Le bâtiment de demain sera un bâtiment augmenté et un centre de profits

ANALYSE. Les nouveaux bâtiments vont bénéficier de la nouvelle vague d'innovations digitales. Ces « Smart Building » vont notamment améliorer l'expérience des utilisateurs, réduire la consommation d'énergie et renforcer la sécurité des personnes et des installations. Par Xavier Dalloz, consultant spécialisé dans les nouvelles technologies.
Le « smart building » du producteur étasunien de semi-conducteurs Intel, à Petah Tikva, près de Tel Aviv en Israël.
Le « smart building » du producteur étasunien de semi-conducteurs Intel, à Petah Tikva, près de Tel Aviv en Israël. (Crédits : Reuters)

Le concept de Smart Building fait référence aux bâtiments dont les installations et les systèmes maximisent l'efficacité et la durabilité tout en assurant la sécurité et le bien-être des personnes.

L'intégration de l'intelligence dans le bâtiment est obtenue en déployant des capteurs et des actionneurs dans tout le bâtiment et en les intégrant à des systèmes tels que le (BMS), système d'automatisation du bâtiment (BAS), etc.

Plus concrètement, un bâtiment intelligent consiste en un réseau de :

  • capteurs interconnectés pour générer des données brutes,
  • micropuces pour traiter les données
  • actionneurs pour contrôler les données.

De plus, les données de construction peuvent aussi être monétisées pour :

  • améliorer la qualité des produits en comprenant les causes de défaillance des équipements dans des situations réelles plutôt que dans des environnements d'usine contrôlés.
  • être utilisées par les experts en apprentissage automatique et en intelligence artificielle comme ensembles de données de formation pour leurs algorithmes, tels que les algorithmes d'optimisation énergétique, la maintenance prédictive et la classification des capteurs et des points de données.
  • aider les planificateurs de construction à comprendre comment le feu se propage et comment améliorer la conception de nouveaux bâtiments pour créer de meilleurs systèmes de sécurité.

L'objectif du bâtiment de demain est de vendre ou d'échanger des données ce qui nécessitera de plus en plus d'applications à exécuter sur le BOS (Building Operating System) pour monétiser ces données. Les bâtiments de demain seront donc obligatoirement construits sur un data center. On parlera de bâtiment augmenté pour décrire l'émergence de ces nouvelles propriétés d'un bâtiment.

Plus concrètement, l'objectif d'un bâtiment augmenté est de répondre aux besoins suivants :

  • Automatisation du bâtiment :
    • Il fournit un contrôle centralisé des systèmes CVC, de sécurité, d'éclairage et d'autres systèmes.
    • Ces systèmes sont compatibles IoT et ont la capacité de surveiller et de contrôler des paramètres tels que la température, l'eau, l'humidité, la pression, l'électricité, etc.

  • Modélisation des données du bâtiment (BIM)
    • Le BIM est un outil très pratique pour l'entretien et l'utilisation continue des bâtiments, le BIM agit comme une sorte de « manuel » du bâtiment qui donne accès à des profils d'actifs en temps réel ainsi qu'à une connaissance accrue de l'emplacement des actifs.
    • le BIM permet des tests sans jamais avoir à toucher physiquement l'espace, ce qui signifie des temps d'arrêt réduits et des dépenses de main-d'œuvre réduites.

  • Internet des objets (IoT) :
    • Il utilise la plate-forme Internet Protocol (IP) pour connecter des capteurs et des micropuces et pour analyser et échanger des informations.
    • Les appareils compatibles IoT sont connectés et contrôlés sur Internet via une application mobile.

  • Intelligence artificielle et apprentissage automatique (IA et ML) :
    • Les machines seront autonomes et fonctionneront sans intervention humaine.
    • L'intégration de l'IA aux capteurs IoT automatise non seulement les fonctions du bâtiment, mais améliore également les opérations, le rend plus réactif et efficace.
    • Par exemple, un système de gestion des équipements peut détecter des irrégularités dans son fonctionnement de l'équipement, comme un réfrigérateur qui fuit, en fonction de ce qu'il a « appris » sur l'entrée ou la sortie d'énergie de la machine lorsqu'elle fonctionne.

  • Edge computing et le cloud computing
    • Les appareils et capteurs Edge suivent une condition locale, transfèrent les données vers une passerelle locale ou distante nécessitant un réseau à faible vitesse.
    • Les données sont collectées, corrélées et traitées pour une action ultérieure. Ses applications concernent par exemples : la gestion des installations, les économies d'énergie, les parkings, l'auto-nettoyage, les systèmes de sécurité, la gestion des déchets, etc.

  • Réalité augmentée (RA) :
    • La technologie AR va s'imposer pour la gestion des installations lorsqu'elle est utilisée en combinaison avec le BIM en utilisant une paire de lunettes compatibles AR tout en inspectant un équipement.
    • Ces lunettes permettent en effet d'afficher des représentations numériques sur chaque équipement, offrant une reconnaissance et des informations supplémentaires. Ces connaissances peuvent inclure des instructions écrites, des alertes, des dates d'installation et la résolution de problèmes, qui sont toutes particulièrement utiles lors de pannes ou d'urgences.
    • Ceci est utile dans les chantiers de construction. AR permet en effet de visualiser les plans en 3D, permet même de visualiser les étapes de construction à venir et aide à créer une précision et une exactitude extraordinaires.

  • Réalité virtuelle (VR) :
    • Elle aide les architectes à faire l'expérience de la promenade autour du bâtiment bien avant qu'il ne soit construit.
    • Cela leur permet de repenser la structure précisément en fonction de l'expérience.

  • Drones
    • Les drones et l'intelligence artificielle sont également appelés à jouer un rôle essentiel dans l'avenir de l'industrie de la construction.
    • Les drones vont permettre de cartographier les chantiers, planifier les travaux et guider les véhicules autonomes tels que les nacelles élévatrices sur le chantier.
    • Les drones peuvent effectuer des sondages pour un espace de bureau, un commerce de détail ou même une épicerie en recherchant dans les étagères des produits périmés.
    • Les drones peuvent fournir une surveillance de sécurité et agir sur des déclencheurs basés sur l'IA.

Il faut donc ne plus penser le bâtiment augmenté comme une automatisation du passé. Mais comme une réinvention du building construit sur une nouvelle architecture divisée en différents niveaux que résume très bien P. Srividya :

  • Niveau physique :
    • Il dispose de services d'interface avec différents systèmes de construction tels que le système de chauffage, de ventilation et de climatisation (CVC), l'éclairage, le feu, la sécurité, etc.
    • Les services d'interface comprennent des adaptateurs et des connecteurs. À ce niveau, les capteurs collectent les données et les actionneurs exécutent la tâche requise.
    • Par exemple, le niveau d'éclairage peut être détecté et ajusté automatiquement pour correspondre à l'heure de la journée. Les systèmes de ce niveau communiquent entre eux par le biais d'informations communes et d'un modèle opérationnel. Les adaptateurs sont reliés par des connexions locales et utilisent des protocoles standard de l'industrie.

  • Niveau système :
    • Il fournit une intégration au niveau physique des différents systèmes de construction.
    • Ce niveau interagit avec les adaptateurs au niveau physique via des connexions locales.
    • Les informations se présentent sous la forme de signaux et de commandes entre les sous-systèmes.
    • Certains des services fournis par ce niveau incluent l'archivage de données, la corrélation d'événements, etc.

  • Niveau d'intégration des processus :
    • Ce niveau assure l'automatisation et la synchronisation des processus.
    • Les services logiciels disparates sont connectés par un service d'entreprise.
    • Les processus de gestion de construction sont créés à l'aide de l'architecture orientée services, qui synchronise les événements, les services de construction au niveau abstrait et les données passées de manière à ce qu'elles soient réutilisables.

Pour résumer, les enjeux peuvent se résumer de la façon suivante :

  • Améliorer de l'expérience des utilisateurs
    • Ajustement des paramètres du bâtiment -tels que la température ou l'humidité
    • Suivi des déplacements pour minimiser l'attente et éviter les accumulations,
    • une plus grande connectivité avec une faible latence, ou encore un plus grand impact visuel pour le plaisir de l'utilisateur.
  • Réduction de la consommation d'énergie
    • Seuls les services nécessaires soient fournis.
    • Un meilleur pilotage de l'éclairage intelligent, la surveillance prédictive et le contrôle de l'énergie
  • La sécurité d'un bâtiment concerne les personnes, les actifs et le bâtiment lui-même.
    • Une détection précoce de tout incident, répondant par des mesures en fonction de l'impact grâce à des technologies telles que la vidéo-analyse ou la biométrie, couplées à des drones et des capteurs.

Plus concrètement, voici quelques exemples d'avantages d'un bâtiment augmenté :

  • les fabricants d'équipements CVC (chaudières, refroidisseurs, etc.) pourront comprendre comment leur équipement est utilisé dans des scénarios de vie en temps ce qui permettra de mieux adapter ces équipements aux besoins de leurs clients.
  • les robots aspirateurs qui vont permettre le partage de données cartographiées du bâtiment.
  • Le traitement des données sera nécessaire pour savoir exactement comment et quand un espace est utilisé offre la possibilité d'optimiser les opérations et les dépenses de manière plus ciblée et efficace.

Notons aussi que le succès des « smart cities » est évidemment liés à celui des bâtiments augmentés. Les capteurs dans les bâtiments urbains à eux seuls ne rendent pas les bâtiments et la ville « intelligents ».

Par exemple, le jumeau numérique d'un bâtiment permet d'anticiper et de piloter l'éclairage, la production et le stockage d'énergie, la maintenance prédictive. Un autre exemple de la convergence smart buiding/smart cities est celui de l'énergie.

Utilisés pour la production et le stockage d'énergie, les bâtiments peuvent également jouer le rôle d'interface à l'échelle urbaine, en servant de micro-réseaux locaux ou encore en limitant automatiquement la consommation lorsque le réseau énergétique de la ville indique qu'il est en surcapacité.

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Commentaire 1
à écrit le 12/04/2023 à 21:42
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"durabilité " rien qu'à ce stade j'ai un gros doute quand je vois des immeubles qui ont tout juste 15 ans et qui sont déjà en ravalement de façades ou des crépis qui tombent tout juste finis . L'auteur de l'article se fait plaisir mais ignore qu'il...

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