Energie renouvelable : l'alliance de l'Axe Seine entre Hidalgo, Mayer-Rossignol et Philippe se concrétise

Décarboner ensemble plutôt qu’isolément. Les maires de Paris, de Rouen et du Havre accouchent d’une Société d’Economie Mixte pour stimuler la production d’énergies renouvelables le long de l’axe Seine. Le but : démultiplier la capacité d’intervention de leurs trois collectivités qui promettent toutes la neutralité carbone à un horizon plus ou moins lointain … mais ne disposent pas du gisement de ressources nécessaires.
Nicolas Mayer Rossignol, Anne Hidalgo et Edouard Philippe lors de la première rencontre Axe Seine à Rouen
Nicolas Mayer Rossignol, Anne Hidalgo et Edouard Philippe lors de la première rencontre Axe Seine à Rouen (Crédits : Alain Aubry - MRN)

Qu'importe qu'ils roulent pour des écuries différentes. Rien ne semble pouvoir perturber la lune de miel entre Anne Hidalgo, Edouard Philippe et Nicolas Mayer Rossignol. Campagne présidentielle ou pas, les maires de Paris, de Rouen et du Havre paraissent décidés à poursuivre leur marche en avant sur la vallée de Seine par-delà les contingences politiques.

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Après les manœuvres d'approche et la création d'une « entente » à laquelle s'est joint Patrick Ollier, président de la Métropole du Grand Paris, vient le temps du concret. Comme promis lors du troisième acte d'octobre 2021, les intéressés donnent ces jours-ci le coup d'envoi d'une Société d'Economie Mixte dont le nom de baptême - Axe Seine Energies Renouvelables ou ASER - résume l'ambition.

Approuvée cette semaine par les élus de la Métropole Rouen Normandie (MRN) et de la Communauté urbaine du Havre, sa création doit être avalisée dans quelques jours par l'assemblée du Grand Paris et dès mercredi prochain (9 février) par le Conseil de Paris.

Sauf changement de dernière minute, le vote aura lieu en la présence, inhabituelle dans cette enceinte, du patron de la MRN et de l'ancien premier ministre qu'Anne Hidalgo a conviés quitte à susciter des crispations dans leurs camps respectifs.

Qu'elle sera verte ma vallée

Mais une Société d'Economie Mixte, pourquoi faire ? S'ajoutant à la liste déjà longue des SEM vouées aux ENR (il en existe plus d'une centaine en France), l'ASER, qui sera dotée d'un capital de départ d'un peu moins de 8 millions d'euros*, se donne pour vocation « d'accélérer la décarbonation » en stimulant la production d'énergies renouvelables dans la vallée de Seine.

Ses fondateurs font feu de tous bois. Sont admis à concourir le solaire, l'éolien, le bois énergie, l'hydrogène, la méthanisation, l'hydraulique, la géothermie et la valorisation de la chaleur fatale. Objectif : mobiliser plusieurs canaux de financement (publics, privés et citoyens) pour susciter l'émergence de projets. Et au passage, "tenter" d'honorer les promesses de neutralité carbone des exécutifs concernés. "Tenter" car l'engagement sera difficile à tenir comme le concède Marie Atinault, vice-présidente  de la Métropole de Rouen et cheville ouvrière du projet.

« En réalité, aucune de nos collectivités n'a sur son territoire le gisement de ressources énergétiques nécessaires pour y parvenir ».

En clair, sauf à couvrir l'entièreté des bâtiments et le moindre mètre carré de trottoir de panneaux photovoltaïque et/ou d'éoliennes ce qui tient de la chimère, il leur sera impossible d'arriver aux 100% ENR dans l'état actuel de l'art. D'où le choix d'un outil mutualisé et suffisamment « riche » pour opérer à une échelle plus vaste que les seules métropoles, jusque dans les territoires ruraux ou semi-ruraux qui maillent la vallée de Seine.

Fixer la valeur sur le territoire

Vue sous cet angle, une Société d'Economie Mixte confère des arguments de poids. Parce que gouvernée par des acteurs publics, elle devrait garantir aux localités concernées une meilleure prise en compte de leurs attentes. C'est d'ailleurs inscrit au fronton de la SEM. Les porteurs de projets qui brigueront son aide devront s'engager « en termes de financement participatifs, de concertation territoriale et de retombées positives pour les territoires et les habitants » est-il précisé dans son texte fondateur.

« Quand un gros développeur d'éolien ou de solaire arrive avec des fonds étrangers, il s'embarrasse rarement du niveau de participation des riverains ou de la protection des paysages ce que fera la SEM », promet Marie Atinault.

L'ASER, bien que soumise à des exigences de rentabilité, devrait aussi permettre de mieux fixer la valeur sur le territoire en assurant aux collectivités un retour financier plus important que celui qu'offre généralement le secteur privé. « Développée par un acteur privé, une éolienne moderne rapporte près de 400.000 euros mais elle ne restitue au territoire que 30.000 euros, soit environ 8% », rappelle ainsi le cabinet GP Conseil dans une étude édifiante consacrée aux SEM ENR et publiée au printemps dernier.

Quel mode opératoire ?

Voici pour les principes. Reste maintenant aux trois villes et métropoles à s'entendre sur une stratégie d'investissement. Pas exactement un point de détail. Il s'agira par exemple de trancher en faveur - ou non - d'un soutien à l'agrivoltaïsme : ce système étagé qui associe une production d'électricité photovoltaïque et une production agricole est controversé.

Une chose est sûre. Les arbitrages devront intervenir rapidement car il est prévu de lancer un premier appel à manifestation d'intérêt d'ici la fin de ce trimestre. Celui-ci portera sur la construction de centrales solaires de petite ou de grande taille (flottantes, au sol ou en toitures) le long du fleuve.

Les lauréats de ce première écrémage devraient être connus à l'automne. Une fois retenus, ils bénéficieront d'un accompagnement sous diverses formes : d'une prise de participation financière, à la mise à disposition de terrains publics en passant par des contrats d'achat d'énergie ou un soutien à l'ingénierie. De ce que l'on en sait, les opérateurs sont déjà dans les starting blocks. « La SEM est un très bel outil qui permettra d'harmoniser une approche sur ce territoire qui dispose d'un potentiel formidable », commente par exemple Nicolas Maccioni, vice-président du producteur d'ENR indépendant Akuo Energy. Lequel devrait s'aligner sur la ligne de départ le moment venu.

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*L'actionnariat se répartira comme suit : 50% à parts égales pour les Métropoles de Rouen et du Havre, 25% pour la Ville de Paris et la Métropole du Grand Paris à parité,  22,5% pour la Caisse des dépôts et 2,5% pour la coopérative Energie Partagée Investissement.

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