En Allemagne, Vodafone veut jouer des coudes avec Deutsche Telekom

En rachetant pour plus de 18 milliards d’euros les actifs de Liberty Global en Allemagne et dans d’autres pays européens, le groupe britannique espère tailler des croupières à l’opérateur historique outre-Rhin.
Pierre Manière
A en croire le géant britannique des télécoms, l’acquisition de Unitymedia va lui permettre « de créer un challenger national à l’opérateur historique en Allemagne ».
A en croire le géant britannique des télécoms, l’acquisition de Unitymedia va lui permettre « de créer un challenger national à l’opérateur historique en Allemagne ». (Crédits : Suzanne Plunkett)

Après des mois de discussions, ils ont finalement conclu un énorme deal. Ce mercredi, Vodafone, le géant britannique des télécoms, a annoncé qu'il allait dépenser la bagatelle de 18,4 milliards d'euros pour mettre la main sur des actifs européens de Liberty Global. Cette énorme transaction comprend un versement de 10,8 milliards d'euros en numéraire et 7,6 milliards d'euros de reprise de dette de Liberty Global, qui appartient à John Malone, le magnat américain du câble. Elle comprend en particulier Unitymedia, le deuxième câblo-opérateur d'Allemagne, ainsi que d'autres actifs en République Tchèque, en Hongrie et en Roumanie.

Avec cette acquisition, Vodafone espère tailler des croupières à Deutsche Telekom outre-Rhin. A en croire le géant britannique des télécoms, l'acquisition de Unitymedia va lui permettre « de créer un challenger national à l'opérateur historique en Allemagne ». Et ce, notamment en disposant ainsi d'un réseau Internet fixe plus étendu qu'aujourd'hui. Vodafone présente cette emplette comme un moyen d'être beaucoup plus compétitif sur le front des offres dites « convergentes ». C'est-à-dire des offres comprenant à la fois l'Internet fixe, la téléphonie fixe et mobile, ainsi que la télévision.

La convergence en ligne de mire

De fait, Unitymedia dispose aujourd'hui de 13 millions d'abonnés au câble, au satellite et à Internet, et est présent dans 12 des 20 principales villes d'Allemagne. Avec son réseau, complémentaire du sien d'un point de vue géographique, Vodafone estime être en mesure de connecter 25 millions de foyers allemands à horizon 2022. Aujourd'hui, Vodafone dispose d'une part de marché dans l'Internet fixe de 19,8%, contre 40,1% pour Deutsche Telekom, 10,6% pour Unitymedia, et 13,5% pour Drillisch. Sur ce créneau, et sous réserve que le deal avec Liberty Global soit autorisé, le géant britannique se retrouvera avec une part de marché d'un peu plus de 30%. Ce qui ferait du groupe un solide numéro deux derrière l'opérateur historique. Sachant que dans le mobile, Vodafone est aujourd'hui leader outre-Rhin, avec une part de marché de 24%. Tandis que ses rivaux Deutsche Telekom, O2, et Freenet disposent respectivement de 22%, 21% et 9% du marché.

Ce deal constitue-t-il, pour autant, une bonne affaire ? Plusieurs analystes demeurent, à ce sujet, un brin dubitatifs. Interrogé par La Tribune, un analyste londonien estime que cette acquisition est « trop chère et trop risquée pour Vodafone ».

« D'une part la valorisation paraît assez élevée, et d'autre part, cela va mettre Vodafone dans une situation de dette élevée alors que les enchères pour les fréquences 5G vont bientôt arriver », argue-t-il, jugeant qu'un échange d'actifs entre les deux géants aurait été une meilleure solution.

Selon lui, si Vodafone améliore sa position en Allemagne, le groupe voit sa position inchangée au Royaume-Uni, où il n'est, pour le coup, pas « convergent ».

Deutsche Telekom craint pour la concurrence

Quoi qu'il en soit, il n'est pas dit que ce deal aboutisse. Sa finalisation est prévue pour la mi-2019. Mais cette acquisition va faire l'objet d'un long et minutieux examen par les autorités de la concurrence. Celles-ci pourraient très bien la bloquer, ou l'autoriser sous réserve que les acteurs cèdent certains actifs à des concurrents ou à de nouveaux entrants. À ce sujet, Deutsche Telekom a déjà indiqué que cette opération était de nature à fausser la concurrence en Allemagne. Pour l'opérateur historique, ce deal donnerait naissance à un opérateur trop dominant dans la télévision par câble. Ce mercredi, lors d'une conférence téléphonique visant à présenter ses résultats trimestriels, Tim Höttges, chef de file de Deutsche Telekom, a rappelé que la réglementation imposait à son groupe des contrôles tarifaires et l'ouverture de son réseau à des acteurs tiers.

« Je me battrai personnellement pour une concurrence loyale pour nos clients, afin qu'on ne soit pas lésé », a-t-il déclaré.

(avec AFP et Reuters)

Pierre Manière

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