Décarbonation : l'Allemagne lance un gigantesque plan de soutien pour verdir son industrie

Polluer moins et être davantage compétitif. C'est le tournant opéré par l'Allemagne qui lance un nouveau programme de plusieurs dizaines de milliards d'euros afin de transformer son industrie lourde.
L'Allemagne a lancé mardi un programme doté de plusieurs dizaines de milliards d'euros pour soutenir la transformation de son industrie lourde.
L'Allemagne a lancé mardi un programme doté de plusieurs dizaines de milliards d'euros pour soutenir la transformation de son industrie lourde. (Crédits : Ina Fassbender)

Un mécanisme unique en Europe. L'Allemagne a lancé mardi un programme doté de plusieurs dizaines de milliards d'euros pour soutenir la transformation de son industrie lourde et préserver sa compétitivité, alors que le pays veut atteindre la neutralité carbone en 2045.

Baptisé « contrat carbone pour la différence », ce mécanisme financera ainsi dans les faits les investissements des entreprises sélectionnées en compensant les coûts supplémentaires engendrés par les nouveaux procédés de production moins polluants.

Le but : « Atteindre nos objectifs climatiques tout en maintenant la production en Allemagne », a commenté le ministre de l'Economie Robert Habeck, lors d'une conférence de presse.

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Contrat sur 15 ans

Dans le détail, les industries les plus énergivores dégageant « plus de dix kilotonnes de CO2 par an », comme celles du verre, du métal, du papier, de l'acier ou encore de l'aluminium, vont pouvoir soumettre leur projet de transformation à l'Etat qui sélectionnera les plus ambitieux sur le plan environnemental mais aussi les moins coûteux.

Un contrat sur 15 ans sera ensuite signé : si durant cette période, la production issue des techniques moins polluantes devient plus rentable que la production conventionnelle, notamment parce que le prix de la tonne de CO2 sur le marché européen s'est envolé, les entreprises rembourseront à l'Etat une partie des aides.

La première phase du programme permettra de répartir la somme de 4 milliards d'euros entre les entreprises sélectionnées. Un deuxième appel d'offres s'ouvrira à l'automne et portera sur un montant de 19 milliards d'euros de subventions.

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Décarboner le secteur

L'Allemagne doit décarboner son vaste secteur industriel. A titre d'exemple, la sidérurgie représente, a elle seule, 6% des émissions de gaz à effets de serre du pays. Les entreprises allemandes se lancent ainsi de plus en plus dans le pari de l'hydrogène. En inaugurant à Berlin une usine commune de modules d'électrolyseurs, l'allemand Siemens Energy et le français Air Liquide ont posé fin 2023 les bases d'un futur Airbus européen de l'hydrogène dans l'espoir d'accélérer la décarbonisation de l'industrie lourde et des transports sur le Vieux Continent.

Dans la Ruhr, le sidérurgiste allemand Thyssenkrupp, deuxième en Europe derrière ArcelorMittal, compte, de son côté, transformer ses quatre haut-fourneaux historiques de Duisbourg. L'hydrogène lui servira à désoxyder le minerai de fer nécessaire pour fabriquer l'acier, remplaçant le charbon qui joue ce rôle depuis un siècle et demi.

Préserver la compétitivité

D'autant que l'Allemagne se bat au même moment pour préserver sa compétitivité après avoir vu s'envoler les prix de l'énergie dans le sillage de la guerre en Ukraine qui l'a privé du gaz russe bon marché. Sur l'ensemble de l'année passée, l'industrie allemande s'est contractée d'1,5% par rapport à 2022, en restant en deçà des niveaux connus avant la pandémie de Covid-19. Ce qui a contribué à peser dans la performance économique moyenne de l'Allemagne l'année dernière, habituellement moteur de l'UE.

Le spectre de la délocalisation plane donc sur nombre d'entreprises, qui souffrent d'un manque de rentabilité vis-à-vis notamment de leurs concurrentes américaines bénéficiant du vaste programme de subventions IRA mis en place par l'administration de Joe Biden et où l'électricité y est moins chère. Ce programme de subvention pousse de nombreuses entreprises européennes dans différents secteurs industriels à implanter des usines Etats-Unis ou y accroître leurs capacités de production. Fin février, c'est le fabricant suisse de panneaux solaires Meyer Burger qui a annoncé lancer les préparatifs pour fermer son usine photovoltaïque près de Dresde dans l'Est de Allemagne, en stoppant la production début mars, le groupe préférant se concentrer sur le pays de l'Oncle Sam.

Le mécanisme allemand est ainsi « une bonne réponse » au plan américain, a affirmé le ministre allemand de l'Economie. Un programme salué également par de nombreuses parties prenantes. « Il est important que les entreprises puissent compter sur le soutien de l'Etat pour leurs projets de décarbonation », a de son côté salué le président du lobby industriel BDI Siegfried Russwurm. L'Allemagne a besoin d'une « offensive d'investissements » pour atteindre ses objectifs climatiques, a déclaré récemment l'ONG Agora Energiewende.

(Avec AFP)

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Commentaires 2
à écrit le 13/03/2024 à 8:35
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"Alors on va commencer déjà par donner un milliard à madame Van Layen..." "Mais pourquoi ?" "Ben parce que c'est comme ça faut pas poser de question si tu veux continuer de toucher 10000 balles par mois vieux !" Au secours.

à écrit le 12/03/2024 à 19:18
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En. même temps ils n'ont plus trop le choix vu qu'ils n'ont plus du gaz Russe "à pas cher".

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