaolo et UniCredit. "Nous devons nous transformer en une entreprise dynamique, attirante pour les clients qui ont un large choix pour voyager. Les habitudes d'achat ont été façonnés par la façon dont les transporteurs low cost vendent leurs produits", a-t-il ajouté.

Aucun détail n'a été donné sur les conséquences en termes d'emploi, mais la presse italienne évoque 2.000 à 3.000 suppressions de postes possibles, et une réduction de quelque 30% des rémunérations. Ce plan sera présenté jeudi au gouvernement italien, puis ensuite aux syndicats.

Pression sur les syndicats

La compagnie met la pression sur les syndicats en indiquant que "le financement du plan par les actionnaires (Etihad et les banques essentiellement) est soumis à l'acceptation par les syndicats d'un nouvel accord collectif de travail et de mesures relatives au personnel". Elle souligne que le plan inclut "une série de mesures radicales" et "indispensables pour donner de la stabilité à la compagnie et garantir sa soutenabilité à long terme". Outre l'action en termes d'emploi et de salaires, les économies d'un milliard d'euros en trois ans seront réalisées via la renégociation des contrats avec des sous-traitants ou fournisseurs (distribution, traiteur, services d'assistance à terre et dans les aéroports, etc.).

Malgré l'entrée de la compagnie d'Abu Dhabi Etihad à son capital en 2014, à hauteur de 49%, et malgré les fonds injectés par cette dernière, elle n'est pas parvenue à redresser la barre. Alors que la compagnie visait un retour à l'équilibre en 2016 et aux bénéfices en 2017, sa perte s'est élevée à 460 millions d'euros l'an passé et devrait encore atteindre plusieurs centaines de millions cette année. L'objectif du plan est d'être rentable en 2019.

Concurrence des low-cost

Alitalia est frappé de plein fouet par la concurrence féroce des compagnies à bas coûts qui détiennent aujourd'hui 47% du marché intérieur. Par ailleurs, sur le long-courrier, la compagnie a toujours souffert de la bipolarisation du marché entre Milan et Rome, composé de flux de trafic affaires sortant à Milan et de flux de trafic loisirs entrants à Rome. Cette structure de trafic a toujours empêché la compagnie d'avoir un hub solide. D'autant plus que la présence de deux aéroports à Milan a toujours accentué les difficultés.

Lire ici : pourquoi Alitalia ne gagne jamais d'argent?

Pour piloter ces changements, le conseil d'administration a décidé qu'une fois adopté le financement du plan, Luigi Gubitosi, un ancien dirigeant de la télévision publique Rai et de l'opérateur télécom Wind, deviendrait président exécutif de la compagnie. Il remplacera Luca Cordero di Montezemolo, qui avait joué ces derniers mois un rôle de médiateur en raison des tensions entre les actionnaires, et avait exprimé le désir de quitter son poste.

D'après les médias, les banques souhaitaient le remplacement de Cramer Ball, mais celui-ci est défendu par Etihad, et un compromis aurait été trouvé avec la nomination de Luigi Gubitosi, qui aura  des fonctions élargies par rapport à Luca Cordero di Montezemolo.

Fabrice Gliszczynski

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 4
à écrit le 16/03/2017 à 10:29
Signaler
Un avant goût de ce qui attend Air France si le projet boost n'arrive pas à être validé et mis en place. Le jour où les salariés d'Air France comprendrons que La majorité des syndicats sont les fossoyeurs de leurs emplois il risque d'être trop tard. ...

le 16/03/2017 à 12:50
Signaler
C'est exactement ce que j'allais écrire ! Si le personnel AF ne veut pas finir de la même façon, ils doivent prendre le taureau par les cornes, et admettre que comparativement à la concurrence européenne, ils sont surpayés ! A partir de là,il s doi...

le 16/03/2017 à 12:56
Signaler
Autre avantage important d'une telle opération : AirFrance aura tout intérêt à développer les promotions internes, pour faire évoluer son personnel vers une grille de salaires cohérente avec celles de la concurrence, et de recruter des "petits nouvea...

à écrit le 16/03/2017 à 7:46
Signaler
Si on additionne toute les millards qu'Alitalia voulait économiser durant ces dernières années, il ne restera plus rien.

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.