L'annonce de Bruno Le Maire n'est pas tombée dans l'oreille d'un sourd, et en particulier dans celles des élus locaux. Dans le cadre du plan d'économies de 10 milliards d'euros annoncé au micro de TF1 dimanche soir par le ministre de l'Economie et des Finances, le Fonds vert, censé accélérer la transition écologique sur le terrain, est raboté de 400 millions. De 2,5 milliards d'euros, l'enveloppe tombe ainsi à 2,1 milliards.
« Reporter, c'est aussi un certain nombre de projets que nous accompagnons à côté des collectivités territoriales. Nous continuons à les accompagner, mais nous réduisons d'une certaine manière l'ampleur du soutien pour tenir compte de cette nouvelle donne des finances publiques et la baisse de nos recettes. Donc ce qui conduira concrètement à reporter un certain nombre de projets », a justifié, hier, Bruno Le Maire, devant la presse réunie à Bercy.
Une inflation record
Hasard du calendrier, le groupe SFIL, banque publique de développement hybride créée en 2013, entre société de droit privé et filiale à 99,9% de la Caisse des Dépôts, a présenté, ce matin, ses résultats annuels. L'an dernier, l'établissement a ainsi octroyé 4 milliards d'euros de prêts aux élus locaux. C'est 15% de plus qu'en 2022 : +181% aux régions, +35% aux départements et +2% au bloc communal.
« C'est une année honorable, moins marquante, mais solide tout de même », a commenté, lors d'un point presse, Stéphane Costa de Beauregard, directeur du secteur public local au sein du groupe SFIL.
Et pour cause, en 2023, les dépenses de fonctionnement des collectivités ont augmenté de 5,9%, du fait de l'inflation. Cette dernière a joué sur les dépenses de personnel, les achats et les charges externes. En parallèle, les recettes de fonctionnement n'ont augmenté que de 3%, plombées par une chute des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) - les frais de notaire -, mais quelque peu sauvées par une « relative stabilité de la TVA ».
Un effet de ciseau défavorable
En résumé, un effet de ciseau « défavorable » sur l'épargne des collectivités territoriales et le retour de « l'incertitude » qui dégradent l'épargne brute et qui font prendre du retard dans les décisions d'emprunt. « Outre cet effet d'attente face à l'emprunt, les élus locaux sont comme sidérés face aux taux », a insisté le directeur du secteur public Stéphane Costa de Beauregard.
Dans ce contexte compliqué, la part des prêts verts a néanmoins progressé de 3 points. Ils représentent désormais 22% des prêts accordés, contre 19% en 2022. 200 millions d'euros sur les 4 milliards de 2023 résultent par exemple d'un partenariat noué en novembre 2022 avec la Banque des territoires, autre entité de la Caisse des Dépôts, qui permet d'octroyer des prêts à taux fixe d'une durée d'amortissement de 25 à 40 ans.
3 milliards d'euros prêts verts octroyés depuis mi-2019
A date, le groupe SFIL revendique ainsi avoir octroyé 3 milliards d'euros de prêts verts depuis mi-2019 auprès de 619 collectivités territoriales dans la gestion de l'eau et de l'assainissement, la mobilité - une ligne de tramway à Nice, de métro à Toulouse - ou encore dans l'efficacité énergétique et la rénovation des bâtiments publics, sans oublier la gestion et la valorisation des déchets.
Depuis octobre 2022, l'établissement financier propose également, avec la Banque postale, des prêts sociaux pour aider les élus locaux à financer l'action sanitaire, sociale et familiale, l'enseignement, la formation professionnelle, le sport, la culture, la vie associative, la cohésion des territoires ou encore les pompiers. Ces derniers ont ainsi représenté 14% de sa production en 2023 avec 700 millions d'euros octroyés en un an et demi.
Des prêts qui peinent à trouver leur public
Sauf que malgré des besoins « très importants », ces prêts, qu'ils soient verts ou sociaux, peinent encore à trouver leur public.
« En matière de financement, les collectivités n'ont pas de sujet. Leur situation financière, bien que différenciée selon les strates, reste bonne et les acteurs sont présents », a ainsi affirmé Philippe Mills, président du groupe Sfil.
Avant d'ajouter : « Notre sujet, ce sont les projets. Nous pourrions faire beaucoup plus de prêts verts et de prêts sociaux si nous avions plus de projets », a poursuivi le dirigeant de l'établissement financier. Autrement dit, Fonds vert ou pas, les élus locaux doivent encore se saisir des outils à leur disposition pour financer la transition écologique. Aujourd'hui, il constitue seulement une incitation à agir...
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