Dunkerque, symbole du renouveau industriel tricolore

Il y a une quinzaine d'années, le Dunkerquois semblait englué dans le cercle vicieux de la désindustrialisation. Mais à peine élu en 2014, le nouveau maire de Dunkerque, Patrice Vergriete, va faire de la cité portuaire du Nord de la France un démonstrateur de l'industrie décarbonée du XXIe siècle. Résultat, la ville et le territoire qui l'entoure vit un renouveau industriel impressionnant qui se traduit aujourd'hui par la création de 20.000 emplois.
Dunkerque a su tirer partie de tous ses atouts, notamment du Grand Port Maritime de Dunkerque (GPMD), capable d'accueillir les plus grands navires au monde.
Dunkerque a su tirer partie de tous ses atouts, notamment du Grand Port Maritime de Dunkerque (GPMD), capable d'accueillir les plus grands navires au monde. (Crédits : iStock)

Attirer sans renier son héritage industriel. Plus facile à dire qu'à faire lorsque, en 2014, Patrice Vergriete, élu nouveau maire de Dunkerque divers gauche, décide d'organiser des États généraux de l'emploi local (EGEL). D'autant que quatre ans auparavant, la Raffinerie des Flandres de TotalEnergies mettait un point final à ses activités de raffinage. Le territoire semblait ainsi englué dans le cercle vicieux de désindustrialisation...

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À l'époque, le credo semblait fou : Dunkerque était voué à devenir l'avant-garde de la transition énergétique, en devenant un démonstrateur de l'industrie décarbonée du XXIe siècle. Dans l'un des territoires émettant le plus de CO2 en France ! C'était l'esprit même de la troisième révolution industrielle, mouvement lancé à l'époque par la Chambre de commerce et d'industrie (CCI) des Hauts-de-France et le conseil régional (alors présidé par le socialiste Daniel Percheron). L'objectif était alors de faire basculer l'ex-Nord-Pas-de-Calais dans une ère décarbonée. Rebaptisée Rev3, la dynamique est restée une priorité, avec plus de 1.500 projets accompagnés depuis 2012.

Grâce à la concertation de tous les acteurs locaux, le renouveau du Dunkerquois tous azimuts était lancé : nouveau plan de mobilité avec notamment des bus gratuits à hydrogène, mise en avant des atouts touristiques d'un littoral industriel et même tournage d'une superproduction, Dunkirk, de Christopher Nolan... Mais aussi et surtout, une union sacrée de tous les acteurs locaux : Communauté urbaine, Grand Port Maritime, acteurs industriels et entreprises locales en tête, affichant une volonté de booster l'économie.

Des projets qui se multiplient

Ce qui était alors un vœu pieux pour le Dunkerquois se transforme, quasiment dix ans plus tard, en réalité. Dans un territoire où près d'un quart des emplois salariés officient dans la sidérurgie-métallurgie (BASF, Comilog, ArcelorMittal, Aluminium Dunkerque, Ascometal, Dillinger France...), la chimie pétrochimie (raffineries de Mardyck et de Total, BASF, Comilog produisant du silicomanganèse...) ou la production d'énergie (Dunkerque LNG propriétaire du terminal de gaz naturel liquéfié), les nouvelles implantations industrielles se multiplient.

Construction de deux réacteurs EPR dans la centrale EDF de Gravelines : jusqu'à 8.000 emplois au plus fort du chantier (2026-2032) et 600 emplois ensuite en exploitation. Arrivée de Verkor, fabricant de cellules et modules de batteries pour véhicules électriques : 1.200 emplois d'ici à 2027, sans oublier les 2.250 postes induits par l'arrivée d'un cluster de sous-traitants. Chantier de décarbonation du géant mondial de la sidérurgie Arcelor Mittal : 1.000 à 1.500 personnes rien que pour celui de 2024-2026. Début 2023, l'Agence d'urbanisme et de développement de la région avait calculé que 16.000 emplois seraient créés dans le Dunkerquois dans les cinq à dix prochaines années !

Et ce n'est pas tout. De fait, l'installation du fabricant de batteries électriques taïwanais ProLogium Technology avec l'objectif d'ouvrir une gigafactory en 2026 devrait générer 4.000 postes, soit un total de 20.000 postes dans le Dunkerquois.

« Un an tout juste après l'annonce de l'implantation de la première usine de production de batteries de la start-up française Verkor, l'arrivée de ProLogium Technology est une nouvelle victoire collective pour le Dunkerquois, mais aussi pour la France, obtenue pour une large part grâce à la volonté de réindustrialisation de notre pays voulue par le président de la République et au plan d'action mis en œuvre par le gouvernement », soulignait ainsi Patrice Vergriete, maire de Dunkerque et président de la Communauté urbaine, dans un communiqué mi-mai.

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« Longueur d'avance »

Il faut dire que Dunkerque a su tirer parti de tous ses atouts. D'abord, un Grand Port Maritime de Dunkerque (GPMD), capable d'accueillir les plus grands navires au monde. Ensuite, du foncier encore largement disponible parfois même réaménagé pour être proposé clef en main. Enfin, être au centre d'un « nœud énergétique », avec le développement d'un réseau de chaleur jusqu'alors alimenté exclusivement par ArcelorMittal, la centrale nucléaire de Gravelines et le futur parc éolien en mer capable de délivrer 600 mégawatts.

« La petite longueur d'avance que nous avons prise sur tous ces points fait aujourd'hui l'attractivité et la compétitivité internationale retrouvées de notre territoire », se réjouit le premier édile.

L'envie a fait le reste. Notamment avec la mise en place du pôle Euraénergie, cluster développé par la Communauté urbaine de Dunkerque, qui est venu créer une émulation autour de la transition énergétique, la décarbonation et l'économie circulaire. En décrochant le label Territoire d'innovation décerné par le Premier ministre en 2019, Dunkerque a empoché une dotation de 37,5 millions d'euros (l'agglomération la mieux dotée de tous les lauréats). Une enveloppe à effet levier qui a permis au final de mobiliser 288 millions d'euros de projets.

« Société de l'économie décarbonée »

« Dunkerque, l'énergie créative » a aimanté plusieurs entreprises d'envergure, comme H2V, spécialiste de la production d'hydrogène vert, fabriqué à partir d'électricité issue des énergies renouvelables ou encore le consortium piloté par Engie et associant l'Américain Infinium. Celui-ci va faire naître une nouvelle usine capable de transformer chaque année 300.000 tonnes de dioxyde de carbone en 100.000 tonnes de carburants de synthèse.

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« À Dunkerque, nous souhaitons ainsi prendre une longueur d'avance sur la conception de la société de l'économie décarbonée, pour inventer d'autres façons d'envisager les mobilités et la gestion des ressources notamment, résume Patrice Vergriete. En ce sens, la nouvelle page qui s'ouvre aujourd'hui pour notre territoire est une chance extraordinaire pour ses habitants d'inventer le monde de demain. »

En avril 2022, le territoire dunkerquois a justement été sélectionné par la Commission européenne pour participer à la mission de l'Union visant à rendre 100 villes européennes « neutres pour le climat et intelligentes d'ici à 2030 ».

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