La Normandie sort la grosse cavalerie pour conforter sa filière équine

Depuis qu’elle a accueilli les Jeux Equestres Mondiaux, la région où le cheval est roi n’a de cesse de fortifier son « équisystème » de sport et de loisir pour couper l’herbe sous le pied de la concurrence étrangère. Décryptage.
Le futur pôle équestre du Haras du Pin est dimensionné pour accueillir 250 compétitions par an
Le futur pôle équestre du Haras du Pin est dimensionné pour accueillir 250 compétitions par an (Crédits : Haras du Pin)

Ce vendredi 6 mai, c'est jour de fête au Haras du Pin. Sous un soleil de plomb, les présidents de la Région Normandie et du Département de l'Orne posent la première pierre de ce qui doit devenir « un pôle international du sport équestre ». Pour retrouver l'éclat de l'ancien « Versailles du cheval » tombé en désuétude, Hervé Morin et Christophe de Balorre ont vu grand. Quatre carrières en sable fibré pouvant supporter le galop des chevaux jusqu'à -15°, 300 boxes fixes, 200 boxes démontables, un espace d'accueil et de restauration et des places de parking à foison.

Les collectivités cravachent

L'équipement est dimensionné pour accueillir 250 compétitions par an. Il constituera le socle autour duquel les élus veulent bâtir -moyennant l'apport d'investisseurs privés-, un « resort de sport et de loisir ». Lequel est censé devenir « la première destination rurale thématique de France ». Message subliminal ? Ici, on ne badine pas avec une filière qui pèse 1,3 milliard d'euros de chiffre d'affaires pour 18.000 emplois : plus que l'automobile et la chimie réunies.

Le Pin, comme l'appellent les initiés, est loin d'être le seul chantier initié par la puissance publique au profit de l'animal à crinière. Dans la Manche, le haras national de Saint Lô va, lui aussi, bénéficier d'importants investissements pour moderniser ses écuries vieillissantes. Dans le Calvados, les deux sites du campus « Equine Valley » (Goustranville et Saint Contest) font l'objet de lourds travaux d'extension avec en point d'appui la relocalisation en 2024 du département équin de l'école vétérinaire de Maisons-Alfort (300 étudiants et chercheurs) arraché de haute lutte à l'Île-de-France.

« Qui remporte les médailles d'or aux JO ? »

Ces nouvelles infrastructures viendront utilement compléter le Pôle International du Cheval (PIC) construit à Deauville à l'initiative de son maire Philippe Augier souligne Laurence Meunier, présidente du pôle de compétitivité Hippolia. « Quand tous ces projets seront achevés, aucune région du monde ne pourra revendiquer un tel continuum de l'élevage à la compétition en passant par la recherche, l'enseignement et le loisir », jure celle qui est aussi à la tête du Conseil des chevaux.

Aujourd'hui, l'enjeu est important pour la filière face à des concurrents belges ou allemands qui « grattent dans le box » comment disent les Anglais. Pour espérer tenir son rang de place forte du sport équestre, la Normandie doit cravacher, mais elle tient la corde, à écouter Hervé Morin. « On a la chance d'être les meilleurs. Regardez qui remporte le prix d'Amérique, le prix de l'Arc de Triomphe et les médailles d'or aux JO. Presque systématiquement des chevaux nés dans des élevages normands ! », martèle-t-il. Tout juste, l'intéressé concède-t-il quelques faiblesses en matière de tourisme équin. « On peut faire mieux s'agissant des circuits et des gîtes ».

Haras qui rient

Pour autant, l'ancien ministre de la Défense a de bonnes raisons de se montrer optimiste. Grâce à la caisse de résonance des Jeux Equestres Mondiaux, beaucoup d'éleveurs ont retrouvé le chemin de la côte fleurie ou du Cotentin, faisant les affaires d'une ribambelle de prestataires de services : vétérinaires, constructeurs de vans, selliers, fabricants d'aliments... « L'environnement est porteur. Par an, il y a facilement entre cinq et six investissements privés dans des haras de bonne taille et la demande reste forte grâce au foncier abondant et abordable », confirme Paul-Jacques Tanvez, PDG de Normandie Drainage, entreprise leader dans l'aménagement de haras.

En atteste ces belles prises réalisées récemment comme celle de la prestigieuse écurie de la famille Paillot. Installés aux Etats-Unis, ces Français fortunés, gros pourvoyeurs de « cracks », viennent de racheter une exploitation cidricole en déshérence dans le pays d'Auge. La Paillot Equestrian a pour projet d'y aménager un centre de dressage, d'entraînement et d'exportation de chevaux de saut d'obstacles de « très haut niveau ».  « C'est un exemple type du recentrage vers la Normandie que l'on observe depuis quelques années », commente Paul-Jacques Tanvez.

Reste à tenir l'allure dans un milieu souvent vu comme élitiste où la pénurie de main d'œuvre s'aggrave et où la question du bien-être animal s'invite au grand galop.

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