Hollywood, le "show" et le "business"

Gagner un oscar apporte la gloire mais pas forcément la fortune. Jeff Katzenberg et son studio DreamWorks Animation en ont fait l'amère expérience.

"And the winner is... Wallace & Gromit!". A la cérémonie des Oscars, dont la prestigieuse Académie a récompensé Wallace & Gromit de la statuette dorée si convoitée, l'équipe de DreamWorks Animation, coproductrice du dessin animé, a dû croire à un rêve. "Le mystère du lapin-garou", le quatrième opus du tandem tordant en pâte à modeler, a aplati deux concurrents très sérieux et donnés favoris, "Les Noces Funèbres" du délirant Tim Burton et le "Château ambulant" du japonais Hayao Miyazaki. Son créateur Nick Park a ainsi raflé le quatrième Oscar de sa carrière. Mais cette victoire avait un goût amer pour la "dreamteam" du studio californien. A Hollywood, Oscar n'est pas forcément synonyme de blockbuster. Le dessin animé à l'ancienne n'a pas réalisé le carton escompté, en dépit des 184 millions de dollars de recettes engrangées: l'admiration unanime de la critique ne s'est pas traduite en succès commercial, en particulier auprès du public américain, dérouté par cet humour "so british".

Quatre jours après les pompes de la cérémonie, on range les sourires de circonstance au profit du masque à grimaces. La présentation des résultats annuels de DreamWorks Animation ressemble à un mauvais carnet de notes plus qu'à un tableau d'honneurs. Le studio a dû déprécier de 25 millions de dollars la valeur de Wallace & Gromit, bien obligé de se rendre à l'évidence du bide de la sortie DVD du film. Fini le conte de fées, eût-il pour héros un ogre vert, Shrek, le triomphe inégalé de DreamWorks... L'annonce d'une baisse des deux tiers du bénéfice net a été accueillie sous les sifflets à Wall Street. L'action DreamWorks Animation a chuté de 4,5% vendredi. Le rachat de son concurrent Pixar par Disney lui avait pourtant redonné de l'éclat fin janvier. Mais au Box Office des marchés américains, l'action Pixar remporte de loin le trophée, avec un gain de 45%, tandis que DreamWorks affiche le triste score de -30%.

L'humeur n'est sans doute pas à la célébration chez les actionnaires de DreamWorks Animation, au premier rang desquels le PDG du studio: le fringant quinqua Jeffrey Katzenberg, qui fut longtemps le chouchou de Hollywood et de toutes ses "parties", et se serait bien épargné d'endosser le rôle de composition de "loser". Si son studio vient de récolter une jolie statuette, Katzenberg vient de perdre sa précieuse couronne de nabab: Forbes l'a éjecté sans façon de sa toute dernière liste des milliardaires du monde entier, sa fortune ayant fondu au même rythme que l'action DreamWorks... Ses partenaires dans la création du studio, Steven Spielberg et David Geffen, grâce à leurs autres sources de revenus, ont pu conserver leur ticket VIP. Peut-être plus grave encore, certains à Wall Street, s'inquiètent de la solidité d'un modèle économique tributaire de l'accueil réservé à deux films, le rythme annuel habituel de sorties chez DreamWorks Animation. Ce qui ne laisse aucune place aux rêves, non concrétisés, de succès dans les salles...

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