Pointé du doigt pour ses émissions de carbone, le transport aérien est contraint de multiplier les solutions pour atteindre ses objectifs de zéro émission nette de CO2 d'ici 2050. Si les carburants d'aviation durables (SAF) restent le principal vecteur de cette décarbonation encore à venir, le secteur développe en parallèle donc d'autres technologies pour réduire son empreinte, dont le captage direct et le stockage du carbone dans l'air (DACCS). Encore balbutiante, cette solution pourrait prendre de l'ampleur avec la signature d'un contrat entre Airbus et Easyjet, annoncée ce lundi.
Avec cet accord, Easyjet est la première à s'engager pour acquérir des crédits carbone auprès d'Airbus - dont le montant et le volume n'ont pas été révélés - que le constructeur fournira grâce à son partenariat avec la société américaine 1PointFive. Celle-ci développe actuellement une usine de captation de carbone dans le Bassin permien, au Texas (Etats-Unis). Prévue pour débuter ses services commerciaux mi-2025, celle-ci permettra de capturer 500.000 tonnes de CO2 dans l'atmosphère par an, une fois qu'elle sera pleinement opérationnelle. Une fois capté, le carbone sera stocké dans les formations salines souterraines de la région.
De grandes compagnies intéressées
Ce contrat fait suite à une lettre d'intention signée lors du salon de Farnborough, en juillet 2022, durant lequel Airbus a annoncé des discussions commerciales avec plusieurs compagnies aériennes pour cette solution. Outre Easyjet, Air Canada, Air France-KLM, International Airlines Group (IAG), le groupe Latam Airlines, le groupe Lufthansa et Virgin Atlantic ont ainsi signé des lettres d'intentions. Interrogé par La Tribune, Airbus indique être entré en discussions avec d'autres compagnies depuis.
S'il ne participe pas technologiquement à ce projet de DACCS, bien qu'il ait lui-même travaillé sur le sujet, le constructeur veut permettre de faciliter l'accès à cette solution pour les compagnies aériennes et la rendre plus abordable en jouant sur les volumes. Il a également investi en novembre dernier dans la société canadienne Carbon Engineering, maison-mère de 1PointFive.
Airbus a ainsi indiqué qu'il s'engageait sur un préachat de crédits auprès de 1PointFive pour l'équivalent de 400.000 tonnes d'émission de carbone sur quatre ans, soit 100.000 tonnes par an. En 2022, l'avionneur parlait initialement d'une fenêtre comprise entre 2025 et 2028, mais l'accord avec Easyjet porte sur des crédits entre 2026 et 2029. Selon une présentation faite par la compagnie, ces crédits ont été négociés avec un coût fixe sur l'ensemble de la période.
Un apport encore marginal
Au contraire des compensations, le DACCS est reconnu par SBTi (Science-Based Target initiative), un organisme internationalement reconnu et faisant autorité pour évaluer les stratégies de réduction des émissions de gaz à effet de serre en se basant sur des données scientifiques. L'an dernier, Easyjet avait d'ailleurs annoncé qu'elle abandonnait les compensations pour atteindre son objectif de zéro émission nette en 2050. Ce contrat avec Airbus ne pèse néanmoins pas lourd dans la balance : en 2022, la compagnie britannique a émis plus de 6,4 millions de tonnes de CO2.
Le captage carbone est pour l'instant vu comme un moyen annexe pour éliminer de l'atmosphère les émissions résiduelles, qui n'auront pas pu être évitées au préalable par l'amélioration des opérations, la plus grande sobriété des nouveaux avions, les nouvelles technologies (hydrogène, électrique entre autres) et bien sûr les SAF (dont le bilan carbone est calculé sur l'ensemble du cycle production-utilisation). Dans la feuille de route de l'Association internationale du transport aérien, le DACCS et les compensations doivent contribuer à hauteur de 19 % à l'objectif de zéro émission nette en 2050.
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