Mise au point d'outils de diagnostics, développement de traitements préventifs ou curatifs... Plus d'un an après l'apparition de la Covid-19, la recherche continue de battre son plein parmi les biotechs françaises. Pour preuve : plus d'une centaine de solutions contre le coronavirus sont en cours de développement par des entreprises de la healthtech dans l'Hexagone, a affirmé mercredi France Biotech, association regroupant des entrepreneurs de l'innovation en santé.
Parmi ces solutions, les fameux vaccins. "Différentes sociétés ont mobilisé leurs plateformes technologiques pour développer des candidats-vaccins qui aujourd'hui sont à différents stades de développement et viennent enrichir la diversité de l'arsenal vaccinal pour être en capacité de répondre aux besoins croissants et à venir", explique France Biotech.
Actuellement, seulement trois vaccins ont été autorisés à date par la Haute Autorité de Santé en France : Pfizer-BioNTech, Moderna - des vaccins reposant sur la technique de l'ARN messager - et AstraZeneca - un vaccin à vecteur viral prenant comme support un autre virus. Mais les retards de production et de livraison, les difficultés d'acheminement et de stockage ouvrent la voie à d'autres initiatives pour pouvoir répondre à la demande et élargir les campagnes vaccinales.
Des essais cliniques toujours en cours
Parmi les pépites françaises, Valneva est dans les starting-blocks. Lancée en 2012, cette société nantaise développe un vaccin à virus inactivé - un processus déjà utilisé pour les vaccins contre la grippe, la rage ou encore l'hépatite A. Avec cette méthode, le virus injecté a été préalablement "tué" pour perdre de sa capacité à nuire à l'organisme, mais il reste suffisamment "puissant" pour pouvoir être identifié par le système immunitaire. Malgré des essais cliniques toujours en cours, Valneva a déjà lancé la production de son vaccin pour pouvoir être en mesure de livrer à horizon 2022.
Son premier partenaire est le gouvernement britannique, qui lui a déjà passé une commande de 100 millions de doses d'ici à 2022 pour une facture de 470 millions d'euros. Le gouvernement britannique se réserve également des options pour 90 millions de doses supplémentaires, pouvant être livrées en 2023 et 2025. Montant total de l'ardoise : 1,4 milliard d'euros pour les 190 millions de doses, si toutes les options sont exercées. La jeune pousse est également en discussion avec la Commission européenne pour la fourniture de 60 millions de doses.
Une arrivée espérée sur le marché à horizon 2022
FlashTherapeutics, Aiova, Osivax, Ose Immunotherapeutics... A l'instar de Valneva, ces startups françaises se sont aussi lancées dans la course aux vaccins. Essais cliniques oblige, tous visent sur une arrivée sur le marché pas avant 2022... Un horizon trop lointain ?
"Je ne pense pas. Je crois qu'en 2022 nous aurons toujours besoin de nouveaux vaccins car les mutations et les variants du Covid-19 devraient continuer de se développer. Et les vaccins de première génération ne seront peut-être plus efficaces", avance Alexis Peyroles, directeur général d'Ose Immunotherapeutics.
Son entreprise, basée à Nantes et Paris, planche sur un projet de vaccin "multi-cibles", ciblant onze protéines du virus au lieu d'une. Le but : lutter contre les variants actuels et à venir.
Son constat est partagé par Alexandre Le Vert, cofondateur et directeur général d'Osivax. Spécialisée dans les virus respiratoires et pandémiques, cette société lyonnaise s'inspire de son "vaccin universel" s'attaquant à toutes les souches de la grippe pour son projet de vaccin anti-Covid.
"Regardons ce qu'il se passe avec la grippe - elle mute au fur et à mesure des vaccins. C'est pourquoi les vaccins changent tous les ans et leur efficacité est très variable selon les années. Avec le coronavirus, il est possible que la même chose se produise, amputant l'efficacité des vaccins actuels."
Bpifrance n'a pas été à la hauteur
Pour mener à bien leurs recherches, poursuivre leurs essais cliniques et entamer une production, ces biotech doivent se confronter à la délicate étape de la levée de fonds. Ce passage obligé est particulièrement compliqué pour une startup dans le domaine de la santé car les temps de développement des vaccins et des traitements sont généralement longs et coûteux, avec un retour sur investissement parfois incertain.
"Il est extrêmement difficile de trouver des financements, privés comme publics", témoigne Corinne Ronfort, fondatrice de la société Aiova qui développe un vaccin anti-Covid et se dit en "recherche active de fonds" pour pouvoir financer la poursuite de ses essais précliniques.
Et de poursuivre : "Il faut souvent avoir atteint un certain stade de développement déjà avancé pour parvenir à séduire des investisseurs, publics comme privés."
Or, bien souvent, "les projets sont lancés avec des fonds limités", complète Alexandre Le Vert. "Nous sommes toutes des petites sociétés, donc nous focalisons nos ressources sur un projet phare." Pour pouvoir se lancer dans la recherche d'un vaccin contre le Covid-19, son entreprise Osivax est parvenue à bénéficier d'un financement "existentiel" de la part de Bpifrance de 11 millions d'euros sur trois ans. Mais il admet que la Banque publique d'investissement "n'a pas été proactive. Ils communiquaient simplement sur les différents dispositifs d'aides."
Même son de cloche chez Alexis Peyroles, d'Ose Immunotherapeutics, qui a obtenu un financement de 5,2 millions d'euros de la part de Bpifrance. Dans ce cadre-là, la startup s'est engagée à accorder à l'État une option d'achat sur les doses de son vaccin anti-Covid en contrepartie du remboursement de l'aide obtenue. "Bpifrance n'a pas été proactive, regrette-t-il. L'appel d'offres qui a été mis en place était intéressant. Mais lorsque l'on regarde du côté de l'Allemagne, qui a apporté de très larges financements à ses biotech, cela donne à réfléchir sur notre financement en France."
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