L'or perd en popularité, après une demande ternie en 2023

La demande d'or s'est affaiblie en 2023, à cause des taux d'intérêt élevés et des prix record, selon le Conseil mondial de l'or. Une baisse de consommation qui ne l'a cependant pas empêché de dépasser les 2.000 dollars l'once.
Malgré de nombreux points négatifs, l'or a tout de même atteint son record historique en décembre 2023, à 2.135,39 dollars l'once.
Malgré de nombreux points négatifs, l'or a tout de même atteint son record historique en décembre 2023, à 2.135,39 dollars l'once. (Crédits : Reuters)

L'or a perdu en popularité en 2023. La demande mondiale a en effet reculé de 5% l'an dernier, à 4.448,4 tonnes, lestée par un quatrième trimestre plus faible (-12% en glissement annuel), d'après le rapport trimestriel du Conseil mondial de l'or (CMO) publié ce mercredi.

Des sorties d'ETF, ces titres financiers cotés indexés sur le cours du métal jaune, ainsi qu'une légère baisse de la demande de lingots et pièces ont fait chuter le total de l'investissement en or de 15% en 2023, à 945,1 tonnes, soit son plus bas niveau depuis 10 ans, selon le rapport du CMO.

Comment expliquer cette frilosité de la finance?

« Les investisseurs ont réagi à l'environnement de politique monétaire (avec) la hausse des taux d'intérêt » de la Réserve fédérale américaine (Fed) et « les conséquences que cela a eu sur les rendements obligataires », a expliqué à l'AFP Louise Street, analyste du CMO.

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A partir de mars 2022, la banque centrale américaine a procédé à onze hausses de taux, le principal taux directeur de la Fed, se situant depuis juillet 2023 dans une fourchette de 5,25 à 5,50%, son niveau le plus élevé depuis janvier 2001. Or, les hausses de taux de la Fed ont tendance à soutenir le dollar et les rendements des taux obligataires américains. Tous les deux sont considérés comme des valeurs refuges faisant de l'ombre à l'or qui, contrairement aux obligations, ne distribue pas de rendement. Pour l'analyste du CMO, les investisseurs « considèrent que cela a un effet négatif sur le coût d'opportunité de l'or, ce qui peut nuire à leur vision de l'investissement ».

Une baisse de la demande physique... mais un cours qui s'envole

Côté or physique, les banques centrales ont quant à elles acheté 1.037,4 tonnes d'or en 2023, soit 4% de moins qu'en 2022, année qui avait été marquée par une demande des institutions monétaires au plus haut depuis 55 ans. L'or a, en effet, été particulièrement prisé par les banques centrales au cours des deux dernières années, en raison de la performance du métal précieux « en tant que protection contre l'inflation, de sa performance en temps de crise et de son rôle de valeur refuge », a relevé Louise Street.

En parlant de lingots et pièces uniquement, la demande a baissé de 3% l'année dernière, à 1.189,5 tonnes. Enfin, sur l'année 2023, l'utilisation de l'or dans le secteur technologique a fléchi de 4%, à 297,8 tonnes, car la demande d'électronique a souffert.

Malgré tous ces points négatifs, l'or a tout de même atteint son record historique en décembre 2023, à 2.135,39 dollars l'once. A l'origine de ce rebond qui peut sembler contre-intuitif : l'espoir d'une baisse des taux à venir en 2024. Fin 2023, les attentes chez les investisseurs de baisses à venir des taux d'intérêt américains ont pesé sur le billet vert comme sur les rendements des obligations d'Etat et redoré le blason du métal jaune. Il a également tiré parti d'une prime de risque géopolitique liée à la guerre israélo-palestinienne, déclenchée par l'attaque meurtrière du Hamas sur le sol de l'Etat hébreu le 7 octobre, en augmentant de plus de 10% en à peine 20 jours.

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Une année 2024 de bonne augure

En 2024, la perspective d'un atterrissage en douceur de l'économie américaine devrait soutenir l'or avec des taux d'intérêt légèrement plus bas, selon le rapport. Le rendement des obligations américaines à 10 ans est passé de 5% à la mi-octobre à 3,9% ces derniers jours.

Pour la gestion du risque, cela peut fournir un argument pour allouer plus d'or dans les portefeuilles. « Le pic des taux d'intérêt qui finira par se matérialiser et un affaiblissement du dollar devraient continuer à soutenir la demande en or au premier semestre 2024. Je table sur un cours de 2.100 dollars l'once vers le milieu de l'année », affirmait à La Tribune, Jianwen Sun, stratège au sein du groupe bancaire suisse Lombard Odier. Et dans ses dernières estimations, la banque américaine JP Morgan voit même l'or atteindre les 2.300 dollars l'once au deuxième semestre 2024 et au premier semestre 2025, grâce à la baisse des taux.

Les risques de récession mondiale, ainsi que la baisse de l'inflation pourraient cependant plomber la demande d'or, valeur refuge contre la hausse des prix, note néanmoins le CMO dans ses perspectives pour cette année.

Les bijoux en or toujours plus prisés

La consommation annuelle de bijoux est, elle, restée à quelques tonnes près stable en 2023 par rapport à l'année précédente, s'établissant à 2.092,6 tonnes. La demande en bijoux « s'est montrée très résiliente » compte tenu du fort prix de l'or, a souligné Louise Street. D'autant que pour certaines devises, en Inde ou en Chine, « nous avons constaté une augmentation encore plus forte du prix local (de l'or) que du prix en dollars américains », a signalé l'analyste.

Selon Louise Street, les achats de bijoux ont repris en Chine, après les années de pandémie de Covid-19 marquées par une demande de bijoux en berne, en l'absence de mariages et célébrations où ils sont traditionnellement offerts. Sans ces prix si élevés, « nous aurions probablement constaté une augmentation encore plus forte », a estimé l'analyste.

(Avec AFP)

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Commentaire 1
à écrit le 31/01/2024 à 21:05
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Très bon article objectif (enfin!)👍

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