Cargo à voiles : l'armateur Neoline choisit Neopolia

A l’issue d’un appel d’offres international, l’armateur nantais Neoline vient de signer une lettre d’intention avec l’entreprise Neopolia Mobility pour la construction de son navire à voiles. Reste à boucler les financements. Le chantier pourrait démarrer dès cet été pour une mise en service en février 2024 et, d’ici là, contribuer à la création d’un nouveau site industriel mutualisé à Saint-Nazaire.
A propulsion principale vélique, le cargo roulier de Neoline doit permettre une économie de 80% à 90% de la consommation et des émissions associées par rapport à un navire conventionnel de même taille.
A propulsion principale vélique, le cargo roulier de Neoline doit permettre une économie de 80% à 90% de la consommation et des émissions associées par rapport à un navire conventionnel de même taille. (Crédits : neoline)

Retoquée une première fois, c'est finalement l'offre reconstruite par la société Neopolia Mobilty que l'armateur Neoline retient pour lancer la construction de son premier navire à voiles, un cargo roulier de 136 mètres destiné à assurer des liaisons décarbonées entre l'Europe, les Etats-Unis et l'Amérique du Nord. Un chantier qui devrait aussi contribuer à l'émergence d'un site industriel dans le bassin nazairien autour de la construction navale, de l'éolien, etc.

 « L'offre de Neopolia Mobility est ressortie de notre appel d'offres comme étant la mieux à même de concilier nos exigences techniques, nos contraintes budgétaires et calendaires, ainsi que notre souhait de participer au développement de notre région », indique Jean Zanuttini, Président de Neoline, qui vient de signer une nouvelle Lettre d'intention de Commande (LOI). « Sur des bases en adéquation avec nos besoins et nos capacités », précise-t-il.

Des propos sibyllins qui veulent mettre au diapason l'ambitieux modèle économique d'une jeune entreprise et les exigences d'une logique industrielle qui implique vingt-trois (Mauric, MYG design, PL &Mer...) des deux-cent-quarante entreprises du réseau Neopolia.

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Au lendemain d'une première lettre d'intention signée en 2019 avec Neopolia, Neoline avait finalement remis en cause le processus et demandé une baisse de 5% du tarif d'un projet comprenant à la fois la construction de la coque et du gréement.  « A ce prix-là, on ne savait pas faire en un seul lot. Les dispositifs de garanties étaient difficiles à trouver», reconnait Alain Leroy, Président de Neopolia.

Un nouvel appel d'offres international a donc été lancé en fin d'années 2020 où aucun de la dizaine de chantiers et groupements d'entreprises consultés n'aurait été en mesure de s'aligner avec un seul lot. Les discussions ont finalement repris entre les deux acteurs locaux autour d'un projet scindé en deux parties cette fois. La fabrication de la coque d'un côté, le gréement de l'autre.

« Nous avons accepté le principe de deux lots avec deux contrats juridiques distincts ; l'un pour le navire, l'autre pour le gréement », reconnait Jean Zanuttini.

Et du coup, les conditions sont devenues plus acceptables pour Neopolia qui a réussi à réduire ses tarifs. Le budget se situerait aujourd'hui à un peu plus de 50 millions d'euros. Après ce « coup de chaud et ce coup de froid », l'armateur et Neopolia Mobility ont trouvé un terrain d'entente et renégocié les contrats.  Le bouclage des schémas financiers est en cours de part et d'autre.

La coque sera construite en Turquie

Néoline est soutenue par l'Etat, le syndicat professionnel du secteur maritime Gican (Groupement des Industries de Construction et Activités Navales) et la région des Pays de la Loire qui vient de lui octroyer un prêt de 1,3 million d'euros.  Il s'agit pour l'armateur de poursuivre la conquête de clientèle et de finaliser son tour de table, autour du groupe Sogestran, investisseur de référence qui a rejoint le projet en juin dernier.

La jeune entreprise a déjà convaincu Renault, Manitou Group, Beneteau, Jas Hennessy & Co, Michelin et Clarins d'embarquer du fret vers l'Amérique du Nord. « Nous sommes quasiment plein dans le sens Europe-Amérique du Nord et devrions annoncer de nouveaux contrats avec des chargeurs dans les prochaines semaines et avons de la place dans l'autre sens », précise Jean Zanuttini.

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La scission du dossier ayant permis de réduire le coût des garanties bancaires et des financements, Neopolia finalise de son côté son schéma financier. « Nous avons bataillé pour que notre offre soit à la fois la mieux placée économiquement en Europe, et également la plus percutante sur le plan technique. L'exercice n'a pas toujours été aisé !  Nous avons construit, déconstruit, pensé, repensé sans cesse notre offre, nous avons sonné à de nombreuses portes...», reconnait Alain Leroy, président de Neopolia, qui finalise les dispositifs de garantie et contre-garantie avec les institutions bancaires.

Les contrats, en cours de constitution, devraient être signés à la fin août. Déjà amorcées pour réserver les sites industriels nécessaires et se préserver de dérives de coûts sur les matières premières, les études, confiées au cabinet d'architecture navale Mauric vont véritablement démarrer dès cet été. La construction sera menée en plusieurs phases et devrait s'étaler sur 31 mois.

Le gréement, l'aménagement et l'embarquement seront totalement réalisés en France. Faute de pouvoir être accueilli par les Chantiers de l'Atlantique dont le plan de charge mobilise ses installations pour les dix prochaines années,  « La construction de la coque, dans la mesure où il n'y pas de chantiers français capables d'accueillir des navires de cette taille, sera, en accord avec Neoline, construite par le chantier KSS en Turquie », explique Alain Leroy. La livraison devrait intervenir en février 2024.

Réindustrialiser le bassin nazairien

En parallèle, Neopolia s'investit dans le cadre du programme « Territoires d'Industrie » pour créer un grand site industriel mutualisé, baptisé Agora, à Saint-Nazaire, qui permettra de construire des navires de 100 à 150 mètres, des lignes d'assemblage pour le spatial ou l'aéronautique, des structures pour les énergies marines renouvelables...

Des discussions sont en cours avec le port de Nantes-Saint-Nazaire pour trouver le lieu ad'hoc et utiliser les moyens existants.

« La mutualisation nous permettra d'optimiser les coûts. On espère que le dernier trimestre nous permettra de commencer à découper des tôles», explique Alain Leroy « L'idée, c'est de faire en sorte que la filière vélique que l'on pense développer sur la base du bateau s'installe dans l'Agora. Il y a une demande importante de construction de navires d'une centaine de mètres en France, et l'on voudrait ainsi réindustrialiser en France la construction de bateaux de 100 à 150 mètres. Il s'agira aussi de créer des lignes d'assemblages pour prendre des parts de marché sur la fabrication d'outillages géants pour les lancements spatiaux et l'éolien en mer », esquisse le président du réseau Neopolia.

Le réseau est aujourd'hui structurée autour de cinq clusters (Marine, Aerospace, Terrestre, EO et EMR, Energies et Mobilités) pour aller chercher des marchés collaboratifs. Pour ce faire, en 2018, l'association a fondé la SAS Neopolia Solutions, avec des partenaires bancaires (Crédit Mutuel, CIC Ouest, Crédit Agricole Arkea) et industriel (Les chantiers de l'Atlantique). Cette maison mère chapeautant Neopolia Energie et Neopolia Mobility, s'apprête donc à accrocher Neoline à son tableau de chasse, après Thales et la Direction générale de l'armement.

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Commentaires 2
à écrit le 19/06/2021 à 4:27
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Citoyen blase joue au loto.

à écrit le 19/06/2021 à 0:18
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Entretemps des autres redeveloppent le Flettner Rotor Sail - une tres bonne technologie complementaire.

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