
Saviez-vous que la France est à la tête du plus grand réseau de voies navigables d'Europe ? 40.000 hectares de domaine public fluvial, 6.700 kilomètres de fleuves, canaux et rivières et 4.000 écluses, barrages, ponts-canaux sont entretenus, exploités et développés au quotidien par Voies navigables de France (VNF).
Un pilier de la transition écologique dans les transports ?
La mission de VNF est triple : créer les conditions du développement du transport de fret, concourir à l'aménagement du territoire et au développement touristique, et assurer la gestion hydraulique en garantissant la sécurité des ouvrages tout en luttant contre les inondations et le stress hydrique. Autrement dit, une consommation d'eau supérieure au stock réel.
Cet établissement public à caractère administratif sous tutelle de la direction générale des Infrastructures, des Transports et de la Mer, vient de signer avec les ministres de la Transition écologique et des Transports un contrat d'objectif et de performance (COP) sur dix ans pour améliorer les services rendus aux usagers des fleuves : logisticiens, compagnies touristiques...
« Le pari du COP est de faire du fluvial le premier mode de transports devant la route et le rail et de se dire que dans dix ans, ce sera un pilier de la transition écologique dans les transports », explique à La Tribune le directeur général de Voies Navigables de France, Thierry Guimbaud.
Un budget d'investissement qui va doubler en 2021
Jusqu'à la fin des années 1960-début des années 1970, le fluvial a effectivement été le premier mode de transport des humains et des marchandises. Jusqu'à ce que le développement d'un réseau routier et autoroutier à grande capacité le rende moins compétitif. Ajoutez à cela la désindustrialisation du pays qui fait que l'acheminement de matières premières lourdes a privilégié d'autres modes de livraison.
Le rapport de force serait en train de s'inverser. D'après les données de VNF, 2019 a connu une croissance du trafic commercial de 10% par rapport à 2018, et 2020, bien que cataclysmique du fait de la pandémie, a atteint le niveau de 2018. Pour inverser la tendance, l'opérateur d'Etat va doubler son budget d'investissement dans le cadre du contrat d'objectif et de performance (COP). De 150 millions d'euros, ce dernier va être rehaussé à 300 millions en 2021 pour atteindre 3 milliards d'euros d'ici à fin 2029.
« On est très loin de la limite de saturation »
L'accent va ainsi être mis sur la régénération des écluses, barrages et ponts-canaux, des installations anciennes et potentiellement à risques. Les céréaliers, les BTPistes, les transporteurs de déchets ou encore les industriels de l'aéronautique sont des habitués, mais d'autres acteurs économiques pourraient redécouvrir les voies d'eau.
« On pourrait faire passer quatre fois plus de bateaux qu'aujourd'hui. On est très loin de la limite de saturation à la différence de la route et du rail », assure Thierry Guimbaud, le DG de Voies Navigables de France.
La révolution numérique va également s'inviter sur les ouvrages d'art, avec l'installation de centres de télécommande et de systèmes d'automatisation en plus de la présence d'équipes physiques. Aujourd'hui, les bateaux sont déjà équipés d'écrans qui leur indiquent la position des autres navires et le temps avant d'arriver à une escale. Demain, d'autres informations pourront être envoyées à ces usagers.
Dernier sujet et non des moindres : le développement des infrastructures. C'est par exemple le canal Seine-Nord-Europe prévu fin 2028 entre la Seine et l'Escaut pour connecter les bassins de la Seine et de l'Oise à tout le réseau fluvial nord-européen.
Sans oublier les partenariats avec les collectivités arrosées par ces fleuves, canaux et rivières - l'opérateur d'Etat travaille ainsi avec le conseil régional d'Occitanie sur le canal du Midi - et les autres opérateurs de transport - une alliance fer et fleuve a été signée avec SNCF Réseau pour mutualiser les offres.
Des ressources propres amenées à dépasser les ressources budgétaires
En attendant, VNF bénéficie déjà de deux grandes sources de financement, la principale étant budgétaire : 250 millions d'euros issus du projet de loi de finances et entre 130 à 180 millions d'euros de l'Agence de financement des transports et des infrastructures (AFITF). Mais d'ici à deux à trois ans, du fait du COP, cette part va diminuer au profit des ressources propres, afin d'encourager l'opérateur d'Etat à capter des richesses localisées, notamment via les partenariats évoqués ci-dessus.
Des ressources propres qui existent déjà. D'une part, pour environ 125 millions d'euros, des redevances hydrauliques sont payées par tous ceux qui utilisent l'eau à des fins autres que la navigation, comme EDF qui puise de l'eau pour refroidir ses centrales nucléaires ou les agriculteurs pour irriguer leurs champs. De l'autre, pour près de 40 millions d'euros, des redevances d'usages de réseau, dont s'acquittent, à titre d'illustration, tous ceux qui installent une guinguette au bord de l'eau.
15 millions d'euros viennent enfin des péages d'usage, réglés à 50% par le fret et à 50% par le tourisme. « Pour les usagers, le coût est modique, mais si on leur donne une qualité de services supplémentaires, on pourra revoir les conditions tarifaires en conseil d'administration », précise le directeur général de VNF, Thierry Gimbaud. Par services supplémentaires, le haut fonctionnaire cite le déploiement d'infrastructures de recharge décarbonées (électricité, hydrogène...) ou l'ouverture de plus grandes amplitudes horaires pour les installations.
Pour rappel, un convoi fluvial de 4.500 tonnes représente 220 camions évités, et donc autant de pollution atmosphérique. Soit, selon toutes sources confondues, entre 8,8 et 37,4 g de dioxyde de carbone par tonne et par kilomètre en moins.
Sujets les + commentés