Fraudes du trader d'UBS : on attend toujours les réformes des pratiques bancaires

Le procès du trader d'UBS, Kweku Adoboli, qui s'ouvre aujourd'hui à Londres montre que, malgré leurs affirmations, les banques n'ont pas suffisamment renforcé leur système de prévention du risque depuis l'affaire Kerviel.
Kweku Adoboli, le trader d'UBS est inculpé dans le cadre de l'enquête sur une perte de deux milliards de dollars sur les marchés.Copyright Reuters

Lorsque Kweku Adoboli est arrêté le 15 septembre 2011, sa direction dit tomber des nues. Aucun de ses supérieurs ne se serait aperçu des fraudes opérées par cet opérateur des marchés de 31 ans. La banque prétend alors, et encore aujourd'hui, n'avoir rien vu venir alors qu'elle aurait peu auparavant renforcé son système de détection et de gestion du risque suite à une précédente déconvenue : en 2009, quatre employés de sa division gestion de patrimoine avaient réalisé des opérations non autorisées, engendrant l'imposition d'une amende de £8 millions par l'autorité britannique des marchés financiers (FSA) et le remboursement de £42 millions à leurs clients.

Juste avant l'affaire, UBS se vantait de sa gestion des risques

En juin 2011, le grand patron d'UBS Oswald Gruebel s'était même vanté que « Nous n'avons pas de risques inutiles dans nos positions. Je suis assez convaincu que nous avons l'une des meilleurs gestions des risques de l'industrie (..) Même dans un marché au volume plus réduit, nous n'avons pas accru nos risques. » Ces déclarations sont revenues le hanter trois mois plus tard et ont favorisé son éviction, d'autant que l'annonce que les opérations illicites de Kweku Adoboli remontraient à 2008 prouve l'inefficacité réelle de toutes ces mesures.

Des études mais pas de mesures concrètes

UBS n'est pas la seule dans ce cas. Interpellée par l'affaire Kerviel, la FSA n'était également pas restée inactive. Elle avait initié une série d'exercices destinés à tester le comportement et les méthodes de réactions des cinquante principales institutions financières de la place de Londres. « Nous étions satisfait d'entendre que nombre de ceux avec qui nous avions parlé avaient déjà initié des études pour identifier et corriger les trous qui auraient pu exister dans leurs contrôles des transactions, » explique Philip Robinson, son directeur du crime financier. La FSA leur avait spécifiquement demandé si elles avaient « organisé des processus de confirmation et des contrôles pour minimiser les risques associés à des transactions non confirmées ». C'est pourtant exactement ce qui permit à Kweku Adoboli, comme Jérôme Kerviel, d'agir : ils avaient inventé des transactions servant de contreparties à leurs périlleuses prises de position. Le travail d'initiation lancé par la FSA n'avait donc servi à rien.

Si l'autorité assure vouloir changer les habitudes du secteur, rien de concret n'a pourtant été encore annoncé en ce sens. Les soucis posés par la gestion du personnel, en clair les transferts des employés du « back-office », qui gèrent les activités de soutien aux analystes et comprennent notamment les méthodes de surveillance du « front office », à ce dernier, n'ont pas été attaqués. Kerviel et Adoboli étaient pourtant tous deux passés par le « back-office » et, une fois arrivés au « front office », avaient utilisés leurs connaissances des protocoles pour déjouer les contrôles.

Le scandale du Libor après l'affaire Adoboli...les modifications "urgentes" se font attendre 

Dans son rapport au gouvernement, la commission indépendante Vickers a de son côté conseillé en juin de séparer les activités de détail et d'investissement des banques d'ici à 2019, afin que les risques de ces dernières reposent sur leurs propres épaules, pas sur celle de l'Etat et donc du contribuable. Mais le ministère des finances a immédiatement annoncé l'application d'une version atténuée de cette proposition afin de s'assurer que « les banques britanniques seront résistantes, stables et compétitives, et donc attrayantes pour les investisseurs nationaux et internationaux », selon les propos du ministre-adjoint au trésor Mark Hoban.

Le 18 août, la commission des finances de la chambre des communes a à son tour appelé à des modifications urgentes de la supervision des banques après l'explosion du scandale du Libor. Elle conseillait « d'agir dans certains domaines dont l'augmentation des amendes pour les groupes qui ne coopèrent pas avec les régulateurs, le besoin d'examiner les lacunes du droit pénal et la nécessité d'un cadre de gouvernance bien plus solide à la Banque d'Angleterre ». Rien de bien précis mais des éléments qui prouvent que, face à des entreprises au pouvoir de lobbying considérable et à un gouvernement peu volontaire, les réformes restent lettre morte.  

Ce qu'on reproche à Kweku Adoboli

Kweku Adoboli, de nationalité ghanéenne, et spécialiste en fonds indiciels dits « ETF » (Exchanged traded fund), est accusé de fraude et de fausses écritures comptables, entre octobre 2008 et septembre 2011. 

 

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 1
à écrit le 10/09/2012 à 12:42
Signaler
Encore une fois on oublie que Kweku Adoboli est de nationalité Britannique. Toujours la meme histoire, en cas de succes, les pays occidentaux revendiquent ce succes de leurs ressortissants d'origine étrangère et en cas d'echec ils oublient que ce son...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.